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[ Les Héros du samedi soir
]
4. Ursus, le Vainqueur du Taureau
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Quand un personnage secondaire vit sa propre
vie
Nos gens de maison, nos domestiques, nos esclaves
qui n'ont d'autre finalité que de nous servir, d'épouser
notre ombre, discrets et empressés... ont des sentiments,
une vie privée peut-être même ? Extraordinaire
! Oyez, bonnes gens, le destin incroyable de l'esclave de
la princesse Lygie aimée du patricien Marcus Vinicius,
ami de l'Empereur Néron.
Les scénaristes de Cinecittà nous la baillent
belle !
4.1. Le
colosse lygien
POMPONIA GRÆCINA : "(...) Et par quel
moyen parviendras-tu à veiller sur elle ?"
URSUS : "Je ne le sais pas; je sais seulement que le
fer se brise entre mes mains comme du bois..."
Henryk SIENKIEWICZ, Quo Vadis
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4.1.1. Sienkiewicz, ou les origines
Ursus était un guerrier lygien, une tribu germanique
de la Pologne antique, probablement gothe. Son roi l'avait attaché
comme garde du corps à la personne de sa fille Callina,
livrée comme otage à Rome. Il était bâti
en colosse. On se souvient de son combat dans l'arène
contre un taureau ou un aurochs furieux sur l'échine
duquel, Dircé chrétienne, était garrottée
la princesse barbare. Dans la version 1951 de Quo Vadis ?,
Mervyn Le Roy, ne prenant aucun risque, s'était contenté
de montrer Lygie attachée à un poteau, offerte
à la corne acérée d'un bovidé furieux
(on se demande pourquoi le taureau eut chargé une "victime"
immobile !). Ursus (Buddy Baer, un spécialiste des rôles
de brute monstrueuse) luttait contre l'animal et lui broyait
la nuque.
Même si cette simple particularité tendra à
s'estomper dans les péplums des Golden Sixties,
Ursus - l'Ursus original de Quo Vadis ? - est, avant
tout, un héros chrétien. Il existe, du reste,
un "saint Ursus" (fête le 30 septembre) qui n'entretient
que peu de rapports avec le personnage sienkiewiczien, puisqu'il
mourut en martyr au début du IVe s. Ce saint Ursus était
un compagnon de [saint] Maurice, commandant de la fameuse
"Légion thébaine" chrétienne appelée
en Gaule pour réprimer une révolte des bagaudes.
Avec leurs camarades - dont Exupère, Candide et Victor
- ils furent, en 286 (ou 303(1),
suppliciés sur ordre de l'empereur Maximien Hercule pour
avoir refusé de sacrifier aux dieux romains (2).
Et la "légion thébaine" fut exterminée
par cohortes entières. Une urne contenant les reliques
d'Ursus est vénérée dans la principale
église de Solothurn (Soleure) en Suisse, au pied du Jura,
où le prénom est resté très populaire
(3).
Riche en puissance d'évocation, le nom d'Ursus ("ours",
en latin) est aussi le nom d'une marque de vodka... hollandaise,
d'une maison d'Edition new-yorkaise ou, en France, d'un réseau
de "gay" bedonnants et à la pilosité généreuse
(4) ! En Pologne,
une usine "Ursus" fondée en 1893, fut d'abord spécialisée
dans le matériel de distillerie, puis dans la fabrication
de moteurs (1907) avant de se lancer dans les tracteurs agricoles.
Une manière de signifier la puissance à la fois
sereine et féroce du grand plantigrade désigné
par ce substantif latin. |
Ursus (La Fureur d'Hercule)
Affiche espagnole |
Buddy Baer incarne Ursus dans
Quo Vadis? (M. Le Roy, 1951) |
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Ursus et l'aurochs, gravure de Minnard
(Quo vadis ?, Paris, Libr. Montgredien,1902)
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4.2. Le cinéma
muet italien
L'une des plus célèbre version de Quo
Vadis ?, restera celle d'Enrico Guazzoni (1912). Vittorio Martinelli
(5), rappelle l'enthousiasme
que le film suscita tant en Europe qu'aux Etats-Unis et en Russie.
