28.
Samson contre Hercule (Gianfranco
Parolini, 1961. Avec Brad Harris, Alan Steel,
Walter Reeves, Brigitte Corey, Serge Gainsbourg)
(en kiosque en France : 25 août 2005)
Samson rend visite à la ville de Sullan,
dont la reine Mila est son amie. Le rebelle
Hercule lui dispute la possession d'un sanglier,
dont Samson comptait faire son souper. Surviennent
alors les gardes de l'usurpatrice Romhilde,
qui l'arrêtent sans autres formes de procès.
Comme ami de l'ancienne reine, Samson ne peut
être que son ennemi. Aussi, son fourbe
et odieux conseiller Warkalla lui ayant conseillé
de le faire périr, le héros est-il
placé dans une machine de torture qui
doit l'écraser.
Néanmoins, avec l'aide d'Hercule et du
peuple révolté, Samson renversera
le régime tyrannique et restituera son
trône à Mila.
Rien de très mythologique dans ce
film - au demeurant bande d'aventures fort bien
troussée - tourné en même
temps qu'Hercule se déchaîne.
La ville de Sullan (ou Solum) est imaginaire,
et il est un peu vain de vouloir la rattacher
à certaine Salum, au sud de l'Egypte,
une oasis à la frontière de la
Lybie, ainsi qu'au combat du ravisseur des Pommes
d'Or des Hespérides contre le tyran égyptien
Busiris. Difficile, onomastiquement, de rattacher
Busiris à Warkalla (Serge
Gainsbourg); et du reste, si Hercule affronta
bien en terre africaine le géant Antée,
le rapport avec Samson (véritable héros
du film) est tout simplement impensable. |

|
Il est clair par
ailleurs que le décor gréco-romain
du film ne fait pas référence à
l'Egypte, même si l'on a pu une fois apercevoir
une statue pharaonique égarée-là
par hasard, et même si le titre allemand,
Herkules im Netz der Cleopatra a pu faire allusion
à une grande reine de ce pays. Pourtant,
il n'est pas totalement invraisemblable d'imaginer
une rencontre entre le fils de Zeus et le Juge
de Dan, ennemi des Philistins, comme du reste
le fera Pietro Francisci dans Hercule, Samson
et Ulysse. Les Philistins ne passaient-ils
pas pour être originaires de la mer Egée
- plus précisément de Caphtor, la
Crète ? |
Si l'identification du muscle-man de service
avec le biblique Samson semble incontestable au moins
dans les intentions des scénaristes - le titre
original est bien Sansone (voir notre commentaire
à Hercule
se déchaîne) - celle de son antagoniste
«Hercule» est spécieuse. A commencer
par le nom de l'acteur «Walter Reeves»
que nombre de fiches techniques distinguent d'un autre
acteur jouant dans le film : Sergio Ciani. Ancienne
doublure de Steve Reeves, Sergio Ciani deviendra une
star du muscle opera sous le pseudonyme d'Alan
Steel; Walter Reeves fut son premier pseudo, qu'il
n'utilisa qu'à cette seule occasion. Or donc,
dans les fiches schizophrènes, «Walter
Reeves» est Hercule et Sergio Ciani «Macigno».
Et la situation se complique avec les sources anglo-saxonnes
qui le désignent comme Hermès ou
«Millstone», c'est-à-dire «pierre
à meule», libre traduction de l'italien
«Macigno», «roc», «rocher»,
«pierre». C'est de «macigno»
que les Italiens tirent d'ordinaire le nom de Maciste
(même si, de toute évidence, G. D'Annunzio,
homme cultivé, songeait au superlatif grec
de megas). Il faut donc bien s'y résoudre
: il n'y a pas d'Hercule dans ce film, juste un faire-valoir
de Samson-Brad Harris, la vedette du film de Parolini.
Mais juste une question, en passant : depuis quand
la chair du sanglier est-elle casher ? Sans
doute est-il vrai que Samson fut un grand pécheur,
lui qui aima une femme philistine !
|
27.
Deux Nuits avec Cléopâtre
(Mario Mattoli, 1953. Avec Sophia Loren, Ettore
Manni, Alberto Sordi) (en kiosque en France
: 11 août 2005)
Alexandrie, 31 av. n.E. La belle reine d'Egypte,
Cléopâtre, s'ennuie dans son palais
tandis que l'amour de sa vie - Marc Antoine
- combat au loin. Elle occupe ses nuits en attirant
dans son lit les hommes de sa garde personnelle,
qu'elle fait ensuite mettre à mort. Il
ne ferait pas bon, en effet, que l'indiscrétion
de ces coqs en rut ne flétrissent sa
réputation !
Un jour, Marc Antoine requiert la présence
sur le front de son amante... et alliée
militaire. Par souci de discrétion, elle
se fait remplacer sur le trône par une
sosie, Nisca, une jeune femme dégotée
dans une taverne par son Grand Eunuque Tortul.
Or, cette nuit-là, c'est Cesarino, un
officier provincial fraîchement promu,
qui est de faction devant la porte de sa chambre
- un honneur que ne lui envient nullement ses
collègues qui tiennent à leur
peau... Ignorante des manies de sa reine, la
pauvre remplaçante laisse repartir à
l'aube son empressé admirateur, Cesarino
! Faut-il que ce Cesarino soit un sur-mâle
pour survivre à ce congrès avec
l'insatiable reine ?
Encore obscure débutante, Sophia
Loren dans le double rôle de Cléopâtre
et de Nisca, son sosie. Et Ettore Manni (qui
allait faire carrière dans le rôle
de l'éternel centurion romain) en Marc
Antoine. Le comique Alberto Sordi campe Cesarino,
et le traître attitré des films
de cape et d'épée, Paul Müller,
dans le réjouissant rôle de Tortul
! D'un point de vue historique, il y a peu de
choses à dire sur cette comédie
à l'italienne conduite par un spécialiste
du genre, Mario Mattoli (dans le domaine du
péplum, on lui sera encore redevable
d'un succulent Les Deux Corniauds contre
Hercule / Maciste contro Ercole nella Valle
dei Guai, avec Franco Franchi et Ciccio Ingrassia
: «Maciste contre Hercule dans la Vallée
des Larmes», tout un programme !), si
ce n'est que, des Elégies de Properce
(«cette prostituée offerte
à ses esclaves, qui réclama, pour
prix de son obscène mariage...»,
III, 30-32) au Pseudo-Aurélius Victor
(«... si débauchée qu'elle
s'afficha souvent et si belle que beaucoup payèrent
de leur vie une nuit avec elle»),
le film de Mattoli illustre superbement la propagande
augustéenne, qui pointait du doigt «le
Serpent du Nil», la prostituée
égyptienne qui tourna la tête au
digne Marc Antoine (Ah bon ?). |
 |
La même année,
l'Américain William Castle nous avait gratifié
d'une Cléopâtre interprétée
par Rhonda Fleming se consolant avec un certain
Lucillius (William Lundigan), officier d'Antoine
(Raymond Burr), en l'absence de celui-ci (Le Serpent
du Nil, 1953). Six ans plus tard, Cottafavi
en reprendrait l'idée en nous montrant
Linda Cristal/Cléopâtre s'échappant
de son palais le soir et dansant dans les bouges,
d'Alexandrie sous le pseudonyme de Bérénice.
