(Janvier 2004) Obituaire
L'aventurier du nanar perdu PIERRE "CZZ" CHARLES (1952-2003)
Amoureux fou de cinéma-bis (les psy diraient
"monomaniaque", je crois), Pierre est descendu dans l'Hadès et
présentement erre sur les rives d'un Styx hanté de goules
et de vampires, d'empuses, succubes et autres ectoplasmes, mais... le
dantesque décor a été planté par Gustave Doré,
est éclairé par les projos de Mario Bava, et le scénar
est de Cottafavi d'après une idée de Lucio Fulci, alors
tout va bien !
Pendant vingt ans, il nous a enchanté dans nos chaumières avec ses dossiers consacrés au cinéma populaire. Un domaine dans lequel rien ne lui était étranger : thriller, western-spaghetti, péplum, épouvante, science-fiction, érotisme. Un cinéma qualifié de commercial, mais qui était un cinéma d'auteur plus qu'on n'imagine car, hyper-fauché, il était à des années-lumières de certaines contraintes budgétaires des productions méga-friquées (mais il en avait d'autres, ne nous voilons pas la face !). Que de fabuleux dossiers consacrés aux "petits [et grands] maîtres" comme Michele Lupo, Antonio Margheriti, Ruggero Deodato ou Jess Franco ? Ou à des films mythiques comme Le moulin des supplices, Ilsa la Louve des SS ou Vierges pour le bourreau, mais aussi à des personnages comme Django, Godzilla, Maciste ou Errol Flynn... Que de nostalgie aussi quand il consacrait tout un numéro spécial aux salles parisiennes qui de derrière leurs rouges rideaux avaient bercé son adolescence ! Pierre Charles avait également été
l'éditeur du Fulmar, le fanzine de François Ducos.
Il y avait consacré maints dossiers à Jean Ray, mais aussi
à Bob Morane (par Rémy Gallart) et à Robert
E. Howard/Conan le Barbare (par Hervé Delcuse). Foldingue de péplums, Pierre - avec l'aide de divers complices, principalement Gérard Desserre pour les interviewes à Los Angeles, mais aussi Claude Le Du et Carlo Piazza - nous avait offert de somptueux dossiers consacrés à Steve Reeves, Alan Steel, Mark Forest, Ed Fury, Gordon Scott, Reg Lewis, Gordon Mitchell, Chelo Alonso et Gianna Maria Canale (j'en ai moi-même commis un avec Danny De Laet [3], dédié à Jacques Sernas), ces prodigieux interprètes de l'antiquité-bis à l'écran. Non sans superbe Pierre systématiquement dédaignait dans CZZ les grosses machineries hollywoodiennes - pour ne poser ses yeux de Chimène que sur les fines gemmes amoureusement ciselées par les mestieranti de Cinecittà... ou de Barcelone. Qu'il ne m'en veuille pas si néanmoins j'emprunte au dernier des péplums hollywoodiens la chute de cette notice nécrologique. Rendez-vous aux Enfers, vieux Gringo ! "But, not yet..." (4)
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