"Des publications aussi sérieuses que Motography ou
The Motion Picture World (lui) ont dédié de nombreuses
pages (...), avec force compliments. A Londres, le film a été
présenté à l'Albert Hall, en présence
du roi Georges V et de la reine, qui ont tenu à féliciter
le metteur en scène et les acteurs. Le plus complimenté
fut justement Castellani, auquel sa Majesté s'est adressée
en l'appelant "Ursus" et en lui témoignant toute sa sympathie"
(6). L'année
suivante, dans Cabiria (Giovanni Pastrone, 1913), le personnage
de l'esclave protecteur Maciste s'efforcera de démarquer celui
d'Ursus.
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Deux dessins publicitaires pour Quo Vadis
? (1926) |
4.2.1. Bruto Castellani, le premier Ursus
"Ce personnage d'Ursus allait coller à la peau de Castellani
toute sa vie durant. Sa filmographie nous apprend qu'il a participé
à presque tous les films en costumes de ces années-là,
chaque fois que l'on avait besoin d'un vigoureux croque-mitaine. Il
a joué dans Marcantonio e Cleopatra (1913), dans
Caius Julius Cæsar (1914), dans Fabiola (1918) où
il tenait le rôle de Vercingétorix, et dans La sacra
Bibbia (1920) où il était Caïn. Il a participé
au Néron (1922) que les Américains ont tourné
à Rome. Le metteur en scène, Edwards, se souvenant de
Quo Vadis ?, a fait appel à lui. Dans ce film il interprétait
l'imposant Antée. Il a également joué Tigrane
dans Messalina (1923), Golthar dans Ben Hur (1925),
autre grand succès américain made in Italy, Eumolpo
dans Gli ultimi giorni di Pompei (1926). Quand Gabriellino
D'Annunzio et Georg Jacoby ont décidé de refaire
Quo Vadis ? (1924), ils n'ont pas pu s'empêcher de lui confier
à nouveau le rôle d'Ursus, le sauveur de Lycia attachée
au taureau. Castellani avait alors quarante ans passés et son
physique s'était considérablement alourdi, c'est pourquoi
la scène de la lutte contre le taureau a été
entièrement jouée par une doublure. Hélas, dans
les plans rapprochés, cela ne passait pas inaperçu,
même pour un profane en la matière. Castellani a abandonné
le cinéma en 1928 parce qu'il était atteint de diabète,
et il est mort à l'âge de 52 ans, en 1933. Parmi tous
les films qu'il a tournés, il ne faut pas négliger la
modeste production de la Palatino Films, surprenante et peu connue,
dont la mise en scène avait été confiée
à Giorgio Mannini, Il mio antropofago (1921). Ce film
racontait l'histoire d'une enfant, Mimi, la seule rescapée
d'un naufrage, qui débarquait sur une île dont l'unique
habitant était un anthropophage (Castellani). Après
maints efforts, la fillette parvenait à éduquer son
Vendredi et à en faire un parfait homme du monde. Quand quelques
années plus tard, un bateau les retrouvait et les rapatriait,
il portait fort bien le smoking et savait se débrouiller même
dans ce qu'on pourrait appeler le "monde civilisé".
Mme Pretoriani était à l'époque une enfant
prodige qui avait tourné dans une quarantaine de films aux
côtés, ou plutôt dans les bras, des acteurs les
plus célèbres, sous le nom de Mimi, justement. Elle
m'a raconté que quand elle a tourné ce film, à
quatorze ans, elle s'était beaucoup amusée avec Castellani.
Celui-ci était une véritable force de la nature, tout
aussi ingénu dans la vie que dans le film, extrêmement
timide, justement à cause de sa force surhumaine." (7)
En 1960, après avoir créé Emiliano
(1959) et, dans le sillage d'Hercule, "ressuscité" le bon vieux
Maciste (Le Géant de la Vallée des Rois), Carlo
Campogalliani - sur une idée de Giuseppe Mangione, qui en écrira
le scénario avec Sergio Sollima (8)
- lance sur le marché du "muscle-opera" un nouveau "label"
commercial : Ursus.