Marc Antoine y était incarné par
Georges Marchal mais, glissant d'une case, Ettore
Manni demeurait son soupirant transi, sous les
frusques du gladiateur Lucillius-Curridio (Les
légions de Cléopâtre,
1959).
Toutefois, Lucillius/Lundigan était un
incorruptible républicain, un fidèle
de Brutus auquel il avait survécu à
la bataille de Philippes, avant de devenir le
prisonnier, puis l'ami d'Antoine; et il ne cédait
point à la séduction du «Serpent
du Nil». Quand à Lucillius-Curridio-Ettore
Manni - ami d'Antoine certes, mais surtout...
émissaire d'Octave -, il était,
si c'est possible, moins docile encore que son
homonyme américain ! |
La reine dévoreuse d'hommes,
la mante-religieuse est une constante du péplum,
depuis la reine de l'Atlantide Antinéa, dans
des différentes versions cinématographiques
du roman de Pierre Benoit, et jusqu'à la Messaline
cottafavienne, sans oublier Omphale,
la Reine de Lydie, dominatrice d'Hercule. Mais l'expression
la plus achevée du personnage appartiendra
paradoxalement à notre «prude»
Moyen Age en l'espèce de Marguerite de Bourgogne.
Son époux Louis X le Hutin étant parti
à la guerre, la reine Marguerite et ses deux
surs, Blanche et Jeanne - toutes trois belles-filles
de Philippe le Bel - se livraient à tous les
excès de la débauche dans la «Tour
de Nesle», sise face au Louvre, de l'autre côté
de la Seine, assassinant ensuite leurs amants devenus
témoins gênants. Alexandre Dumas père
et Frédéric Gaillardet en tirèrent
un drame en cinq actes et en prose (La Tour de
Nesle, 1832) et plus tard Michel Zévaco
(Buridan, le héros de la Tour de Nesle,
1926). Le sujet fut porté à l'écran
une demi-douzaine de fois (*)
Pour en revenir aux prouesses érotiques
prêtées à Cléopâtre,
nous n'insisterons pas sur les softcore (The
Notorious Cleopatra, A.P. Stootsberry, 1970) avec
Sonora et Les Nuits chaudes de Cléopâtre
(Cesar Tod [un nom pareil ne s'invente pas !],
1984) avec Marcella Petrelli, ou hardcore (The
Love Nights of Anthony and Cleopatra, Joe D'Amato,
1996) avec Olivia del Rio. Mais nous aimerions signaler
deux courts textes : Théophile Gautier,
Une nuit de Cléopâtre (1838) - pendant
que les légions d'Octave débarquent
en Egypte, Antoine et Cléopâtre, de croisières
en banquets, filent le parfait amour -, et aussi un
certain chapitre de l'Aphrodite. Murs antiques
(1898) de Pierre Louÿs, où l'on voit
extrêmement précoce la petite Cléo
- moins de dix ans - s'immiscer dans les affaires
privées de sa sur aînée,
la reine Bérénice.
(*)
La Tour de Nesle (Albert Capellani, 1912), avec
Henry Krauss et René Alexandre; Buridan,
le héros de la Tour de Nesle (Pierre Marodon,
1923 - d'après M. Zévaco), avec Hector
Bragny et Harry Flemming; La Tour de Nesle (Gaston
Roudès, 1937), avec Tania Fédor et
Jean Weber; Buridan, le héros de la Tour
de Nesle (Emile Couzinet, 1951 - d'après
M. Zévaco), avec Georges Rollin, Jacques
Torrens et, dans le rôle de Marguerite, Clarisse
Deudon; La Tour de Nesle (La Torre del Placere)
(Abel Gance - FR-IT, 1955 - d'après A.
Dumas), avec Pierre Brasseur et Sylvana Pampanini;
et enfin Der Turm der Verbotenen Liebe (Franz
Antel, 1968 - d'après A. Dumas), avec Jean
Piat et Teri Tordai. On en trouvera une version
plus historique dans le tome I du cycle de Maurice
Druon, Les Rois Maudits (1955) : «Le
Roi de Fer» (cf. DVD Les Rois Maudits
(1972), de Claude Barma).
|
26.
Jules César, conquérant de
la Gaule (Amerigo Anton [= Tanio
Boccia], 1963. Avec Cameron Mitchell, Rik Battaglia,
Nerio Bernardi, Dominique Wilms) (en kiosque
en France : 28 juillet 2005)
En 54 av. n.E., le [pro]consul romain Jules
César a déjà conquis la
plupart des territoires du nord de la «Provincia»
et s'apprête à tenter l'invasion
de la Bretagne pour la seconde fois. Mais la
Gaule, soumise depuis peu, est secouée
à nouveau par un mouvement de rébellion.
Son meneur, Vercingétorix, un ancien
esclave gaulois affranchi, est parvenu à
fédérer autour de qui de nombreux
peuples prêts à en découdre
avec Rome pour recouvrer leur liberté.
C'est la ville fortifiée d'Alésia
qui sera le théâtre de ce terrible
affrontement...
En recopiant ci-dessus le résumé
figurant au dos du DVD, je n'ai corrigé
que l'essentiel, laissant délibérément
la date de 54 av. n.E., car le film ne contient
pas que le siège d'Alésia en 52
(hélas difficile à distinguer
de la bataille de Gergovie - si la question
vous branche, regardez plutôt le Jules
César d'Uli Edel, de préférence
en VO, car la VF a été scandaleusement
raccourcie, précisément au détriment
du siège d'Alésia) mais également
celui de l'Atuatuca qui, lui, se déroula
en octobre 54. Au cours de celui-ci, quinze
cohortes romaines commandées par Sabinus
et Cotta se firent massacrer par les Eburons
d'Ambiorix (par Vercingétorix, dans le
film). Evidemment, le spectateur belge aura
bien du mal à reconnaître le paysage
de Tongres, dans le Limbourg belge, car le film
a été tourné - comme d'hab
- en Yougoslavie; toutefois, depuis La bataille
des Ardennes / Battle of the Bulge, filmée
en Espagne, ledit spectateur en a l'habitude
savez-vous ! Et puis d'ailleurs, on n'a toujours
pas avec certitude identifié le site
de l'Atuatuca (on a aussi avancé divers
sites de la région liégeoise)
! |
 |
Autrement plus croquignole est la reine des
Belges, Astrid, accourue au secours de son fiancé
Vercingétorix (*)
! C'est sans doute parce que Dominique «La
môme Vert-de-Gris» Wilms est d'origine
belge, qu'elle a été désignée
comme telle dans certains synopsis, la VF ne se
prononçant pas sur cette grave question.
Pourtant, le Star Ciné-Vaillance fait
d'Astrid la reine des Suèves... Comme quatre
ans plus tôt Jules avait infligé
une solide raclée à leur roi Arioviste,
je ne vois pas très bien ce que ces derniers
seraient venu faire à Alésia. Il
est vrai que les Suèves germaniques - naguère
invités par Celtill, vergobret des Arvernes,
à «occuper» le territoire de
ses ennemis les Eduens - les Suèves, donc,
devaient bien avoir quelque part conservé
de la sympathie pour le fils de leur ancien allié,
Vercingétorix (si toutefois les Suèves
- affreux et féroces barbares - eurent
jamais de la sympathie pour qui que ce soit, bien
entendu !). Rappelons tout de même que c'est
l'invasion du territoire des Eduens, alliés
de Rome, qui avait justifié l'entrée
en Gaule de Jules César ! |
Mais bon, moi je préfère m'en tenir
à la reine des Belges parce que ça flatte
ma fibre patriotique.
Bref, je ne vais pas refaire ici la Guerre des
Gaules (je tiens sous le coude un dossier Vercingétorix
- oui, le «chef-d'uvre avec Christophe
Lambert» ! - qui contient tout ce que vous vouliez
savoir sur ce sujet sans jamais avoir osé me
le demander par e-mail !). Par rapport à
L'esclave
de Rome et Seul
contre Rome (et aussi ici : CLICK)
qui traitent de la Guerre des Gaules d'une manière
plus fantaisiste, pour ne pas dire désinvolte,
la version d'Amerigo Anton a le mérite de mettre
en scène, très librement s'entend, des
faits avérés. En dehors de l'inévitable
beau centurion de service Claudius Valerius - «ils»
s'appellent toujours ainsi, même dans les films
de Marco Vicario ! -, les officiers de César,
interprété par Cameron «Bonanza»
Mitchell, sont tous authentiques : Marc Antoine (Bruno
Tocci), Quintus Cicéron (Aldo Pini) et les
pauvres Quintus Sabinus (Piero Palermini), le vaincu
de l'Atuatuca, et Publius Crassus (Fedele Gentile),
qui en 53 rejoignit en Orient l'armée de son
père, le fameux Marcus Licinius Crassus, où
ils se firent tous deux tuer à la désastreuse
bataille de Carrhæ. Sans oublier le sénateur
Caius Oppius (Cesare Fantoni), une créature
de César.
Bien sûr, ce n'était pas évident
de résumer en 105' trois années d'une
guerre qui en dura huit, aussi les scénaristes
durent-ils quelque peu aménager l'Histoire;
ainsi César va se découvrir une fille
adoptive, Publia ! Mais il y a de très bonnes
choses : l'excellent passage où l'on voit César
dicter simultanément ses mémoires et
plusieurs lettres à autant de secrétaires;
les intrigues du Sénat opposant Cicéron
à Pompée; et les aller-retours, l'hiver,
de César entre le front gaulois et Ravenne,
siège de son proconsulat; la traversée
des Cévennes enneigées avec, hum !,
seulement dix hommes... Ah ! Cameron Mitchell, figure
éminemment sympathique du péplum
(Il Massacro della Foresta Nera, All'ombra delle Aquille,
etc.); il prêta sa voix, paraît-il,
au Christ dans la VO de La Tunique !
Le seul bémol du film, historiquement parlant,
est la relation de César avec Vercingétorix.
Celui-ci n'était nullement un esclave, mais
le fils d'un notable de la République des Arvernes,
nommé Celtill. Celtill était un vergobret,
l'équivalent d'un consul à Rome, qui
aspirait à la royauté. Mal lui en prit.
Marchant sur ses pas, Vercingétorix avait d'abord
été un allié de César,
sans doute le commandant de la cavalerie arverne auxiliaire
des Romains.
«J'ai combattu. J'ai gagné... mais
je n'ai pas conquis l'âme des hommes, elle est
aussi indomptable que les nuages dans le ciel»,
philosophe César en pardonnant au rebelle
vaincu, qui repart libre. Happy End. Clio,
la Muse de l'Histoire, se retourne sur sa couche ouatinée...
là-haut dans l'Olympe !
(*)
Princesse suédoise, Astrid (1905-1935) était
devenue reine des Belges en épousant le roi
Léopold III. Aurait-on confondu
Sverige et Suevi ? Traduttore, traditore
!
|
25.
Maciste contre les hommes de pierre
(Giacomo Gentilomo, 1964. Avec Alan Steel, Jany
Clair, Hélène Chanel) / 84' [DVD
inédit] (en kiosque en France : 14
juillet 2005)
Voici bien longtemps, par une nuit de pleine
lune, une énorme boule de feu apparut
dans le ciel et s'écrasa sur la terre,
bouleversant les provinces de l'Etat de Samar.
Alors, des êtres étranges apparurent
dans la montagne, exigeant du roi de Samar un
holocauste de jeunes filles et jeunes hommes.
Tous les trois mois, quand vient la nuit du
sacrifice, les jeunes gens sont traînés
par les Gardes du Palais devant l'entrée
de la caverne, d'où jaillit une lumière
aveuglante, tandis que surgissent d'étranges
Hommes de Pierre. Ces créatures gardent
le corps inanimé de leur Reine Sélène
qui ne pourra revivre que lorsqu'une enfant
royale lui ressemblant sera sacrifiée.
Maciste est appelé à l'aide
par son vieil ami Gladius, père de la
belle Agar. Pour satisfaire le génie
de la montagne, Samara, la reine de Samar, a
l'intention de lui livrer sa propre demi-sur,
Billis. Son sang pur devrait permettre le réveil
de Sélène, la reine endormie.