4.3.1. La fureur d'Hercule
En passant les Alpes, Ursus est rebaptisé par le
distributeur français La fureur d'Hercule. La VF s'en
justifie (voix off, générique) en affirmant qu'Ursus,
"le héros de Bakou et de l'Euphrate" (sic), était
d'une force si exceptionnelle qu'on le croyait une réincarnation
d'Hercule. Comme dans Quo Vadis ?, il s'agit pour Ursus de
retrouver une jeune fille enlevée, sa fiancée Attea
(c'est-à-dire, en français : Acté, comme l'esclave
chrétienne de Néron). Après une série
de péripéties, Ursus retrouve Attea, qui est devenue
la grande prêtresse de la déesse Zaas (?). Celle-ci condamne
à mort Doréide, une jeune aveugle qu'Ursus a pris sous
sa protection (ici le scénariste emprunte à Glaucus
et Nydia, la bouquetière aveugle des Derniers jours de Pompéi),
ainsi qu'une autre jeune fille nommée Phyllis. Dans l'arène
où elles sont jetées vêtues d'un péplos
rouge, Ursus - en passe de subir la sagittation - devra lutter une
nouvelle fois contre le taureau, ce qui nous vaudra une séquence
assez spectaculaire et réussie... Le cadre pseudo-antique,
mélange un Orient indéterminé à des éléments
classiques (colonnades, etc.).
Le producteur d'Ursus, Giuseppe
Fatigati (Cine Italia) gardera l'exclusivité du personnage
pour les quatre premiers titres de la série : La fureur
d'Hercule, Maciste dans la Vallée des lions, Ursus dans
la Terre de Feu (tous les trois avec Ed Fury) et Ursus
l'Invincible - mais le "label" ne tardera pas à être
accaparé par d'autres producteurs.
Déjà dans La fureur..., le
héros affirmait son caractère hybride en manquant
de subir le supplice de saint Sébastien, ou en tournant
la meule comme Samson prisonnier des Philistins (9).
4.3.2. Ursus dans la vallée
des Lions
Egalement écrit par Giuseppe Mangione mais avec la
collaboration de Sandro Continenza (10),
le second "Ursus", Ursus nella Valle dei Leoni, tourné
l'année suivante, est également interprété
par le confortable et débonnaire Ed Fury (11).
Ce film n'a pas plus de chance que le premier. Il se voit en
effet rebaptisé en France et en Belgique : Maciste
dans la Vallée des Lions, peut-être en mémoire
d'un certain Maciste muet (Maciste nella gabbia dei leoni,
1925) ou, plus probablement, parce que la série des "Maciste"
marche bien.
Voici donc que nous sont contées les origines d'Ursus.
Dans un royaume imaginaire, un usurpateur a pris le pouvoir
et le petit Ursus, fils du roi Annurius et de la reine Léda,
a été caché dans la Vallée des Lions.
Ce sont les fauves qui feront son éducation. Vingt ans
plus tard il quittera sa vallée, ingénu et puceau,
pour revendiquer son royaume tombé aux mains du cruel
Ajak (Alberto Lupo). On retrouve ici une structure mythique
fort classique, celle du prince élevé par les
bêtes : Jason par les Centaures, Télèphe
par une biche, Romulus et Rémus par la louve ou Tarzan
par les grands singes. En fait, cette "enfance" d'Ursus est
décalquée sur celle d'Arminio dans La Couronne
de Fer (A. Blasetti, 1940), lui aussi élevé
dans une Vallée des Lions pour échapper à
la vindicte d'un usurpateur. |
Ursus, Tal des Lowen
("Ursus dans la Vallée des Lions")
En France et en Belgique :
Maciste dans la Vallée des Lions
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4.3.3. Ursus l'Invincible
Dans le semi-parodique Ursus l'Invincible, Ursus est donné
pour fils de Zeus, mais l'action se déroule dans une civilisation
de type arabe, aussi ses interlocuteurs enturbannés jurent-ils
par le Prophète (!). Un tyran se fait passer pour Ursus dont
il a usurpé l'identité et se prévaut des divines
origines. Cet usurpateur, incarné par Mimmo Palmara, porte
cependant un nom grec blasphématoire : Théomaque (=
Celui-qui-combat-les-dieux) ! Les deux "Ursus" s'affrontent dans un
duel truqué, censé les départager. Mais un poison
dissimulé dans son casque rendra notre héros provisoirement
aveugle et incapable de lutter. Plus tard, ayant recouvré la
vue et avec elle sa force, il vaincra l'usurpateur. Une fois encore,
donc, Ursus emprunte à l'incontournable Samson.