Aidé par Agar et Darix, cousin de la
reine et fiancé de Billis, Maciste
parviendra-t-il à la sauver à
temps, confronté aux terribles gardiens
de la montagne, les Hommes de Pierre ?
|
 |
Ne
cherchez pas dans un atlas : vous ne trouverez
pas de «Samar». Il y a bien une
île de ce nom aux Philippines, connue
des amateurs de films d'aventures depuis que
George Montgomery lui consacra Samar, l'île
des révoltés (1962), mais ça
s'arrête-là. «Samar»
est cependant un de ces noms magiques, qui font
rêver... «Samarcande», porte
de l'Orient, par exemple. Toutefois, nous orienterions
notre exégèse plutôt vers
la Bible, vers Samarie la païenne ! Samarie
fut autrefois le royaume des Dix tribus d'Israël;
déportées on ne sait où
par le conquérant assyrien, elles furent
remplacées par des colons venus du Pays
d'entre les Deux Fleuves, adorateurs des cruelles
divinités de l'Assyrie. Les Evangiles,
en tout cas, nous présentent ces Samaritains
comme des gens infréquentables. Agar,
quant à elle, était le nom de
l'esclave égyptienne d'Abraham, qui conçut
pour lui Ismaël - dont descendent les Arabes
-, avant que son épouse Sarah ne donne
enfin à l'ancêtre des croyants,
Isaac, l'aïeul des Hébreux. Mais
à côté de ces noms accrochés-là
par le scénariste (ç'aurait pu
en être d'autres !), c'est surtout dans
la mythologie kabbaliste que puisèrent
les scénaristes : les «Hommes de
Pierre» auxquels réfère
le titre français (Maciste et les
hommes de pierre), ces créatures sélénites
ainsi que le rappelle le titre américain
(Hercules against the Moon-Men), ont tout
du golem, la créature minérale
qu'au XVIe s. le rabbin Loew inventa pour protéger
les Juifs du ghetto de Prague; si la créature
d'argile n'était pas sévèrement
surveillée, elle pouvait créer
les pires catastrophes. Le golem n'eut qu'un
succès limité à l'écran
(adaptations du roman de Gustav Meyrinck en
1920 (Carl Boese & Paul Wegener) et 1936
(Julien Duvivier)) et en BD devint «la
Chose» dans le comic's des «Four
Invincibles». Au niveau du péplum
italien, nous ne voyons guère que le
Procuste d'Hercule contre les Vampires ,
cette créature stalagmitique installée
aux portes de l'Hadès, qui distend ou
raccourcit les membres des compagnons d'Hercule
qu'elle a couchés sur un de ses lits.
Et les présents Hommes de Pierre qu'affronte
Maciste. D'aucuns ont vu dans Maciste contre
les Hommes de Pierre une tentative par Giacomo
Gentilomo de renouveler le succès de
son fabuleux Maciste contre le Fantôme
(1961), succès redevable pour beaucoup
au talent d'assistants comme Sergio Corbucci,
Alvaro Mancori, Duccio Tessari et Paolo Moffa.
A l'époque de sa sortie, le film fut
fort mal reçu, on reprocha à Gentilomo
de s'être fait «aider» par
son producteur Luigi Mondello, qui tourna nombre
de scènes, mais Maciste contre les
Hommes de Pierre (Maciste e la Regina di Samar)
devait être redécouvert au début
des années '80 grâce à son
édition en vidéo.
Il y a un intéressant travail sur les
couleurs comme ces rouges et verts «à
la Bava» qui éclairent le colloque
entre Samara et Rodopesh (*)
et, d'une manière générale,
nimbent les abords de la Montagne de la Mort
où, dans un paysage lunaire battu par
des vents furieux, peine la sinistre colonne
des jeunes gens enchaînés promis
au sacrifice et, plus tard, le peuple révolté.
Là s'ouvre le sas du vaisseau spatial
de roche brute, qui laisse percer une lumière
aveuglante. L'intérieur de l'aérolithe
baigne dans une ambiance en noir et blanc. Là,
au pied d'une idole représentant une
femme à tête d'hippopotame, au
sommet de crâne de laquelle palpite un
cerveau non-humain (**),
a été déposé le
sarcophage de plexiglas de la Reine Sélène
qui attend l'enfant royale Billis. Lorsque la
Lune se rapprochera de la Terre, son sang versé
la tirera de son long sommeil. Alors un cataclysme
bouleversera la Terre (images de tempête
marine, en noir et blanc avec filtre vert, et
plans de lave empruntés, comme d'habitude,
à Haroun Tazieff, providence des auteurs
de péplums) et les Hommes de Pierre pourront
enfin assujettir à leur règne
notre planète... |
Les jeunes gens livrés en tribut à
la voracité des habitants de la Montagne de
la Mort,... le combat de Maciste contre un monstre
velu aux incroyables défenses de sanglier dans
le labyrinthe de souterrains sous le palais... On
aura reconnu, d'une manière générale,
la trame de Thésée et le Minotaure,
combinée avec celle de la Belle-au-Bois-Dormant...
un peu vampire. Après Les Vampires de
Freda, Le masque du Démon de Bava et
Le moulin des supplices de Ferroni, le thème
devenait difficile à renouveler; mais l'ambiance
particulièrement glauque de cette nouvelle
mouture nous ménage d'agréables moments.
Voilà un péplum fort classique,
avec ses ingrédients obligés : bagarre
à un contre trente, machine de torture qui
va empaler le héros, philtre censé le
soumettre à la volonté de la cruelle
reine etc., le tout relevé par un zeste de
science-fiction. L'action se place dans une civilisation
imaginaire de facture vaguement gréco-romaine,
Samar (dans Maciste contre le Fantôme, Salmanak
était plutôt arabe). La musique, parfois
tonitruante, de Carlo Franci soutient bien le propos,
avec des passages à l'orgue électrique
qui font penser à Carlo Rustichelli.
(*)
Qui rappellent irrésistiblement le couple
Astra - Kobrak dans Maciste
contre le Fantôme.
(**)
On aura reconnu l'effigie de Touéris, la
déesse égyptienne de la naissance.
|
24.
La vengeance d'Hercule (Vittorio
Cottafavi, 1960. Avec Mark Forest, Broderick
Crawford, Wandisa Guida) / 86' [DVD inédit]
(en kiosque en France : 30 juin 2005)
Hercule est en train d'accomplir le Douzième
et dernier de ses Travaux : maîtriser
Cerbère, le chien à trois têtes
gardien des Enfers. A chalie, tout le
monde le croit mort, à commencer par
le roi Eurytos, son ennemi de toujours. Ce dernier
s'est mis en tête de conquérir
Thèbes, sa rivale, et Hercule
était l'unique obstacle à son
ambition. L'unique ? Non, il reste encore son
fils Hyllos. Or Hyllos est amoureux de Théa,
la fille d'Eurytos. Il devrait lui être
facile de d'attirer le jeune homme dans un traquenard...
Or, contre toute attente, Hercule revient des
Enfers, où il a conquis le rubis mystique
qui est l'il du Dieu-Cyclope de la Vengeance.
Hercule restitue l'il au dieu, dans son
temple. C'est alors que la Sibylle lui prophétise
de nouveaux malheurs. Hercule rentre à
Thèbes, retrouve son ami le roi Androclès,
mais aussi son épouse Déjanire
et son fils Hyllos. Inexplicablement, Hercule
s'oppose aux fiançailles de celui-ci
avec Théa. Sa véhémence
laisse présager un douloureux et honteux
secret...
Vittorio Cottafavi signe ici un des meilleurs
«Hercule», le premier avec Mark
Forest qui vient de débarquer des States,
et le troisième de la saga. Au départ,
le film - dont le titre de travail était
Hercule contre les Dieux - devait être
interprété par Steve Reeves et,
bien avant sa sortie, il fut annoncé
par le distributeur américain A.I.P.
sous le titre Goliath et le Dragon / Goliath
and the Dragon, avec Reeves. Aux States,
le film sortit avec une séquence additionnelle
avec un dragon, et une BO refaite par Les Baxter
(au lieu de celle d'Alexandre Derevitsky) :
cette version américaine est disponible
en DVD Zone 1 chez Something
Weird Video. Le décor des Enfers
et le rubis mystique resserviront l'année
suivante pour Hercule contre les Vampires,
de Mario Bava, avec Reg Park. |
 |
Tout le scénario gravite autour d'une
idée philosophique qu'exprime judicieusement
Tyndare, le conseiller du tyran : «C'est
l'intérêt, et non la destinée,
qui guide l'homme.» Toute la tragédie
grecque est sous-tendue par l'idée que les
dieux, jaloux du bonheur des humains, leur suscitent
les pires maux par pure jalousie (d'où le titre
de travail, cité ci-dessus, justifié
par la malédiction que lui dédie Hercule
: «Je te renie, Zeus, dieu stupide et cruel
! Je te déclare la guerre. Crains le courroux
d'Hercule !»). C'est justement une tragédie
d'Euripide qui fournit la base du film : Héraclès
furieux (420 av. n.E.). Hercule est descendu aux
Enfers, accomplir le Douzième de ses Travaux;
on le croit mort, aussi un usurpateur, Lycos, a pris
le pouvoir à Thèbes après avoir
assassiné le régent Créon, et
s'apprête à immoler Mégarée,
l'épouse du héros, et leurs trois fils.
Revêtus des ornements funèbres, ils se
sont réfugiés auprès d'un autel,
en attendant que Lycos vienne leur trancher la gorge.
C'est alors que réapparaît Hercule. Le
héros tue Lycos, puis - frappé de folie
par Héra, la déesse qui veut sa perte
- massacre sa femme et ses enfants. Le scénariste
complète cet argument au moyen d'un emprunt
à l'histoire des Héraclides : après
avoir tué le roi d'chalie Eurytos, qui
lui avait naguère refusé la main de
sa fille Iole, Hercule enfile la tunique empoisonnée
de Nessus et meurt sur le mont ta. Eurysthée
en profite pour exiler du Péloponnèse
les fils d'Hercule. Au cours de son existence mouvementée,
l'infatigable fututeur en avait engendré près
d'une centaine ! Plus tard, conduits par Hyllos, né
de Déjanire, les Héraclides revinrent
en Argolide, affronter leur cousin. Pour obtenir la
victoire, Hyllos - qui a épousé Iole
- doit immoler sa sur Macaïra. Ensuite
il vainc le tyran Eurysthée aux Roches Scironides,
dans l'Isthme de Corinthe, et lui tranche la tête.
Tels sont les éléments à partir
desquels ont été concoctés les
scénarios de La vengeance d'Hercule (et
d'Hercule contre les Vampires). Ce données
seront, bien entendu, recomposées dans une
action unique. D'abord, le personnage de Lycos est
éliminé (on le retrouvera tyran d'chalie
et tuteur de Déjanire dans Hercule contre
les Vampires); il est remplacé par Eurytos
d'chalie - souvent confondu dans les synopsis
de La vengeance... avec Eurysthée de
Mycènes (sic). Il est vrai que le personnage
incarné par Broderick Crawford procède
un peu des deux. Iole devient Théa, la promise
d'Hyllos : comme Hercule est censé être
un personnage édifiant, respectable, et déjà
marié avec la maman d'Hyllos, on gomme le fait
qu'il ait également été l'amoureux
éconduit d'une jeunesse, Iole, et qu'il a -
le brutal ! - assassiné ses frère et
père pour la posséder. En revanche,
les ennemis d'Hercule suggéreront à
Hyllos que si son père s'oppose à son
mariage avec Iole, c'est parce qu'il la veut pour
lui-même. C'est ce qu'on nomme une litote.
Le film est parcouru des personnages intéressants
comme le polymorphe Nessus, satyre et centaure, gardien
de la cascade - filmée aux chutes des «Mormores»,
près de Terni en Ombrie, à 100 km de
Rome - et ravisseur de Déjanire. Hercule y
vainc successivement un Cerbère en carton pâte
(des effets spéciaux comme ça, on n'en
fait plus : savourez bien, c'est du 45 ans d'âge
!), une chauve-souris géante en peluche puis
un ours de même matière et, enfin, un
éléphant qui s'apprêtait à
écraser la poitrine de son fils; il arrache
des arbres, redresse des toits effondrés, effondre
sa propre maison puis, tel Josué, sape les
murailles d'chalie. Il y a aussi, dans les oubliettes
d'Eurytos, une impressionnante collection de serpents
de toutes tailles et un dieu-cyclope de la vengeance
inconnu de la mythologie grecque, mais prétexte
à un joli mouvement vertical de caméra,
à 180.
Barbu, Mark Forest est un excellent Hercule,
que toutefois il n'incarna que cette seule et unique
fois avant de se spécialiser dans le rôle
du glabre Maciste. Broderick Crawford, une «gueule»
des films de gangster à Hollywood, y interprète
un Eurytos cruel à souhait. Quand à
la pulpeuse et fatale Wandisa Guida, dans le rôle
d'Arsinoé.... Mmmmm !