Les Romains aimaient à
transposer dans l'arène les passages les plus bestiaux
de la mythologie, manière divertissante de mettre à
mort les condamné(e)s. Les mythes abondaient en épisodes
reliant la femme au taureau, comme les pratiques zoophiles
de Pasiphaé ou d'Europe, ou la mise en pièces
d'héroïnes telles Dircé ou les jeunes filles
envoyées au Minotaure. Ici, une émule de Blandine
et de Lygie va être écartelée entre quatre
buffles... Douceur étonnée et résignée
de la jeune chrétienne, qui précède l'intolérable
arrachement. Un regard qui semble interroger : "Pourquoi me
faites-vous cela ?"
(Couverture du livre de Daniel P. Mannix, Those about to Die)
|
4.3.4. Le grand défi
Dans Le grand défi, déjà
cité, Hercule et Samson se disputaient les faveurs de la
princesse de Lydie. Ravalé au rang de simple comparse, Ursus
n'est qu'un personnage violent envoyé contre Hercule par Samson,
momentanément impuissant, ses cheveux ayant été...
une nouvelle fois coupés par Dalila (ces femmes, tout de même
!).
Le plus souvent, Ursus
évolue dans une civilisation indéterminée
(La fureur d'Hercule, Maciste dans la vallée des Lions,
Ursus dans la Terre de Feu), "gréco-arabe" (Ursus
l'Invincible) ou barbare (La terreur de Kirghizes).
Ursus est un gladiateur marcoman à Rome, sous Commode,
dans Ursus le Rebelle; un paysan lycien qui arbitrera
un conflit entre Lyciens et Cariens, dans La vengeance d'Ursus;
mais aussi un héros polonais du XVIIe s., luttant contre
l'envahiseur asiatique dans La Fille des Tartares.
En quelque sorte, dans ce dernier film, Ursus
renoue avec ses origines "sienkiewicziennes". Le roman d'Henryk
Sienkiewicz ne dissimulait-il pas, sous la fable antique, les
aspirations nationalistes des catholiques uniates polonais persécutés
par le Tsar Alexandre (id. est César Néron),
qui voulait leur imposer l'orthodoxie ? Les nationalistes polonais
exilés à Rome se réunissaient dans la fameuse
chapelle de Santa-Maria-delle-Piante de la Porte Capène
(12), où
le Christ était apparu à Pierre, qui lui demanda
: "Quo vadis, Domine ?"
D'une certaine manière, donc, La Fille des Tartares
(les Tartares étant ici mis pour les Russes) peut prolonger
le roman néronien de Sienkiewicz dans ces événements
du XVIIe s., du reste évoqués par Sienkiewicz
lui-même dans un autre roman, Par le fer et par le
feu.
Notons l'influence des Chevaliers Teutoniques
d'Alexander Ford (Pologne, 1960) et de Taras Boulba de
J. Lee Thompson (EU, 1962) sur le paysage du péplum italien,
dont un pan entier va s'orienter vers la problématique
des marches orientales de l'Europe face à la menace asiatique.
Toutes époques confondues Cinecittà en génère
de nombreuses séquelles, notamment telle autre adaptation
de Sienkiewicz, Par le fer et par le feu (Col ferro
e col fuoco, F. Cerchio, 1961), mais aussi un Soliman
le Magnifique (Vatroslav Mimiza et Mario Tota, 1961), défrayant
au passage la filmographie de Maciste (Maciste contre les
Mongols; Dans l'Enfer de Genghis Khan, etc.). Qu'on se souvienne
: en août 1961, un Rideau de Fer s'était abattu
sur Berlin et, en octobre de l'année suivante, Khrouchtchev
braquait ses missiles sur les Etats-Unis à partir de
Cuba. Qu'ils épousent le point de vue polonais, ukrainien
ou viennois les films de cette catégorie sous-entendent
une agression venue de l'Orient. Tartares, Mongols ou Turcs
- ces cousins des Huns - prennent alors le relais des Barbares
acharnés contre l'Empire romain (13),
le plus souvent sans même changer de costume ! |
La Fille des Tartares
(Ursus e la Ragazza tartari)
Dans la Pologne du XIIe s., Ursus renoue avec ses origines
littéraires
|
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4.4.1. La terreur des Kirghizes
Dans le péplum italien, il y a l'ordre et le désordre.