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23.
Les Horaces et les Curiaces
(Terence Young & Ferdinando Baldi, 1961.
Avec Alan Ladd, Franco Fabrizi, Franca Bettoja,
Jacques Sernas) / 85' [DVD inédit]
(en kiosque en France : 16 juin 2005)
667 av. n.E. Sous le règne de Tullus
Hostillius, quatre-vingt-cinq ans après
sa fondation, l'orgueilleuse cité de
Rome lutte contre Albe, sa rivale, sa métropole
aussi. Lors d'un engagement guerrier, Horace
- qui commande à la VIe légion
- disparaît mystérieusement. En
réalité il a été
blessé et fait prisonnier. Mais déjà
les siens le suspectent de traîtrise ou
de lâcheté. Son frère cadet
Marcus est, à sa place, choisi pour gendre
par le roi qui lui donne sa fille Marcia.
Ayant réussi à s'évader,
Horace affecte d'ignorer les accusations portées
contre lui par ses ingrats compatriotes. Pourtant,
son soutien serait bien utile à la Patrie,
car les dieux ont décidé de mettre
fin à cette guerre qui dure depuis sept
ans, en départageant les deux camps par
un duel à mort opposant les champions
des Albains et ceux des Romains : les trois
frères Curiaces et les trois Horaces.
Les vainqueurs décideront de laquelle
des deux villes aura autorité sur l'autre.
L'épisode tiré de Tite-Live
est fameux : il a inspiré à David
une toile célèbre et sa tragédie
à Corneille. En nos oreilles résonnent
encore la fameuse réplique de Caius Horatius
(le père) à Julie : «Que
vouliez-vous qu'il fît contre trois ?
- Qu'il mourût, Ou qu'un beau désespoir
alors le secourût», réplique
le fier patricien (Act. III, sc. 6). Mais les
potaches, c'est plus probable, se souviendront
plutôt de la contrepèterie, non
moins connue, des «Voraces» et des
«Coriaces» !
Peut-être par fidélité aux
sources, les scénaristes ont élagué
l'imbroglio sentimental imaginé par le
tragédien français : Sabine, l'épouse
d'Horace-aîné est la sur
des Curiaces; et Camille, sur des Horaces
aime un des Curiaces, auquel elle a été
autrefois promise («Rome à
qui vient ton bras d'immoler mon amant»).
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 |
Reste que le film de Terence Young (le réalisateur
des premiers James Bond, qui reviendra au péplum
une douzaine d'années plus tard avec Les
Amazones, tourné en Sardaigne) constitue
un bel exemple d'une règle classique du scénario
cinématographique : d'entrée de jeu
le héros est connoté dans la particularité
qui le caractérise et qu'il portera comme un
fardeau tout au long du film, jusqu'au dénouement
final. Ici, la lâcheté. Dans l'histoire,
Publius Horatius n'est considéré comme
lâche qu'au cours du duel qui le voit, indemne,
fuir devant les trois Curiaces blessés, lesquels
ont tué ses deux frères Marcus et Elius.
Dans le film c'est dès le premier quart d'heure
qu'il est, par erreur, considéré comme
lâche suite au désastre de sa légion.
On notera aussi la litote : dans la tragédie,
Horace tuait de sa propre main sa sur Camille
amoureuse d'un Curiace; dans le film, Horatia, de
chagrin, se suicide en se transperçant avec
l'épée de son frère... On ne
pouvait imaginer le preux cow-boy solitaire Alan Ladd
trucidant sa sur illico au nom d'une
vague question d'honneur familial.
Las, dans les Golden Sixties les Romains -
depuis longtemps, déjà - n'étaient
plus que l'ombre de ce qu'ils avaient été
! |
22.
Le triomphe d'Hercule (Alberto
De Martino, 1965. Avec Dan Vadis, Moira Orfei,
Marilu Tolo, Pierre Cressoy) / 84' [DVD inédit]
(en kiosque en France : 2 juin 2005)
Prince félon de Mycènes, Milo
a assassiné Pandion, le roi de cette
orgueilleuse cité. Afin de conquérir
le trône, il fait combattre Gordius, son
homme de main, dans un tournois dont le vainqueur
épousera Attè, la fille du défunt
roi. Mais c'est sans compter le demi-dieu Hercule,
appelé à la rescousse, qui devra
affronter le pouvoir conféré à
Milo par un poignard magique, lequel, sorti
de son fourreau, fait apparaître sept
colosses de bronze, les Centimains. Or Hercule
- trompé par Milo - a sur les mains le
sang de son innocent demi-frère Eurysthée,
aussi les dieux lui ont-ils retiré sa
force surhumaine....
Alberto De Martino s'est fait connaître
des afficionados par quatre films de
«gladiateurs spartiates» (II
gladiatore invincibile [Anthony Momplet :
De Martino collabore à la mise en scène,
1961]; I sette gladiatori (Les sept
gladiateurs [Pedro Lazaga, prête-nom],
1962); Gli invincibili sette (Les sept invincibles)
(1963); La rivolta dei sette/I sette
contro Sparta (La révolte de Sparte)
(1965)) et deux films mythologiques,
Perseo l'Invincibile (1962) aux remarquables
effets spéciaux de Carlo Rambaldi (King
Kong, 1976; Conan le Destructeur, 19......)
dont c'était alors l'un des premiers
travaux de professionnel et Il trionfo di
Ercole. Cette fantaisie à prétexte
mythologique se permet quelques écarts
avec des données pourtant bien fixées.
Il n'y eut jamais d'amitié entre Hercule
et Eurysthée. Milo est un personnage
imaginaire, et l'étiquette «sorcière
du monde infernal» associée à
sa mère Pasiphaé échappe
à l'entendement grec : la vraie Pasiphaé
était une fille du dieu Soleil et l'épouse
du roi de Crète Minos; manquant à
ses engagements, celui-ci avait refusé
de sacrifier à Zeus un magnifique taureau
blanc - il en fut puni à travers sa femme
Pasiphaé qui se prit d'une passion sexuelle
pour le bel animal et s'accoupla avec lui, dissimulée
dans une génisse de bois fabriquée
par Dédale; de leur étreinte naquit
le Minotaure... le célèbre monstre
du Labyrinthe. |
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Minos... Milo...
et l'imagination du scénariste a fait
le reste. Ce fut un des Travaux d'Hercule que
de dompter le Taureau Blanc - le Taureau de
Crète; quand à Thésée,
on sait qu'il tua le Minotaure...
Les scénaristes ne se font généralement
pas grand scrupule à emprunter à
Samson au profit d'Hercule : celui-ci va donc
momentanément perdre sa force à
cause du meurtre d'un innocent, son demi-frère
(sic) Eurysthée, et très finement
le film fait ici référence au
fait que lorsqu'il assassina son ami Iphitos,
Hercule avait un fois déjà été
privé de sa force surhumaine (en fait,
il avait été vendu comme esclave
à Omphale, reine de Lydie, aux pieds
de laquelle il filait la laine, vêtu d'une
robe de femme). Le tournoi nuptial a dans le
film, malheureusement, des relents de combat
de gladiateur inconcevables dans le contexte
hellénique. Mais Hercule avait bien participé
à un tournois de ce genre - en fait,
un concours de tir à l'arc - pour obtenir
la main d'Iole, fille d'Eurytos roi d'chalie.
Les plus étonnants personnages du film
sont les sept «Centimains» (en grec,
les Hécatonchires). Dans la légende
ils n'étaient que trois : Kottos, Gyès
et Briarée (ou Ægeon). C'étaient
des fils de la Terre à cinquante têtes
et cent mains; selon l'Iliade, Thétis
- la mère d'Achille - les avait sorti
du Tartare où ils étaient retenus
prisonniers, pour qu'ils soutiennent Zeus contre
ses frères et surs (*),
les dieux révoltés contre son
autorité.
(*)
Notamment Héra et Poséidon.
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21.
Carthage en flammes (Carmine
Gallone, 1959. Avec Pierre Brasseur, Anne Heywood)
/ 106' [DVD inédit] (en kiosque en
France : 19 mai 2005)
Les jours de Carthage sont comptés.
Les légions romaines, conduites par Scipion
Emilien, assiègent la ville. Les drames
humains y prennent une nature encore plus tragique,
plus rapide. Hommes et femmes se débattent
entre l'amour et la mort, dominés par
le destin tragique qui pèse sur cette
cité, où l'on offre des sacrifices
monstrueux à Moloch, et où le
gouvernement des marchands, à la fois
sinistre et désarmé, est la proie
d'intrigues incessantes.
Hiram, l'exilé, fauteur de la résistance
à outrance - et rentré clandestinement
après la dernière bataille favorable
à Carthage - aime Ophir, la fille du
chef des marchands... Fulvie, une jeune Romaine
mourra dans l'immense brasier de cette ville,
où elle était venue chercher l'amour
impossible d'Hiram. Phégor, le chef des
gardes de Carthage, périra avec elle
dans ces flammes où elle l'entraînera
dans sa fureur d'avoir été poursuivie
par lui et dans sa folle douleur d'avoir été
repoussée par Hiram.
La Troisième guerre punique s'achève
sur le siège de Carthage (148-146), mené
par les légions de Scipion-Emilien. Le
consul de 147, Scipion-Emilien (P. Cornelius
Scipio Æmilianus Africanus Numantinus),
était le fils de Paul-Emile, le vainqueur
de Pydna, celui qui avait délivré
la Grèce du joug macédonien. Mais
le jeune homme avait été adopté
par le fils aîné de Scipion l'Africain,
le vainqueur d'Hannibal à Zama (203),
demeuré sans héritier. On peut
regretter que, dans le film, le siège
de la métropole punique se résume
à deux affrontements de cavalerie dans
la plaine. Particulièrement cruel et
inexpiable, le siège de Carthage - dont
les derniers défenseurs préférèrent
brûler vifs - nous montre l'empire romain
naissant, déjà au faîte
de sa gloire. Rien ne résiste à
Rome, qui vole de victoires en victoires - bien
que la république latine n'ait pas encore
digéré le concept de l'annexion
territoriale. Vaincre ses ennemis lui suffit.
Le grand historien de cette période est
un ancien général ennemi, le Grec
Polybe rallié corps et âme à
Rome.
|
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Les Romains vont raser la grande
métropole africaine jusqu'à ses fondations,
labourer son sol maudit et y semer du sel pour le
rendre stérile.
Mais moins de deux siècles plus tard, ils la
reconstruiront (en 20), comme ils reconstruiront plus
vite encore Corinthe (en 80), anéantie la même
année...
Le film de Carmine Gallone - on
lui doit aussi le mussolinien Scipion l'Africain,
1937, ainsi que Messaline, 1951, mais aussi
les meilleurs épisodes de Don Camillo - est
tiré du roman d'Emilio Salgari, le «Jules
Verne» italien (*),
lequel ici doit beaucoup à Gustave Flaubert
- il suffit de mettre les textes côte à
côte, la description du sacrifice à Moloch
par exemple !
Moloch ! La cruelle idole ignivome... Peut-être
le plus prodigieux fantasme que nous ait légué
l'Histoire de l'Antiquité ! Imaginez un peuple
assez barbare ou fanatique pour immoler sa progéniture
devant une idole d'airain. Toutefois, ceux qui nous
en ont fait la relation (Diodore, Clitarque, Plutarque)
étaient des Grecs, ennemis naturels des Carthaginois.
Mais curieusement, les historiens romains des Guerres
puniques ne font pas la moindre allusion à
ce type de sacrifices humains; peut-on croire que,
le cas échéant, ils s'en seraient gênés
? Du reste, la dyade tutélaire de la cité
de Didon était Baal-Hammon et Tanit - que les
Romains nommaient Saturne et Junon -, tandis que Moloch
est un emprunt à la Bible, mutatis mutandis,
qui n'était peut-être pas même
le nom d'une divinité, mais un terme technique
recouvrant certains rites de passage.
Bien sûr, Baal-Hammon («Baal-le-Brûlant»)
excite notre imagination. Mais quelle serait l'interprétation
correcte du cimetière d'enfants incinérés
retrouvé en 1921, au lieu-dit «Tophet
Salammbô» ? Référée
aux stèles de N'Gaous, l'exégèse
scientifique invite à considérer que
ce cimetière particulier serait en relation
avec les enfants mort en bas-âge - à
l'époque, c'était fréquent -
ou à l'offrande de victimes animales de substitution
pour ceux qui y avaient réchappé. Tant
pis pour Cabiria (1913) et pour l'Histoire
de Ruth (1960), les classiques ! Et tant pis pour
les aventures d'Alix, dont le père flaubertien,
Jacques Martin, a aimé revenir, et revenir
encore sur cette thématique.