La Civilisation (Rome, l'Occident catholique) et les Barbares - ou
les Musulmans. Mais qu'ils soient Gaulois, Germains, Lombards, Gépides,
Huns, Vikings ou Tartares, c'est à peu de choses près
la même masse d'habillement - les mêmes costumes, les
mêmes fourrures, les mêmes casques cornus ou pointus -
qui ressert d'un film à l'autre. Les Barbares sont doublement
anachroniques : dans leur conflit avec la civilisation européenne,
dans leur continuité intemporelle. A l'occasion, il peut y
avoir une gradation entre "Barbares". Ainsi dans Ursus, la Terreur
des Kirghizes les Circassiens (Tcherkesses), qui sont des Caucasiens,
seront plus favorablement connotés que les Kirghizes, lesquels
sont des Turco-Mongols.
(Rappelez-vous, dans Lawrence d'Arabie, l'officier turc homosexuel
de Deraa, torturant Lawrence/Peter O'Toole, qu'il prend pour un Circassien,
à cause de ses yeux bleus et sa peau blanche.)
Séquelle d'Ivan le Conquérant (Primo
Zeglio - IT, 1961), où il incarnait Ivan, un chef circassien
défiguré, Ed Fury dans La terreur des Kirghizes
est Ursus (Turso, dans la VF), un autre chef circassien luttant pour
préserver son peuple de la domination des Kirghizes. Ce nouvel
avatar d'Ursus s'orne toutefois d'un nud supplémentaire
emprunté à un classique de la littérature fantastique,
le Dr Jekyll et Mr Hyde ! L'espèce de lycanthrope qui, la nuit,
ravage la région, et qu'Ursus combat - n'est autre qu'Ursus
lui-même, victime d'un sortilège.
Dans le roman de Sienkiewicz, Ursus affrontait un aurochs
à mains nues. Devenu un personnage indépendant, il tend
à se confondre avec les autres gros bras, principalement Samson
(il tourne la meule, il perd momentanément sa force), ou à
Maciste (il n'est qu'un homme du peuple, paisible laboureur dans La
Vengeance d'Ursus) quand il n'est pas un gladiateur justicier
opposé à l'empereur Commode (Ursus le Rebelle).
En 1970, dans Le secret de la Planète des
Singes (Beneath the Planet of the Apes), Ted Post faisait
d'Ursus (14) le
général des gorilles - le clan militariste, une composante
de la société simienne à côté des
orangs-outans organisateurs et des chimpanzés intellectuels.
Les gorilles menaient la guerre à outrance contre les derniers
humains dégénérés, adorateurs de la bombe
atomique. Cette guerre des gorilles provoquera l'anéantissement
définitif de notre planète, quelque part dans notre
futur...
On crut, au début des années '80, à
un retour du péplum. Plusieurs séries TV (Anno Domini,
Masada,
Les Derniers Jours de Pompéi...), les séquelles
érotiques de Caligula...
le succès de l'heroic fantasy qui avaient vu mettre
en chantier deux "Hercule" avec Lou Ferrigno... La version TV 1982
de Quo Vadis ? mise en boîte par Franco Rossi, avec un
certain Radomir Kovacevic dans le rôle d'Ursus, amena les dirigeants
de la Gaumont-Italie à vouloir ressusciter Ursus comme personnage
indépendant. Un film, Ursus, doublé d'une série-TV,
I Gladiatori, fut confié aux bons soins de Pasquale
Squitieri. Le tournage commença aux Safa Palatino Studios,
récemment acquis par le producteur, mais la faillite de ce
dernier (15) mit
un point final au projet. Quelques plans tournés figurent dans
un montage consacré au péplum par la deuxième
chaîne allemande, "Mit Muskeln und Sandalen" (16).