Anne Heywood a accepté non
sans réticence de tourner nue, sauf un string,
mais sous un fin voile noir - mentionné dans
Flaubert - la scène où ses compatriotes
veulent la sacrifier à l'idole crématoire.
Plus tard, Daniel Gélin se souviendra du film
comme d'une inextinguible rigolade avec Pierre Brasseur,
celui-ci totalement à contre-emploi avec sa
voix de basse. Sur le plateau voisin, à Cinecittà,
Fellini tournait La Dolce Vita, tandis que
le pauvre Louis Malle - qui de sa vie jamais ne risqua
de se voir confier le tournage d'un film épique,
sauf peut-être Viva Maria -, qui passait
par là, s'indignait de ce que l'on puisse participer
à de telles c... Comme disait le bon William
Transpire, «Il y a plus de choses sur cette
terre, Othello, que ne puisse en concevoir ta philosophie.»
On notera, dans le rôle du Carthaginois Tsour,
un certain Mario Girotti (qui l'année suivante
incarnera le Romain Quintus, le neveu - tué
à Cannes - du consul Fabius Maximus dans
Hannibal); plus tard il deviendra une vedette majeure
du western italien sous le pseudonyme anglicisé
de «Terence Hill».
(*)
La brochure Fabbri qui accompagne le DVD le compare
à Alexandre Dumas. Jules Verne, Alexandre
Dumas... il y avait un peu des deux chez le père
de Sandokan et autres Corsaire Noir, Rouge ou Vert
!
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20.
L'enlèvement des Sabines (Richard
Pottier, 1961. Avec Roger Moore, Mylène
Demongeot, Jean Marais, Francis Blanche) / 89'
[DVD inédit] (en kiosque en France
: 5 mai 2005)
Ayant fondé Rome avec une poignée
de fidèles, Romulus s'aperçoit
vite que l'absence de femmes est cause de nombreux
inconvénients, dont le principal est
de ne pas assurer une descendance aux fondateurs
de la ville, et un avenir à celle-ci.
Partant à la recherche de leurs futures
femmes, les Romains se heurtent à l'hostilité,
non pas des jeunes filles, séduites par
leur physique avantageux, mais de leurs éventuels
beaux-pères, qui, les sachant pauvres
et n'étant pas sûrs de leur avenir,
renvoient les prétendants d'une manière
plutôt énergique.
Par le biais de l'humour, Francis Blanche
nuance cette histoire de rapt qui fut, en fait,
un viol collectif. Ah les affres du célibat
forcé ! Comment en sortir ? Le très
british Roger Moore nous campe un Romulus qu'il
est jusqu'au bout des ongles, à la scène
comme à la ville, le fun sur le
plateau étant de soustraire ses amours
extra-conjugales à la curiosité
d'une épouse jalouse - comme le rappelle
Mylène Demongeot dans son livre de souvenirs
Tiroirs secrets. Quant à Jean Marais,
habitué des films historiques - plutôt
cape et épée (Le Miracle des
Loups, Le Capitan, Le Bossu etc.) que péplum
(Ponce Pilate) - il joue les utilités,
celle du dieu Mars, le dieu de la guerre, qui
conseille secrètement son fils occupé
à faire sa petite lessive dans sa kitchenette,
à l'insu de ses ragazzi de camarades
romains. Non vraiment, vivre sans femmes n'est
pas une vie ! |

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En fait Romulus était lui-même un
Sabin, petit-fils du roi d'Albe-la-Longue, Procas.
Procas descendait à la onzième génération
d'Iule-Ascagne, le fils du Troyen Enée réfugié
sur les côtes du Latium après la destruction
de sa patrie. Ce roi avait eu lui-même deux
fils, Amulius et Numitor. Au premier il avait donné
ses richesses, ses troupeaux, à l'autre le
pouvoir. Mais un pouvoir sans moyens n'en est pas
un, et bien vite le riche Amulius déposa son
royal mais impécunieux frangin Numitor. Or
Numitor avait une fille, Rhea Silvia, une vestale
à la cuisse légère qui ne sut
dire «non» à un séduisant
militaire, lequel n'était autre que le dieu
Mars en personne. Romulus et son frère jumeau
Rémus furent le fruit de cette idylle. Enfants
de l'amour, qui plus est d'une Vestale - ô honte
-, les deux frères furent exposés sur
les bords du Tibre. Allaités par une louve,
ils furent recueillis par un pauvre berger et élevés
en exil, loin des monts Albains, sur une colline de
ce qui n'était pas encore Rome, le mont Capitolin.
Ce brave berger se nommait Faustulus, et sa femme
Acca Larentia, surnommée elle aussi la «Louve»,
id. est «La Pute» - et l'on viendra
s'étonner de ce que Romulus, dépourvu
de morale comme de principes, maquait les filles de
ses voisins les Sabins !
Les Sabins sont l'un des trois peuples primitifs
qui - avec les Etrusques et les Latins - se fondirent
pour donner naissance au peuple romain. Leur territoire
fut conquis en 290 par M. Curius Dentatus, et les
Sabins reçurent le droit de cité romain
en 268. Situé dans les monts Albains, au N.-E.
de Rome, leur territoire s'étendait jusqu'au
Quirinal, une des Sept Collines. On n'a jamais retrouvé
trace de leur capitale mythique, Albe-la-Longue
(Alba Longa) que les historiens situent néanmoins
du côté de Castel Gandolfo, la résidence
d'été des papes. Plusieurs grandes familles
romaines se vantaient de leur origine sabine, la plus
fameuse et la plus remuante étant celle des
Claudii qui, unie à la postérité
du fils d'Enée, les Iulii donna à
Rome sa première dynastie impériale,
les Julio-Claudiens. Le cognomen d'une de ses
branches était Nero, qui veut dire «fort»
ou «guerrier»; le dernier à l'avoir
porté fut l'empereur Néron. Une des
tribus romaines, les Tatienses, tirait son
origine du roi sabin Titus Tatius, roi de Cures, qui
grâce à la trahison de Tarpeia avait
pu s'introduire dans Rome pour arracher à Romulus
les jeunes filles enlevées.
Au temps du dictateur albain Metius Suffetius et sous
le règne, à Rome, du roi Tullus Hostilius
(en 667), se place l'épisode fameux de la rivalité
des Romains et des Albains : le duel des trois frères
Horaces et des trois frères Curiaces. Il a
été porté à l'écran
par Terence «007» Young, avec Alan Ladd
dans le rôle d'Horace aîné,
Les Horaces et les Curiaces :
le DVD est annoncé au catalogue Fabbri.
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