Une ultime curiosité sera présentée
au Festival de Cannes en 1993 : Hercules Returns, de l'Australien
David Parker. Il s'agit d'une version détournée du film
de G. Capitani Le Grand Défi, racontant les tribulations
d'une bande de joyeux cinéphiles australiens voulant créer
leur propre salle de cinéma et se heurtant au monopole du distributeur
en place. Lors de l'inauguration, celui-ci s'arrange pour que leur
soit fournie une copie V.O. italienne de Hercule, Samson, Maciste
and Ursus Are Invincible improjetable pour un public anglo-saxon.
Coupant la bande "dialogue", le directeur McBain, le projectionniste
Sprocket et l'attachée de presse Lisa vont alors improviser
une "traduction simultanée"... parodique. Ils remporteront
un succès considérable auprès du public.
Ainsi Hercule devient un chanteur frustré, envoyé par
Zeus pour se produire dans un night club, le "Pink Parthenon",
où il tombe amoureux de la jolie Labia, fille de la propriétaire
Omphale, à qui il demande la main.
Labia, cependant, préfère le jeune et beau Testiculi
(17) et éconduit
Hercule. Celui-ci fait alliance avec trois gros bras : Ursus, un videur
écossais ivrogne, l'homosexuel Machismo [Maciste] et
Samson qui est devenu une mauviette depuis que Dalila lui a coupé
les cheveux. Au cours d'une spectaculaire bagarre au Club, les décors
de carton-pâte seront mis à mal !
Le mythe avait-il vécu ? L'ennemi du paganisme
néronien, Ursus, semble avoir viré à 180°...
De garde du corps fidèle dans Quo Vadis ?, qui se repent
chrétiennement d'avoir occis le gladiateur Croton, le voici
général gorille et borné, l'ennemi fanatique
de nos pauvres débris d'Humanité sur la "Planète
des Singes"... sinon videur dans un bar de la banlieue de Melbourne.
Inscrit en négatif, le parallélisme laisse songeur...
Lygie crucifiée sur l'échine
de l'aurochs
dans Quo Vadis ? (J. Kawalerowicz, 2001) |
[Ursus, de Giulio Antamoro (1917),
interprété par Lorenzo Soderni, n'est pas un péplum.]
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- Quo Vadis ?
(prod. Cines - IT, 1906) (?)
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- Bruto Castellani
Quo Vadis ?
(Enrico GUAZZONI - IT, 1912)
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- Bruto Castellani
Kri Kri e il "Quo Vadis ?"
(IT, 1912)
prod. Cines (Rome)
|
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- Bruto Castellani
Quo Vadis ?
(Gabriellino D'ANNUNZIO & Georg JACOBY - 1924)
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- Buddy Baer
Quo Vadis ?
(Mervyn LE ROY - EU, 1951)
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- Ed Fury
Ursus
La fureur d'Hercule
(Ursus [CR])
(Ursus, la fureur d'Hercule [vd])
[Ursus]
Mighty Ursus [GB] [EU]
Ursus [SP]
Ursus, de Wreder der Slaven [NL]
(Carlo CAMPOGALLIANI - IT, 1960)
prod. Cine Italia - Atenea Films (Madrid)
|
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- Ed Fury (Glaucus)
Ursus im Reich der Amazonen
La Reine des Amazones
[La regina delle Amazzoni]
Colossus and the Amazon Queen [EU-tv]
Ursus im Reich der Amazonen [AL]/Ursus und das süsse
Leben [AL]
(Vittorio SALA - IT, 1960)
(Ed Fury incarne un héros grec nommé Glaucus
!)
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|
- Ed Fury
Ursus nella valle dei leoni
[Maciste dans la vallée des lions]
Ursus in the Valley of Lions [GB]
Ursus im Tal der Lowen [AL]
Ursus de Leeuwenkoning [NL]
(Carlo-Ludovico BRAGAGLIA - IT, 1961)
prod. Cine Italia
|
|
- Samson Burke
La vengeance d'Ursus
[La vendetta di Ursus]
Revenge of Ursus [EU] [EU-tv]
Mighty Warrior (The) [GB]
(Luigi CAPUANO - IT, 1961)
prod. Splendor
|
|
- Joe Robinson
La fille des Tartares
(Amour païen [CR])
[Ursus e la ragazza dei Tartari]
Tartar Invasion [EU]
Höllenschlacht der Tataren [AL]
(Remiggio DEL GROSSO - FR-IT, 1961)
prod. Explorer Films (Rome) & C.F.F.P. (Paris)
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|
- Dan Vadis
Ursus le Rebelle
[Ursus, (il) gladiatore ribelle/Gladiatore ribelle
(Il)]
Rebel Gladiator (The) [EU]
Kampf der Giganten [AL]
(Domenico PAOLELLA - IT, 1962)
prod. Splendor
|
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- Ed Fury
Ursus dans la Terre de Feu
(Maciste dans la Vallée des Dieux (19)
[vd])
[Ursus nella Terrà di Fuoco]
Son of Hercules in the Land of Fire [EU-tv]
Ursus in the Land of Fire [GB]
(Giorgio SIMONELLI - IT, 1963)
prod. Cine Italia
|
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- Alan Steel
Ursus l'Invincible
(Chute de l'Usurpateur (La) [vd])
[Gli invincibili tre]
Ursus and the Three Avengers [EU]
Three Avengers (The) [GB]
(Gianfranco PAROLINI - IT-Tunisie, 1964)
prod. Cine Italia
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|
- Yann Larvor
Le Grand Défi : Hercule, Samson, Maciste et Ursus
[Ercole, Sansone, Maciste e Ursus, gli invincibili]
War of the Giants/Hercules, Maciste, Samson and Ursus vs.
the Universe [EU]
Samson and the Mighty Challenge [GB]
Stunder der harten Männer (Die) [AL]
Combate de gigantes [SP]/Furia des Gladiadores [SP]
Hercule, Samson, Maciste and Ursus Are Invincible [Australie]
(Giorgio CAPITANI - IT, 1964)
prod. Senior Cinematografica (Rome) - Films Régent
(Paris) - Exibidores (Madrid)
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- Reg Park
La terreur des Kirghizes
(Ursus la Terreur (s/t : Ursus en révolte) [vd])
[Ursus, la terrore dei Kirghizi/Terroro dei Kirghiz (Il)]
Hercules Prisoner of Evil [EU]
Terror of the Kirghiz [GB]
Herqal
wa l-shayâin [Egypte (20)]
(Anthony DAWSON [= Antonio MARGHERITI] - IT, 1965)
prod. Ambrosio Cinematografica (Rome) & Royale Sodifil
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- Reg Park
La vie érotique d'Ursus
(Ettore ANROSI - FR-IT, 1970)
(Il s'agit un remontage du film d'A. Dawson, entrelardé
d'inserts érotiques.)
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- Radomir Kovacevic
Quo Vadis ?
(Franco ROSSI - IT, 1982 - série TV)
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- Radomir Kovacevic
Ursus [cin.]/Gladiators [tv]
[I Gladiatori]
(Pasquale SQUITIERI - IT, 1983 - Film et série TV)
prod. Gaumont-Italie
(Inachevé.)
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- Yann Larvor
Hercules Returns
(David PARKER - Australie, 1993)
prod. Roadshow (Melbourne) (présenté par Philm
Productions)
(Il s'agit d'une version détournée du film de
G. Capitani Le Grand Défi.)
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- Rafal Kubacki
Quo Vadis ?
(Jerzy KAWALEROWICZ - Pologne, 2001 - film et série
TV)
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Rafal Kubacki incarne Utsus dans Quo Vadis
?
(J. Kawalerowicz, 2001)
|
NOTES :
(1) Une autre tradition
veut que Victor ait été décapité
à Marseille, en 290. Une autre encore situe sa mort à
Xanten, dans les bouches du Rhin, où une cathédrale
lui est d'ailleurs consacrée. - Retour
texte
(2) Raconté par
SAINT EUCHER [évêque de Lyon circa 434],
dans son Histoire de saint Maurice et des martyrs de la légion
thébaine (Acta SS, Sept. VIII, 461) - Retour
texte
(3) Ainsi le peintre
Urs Graf (1485-1527). - Retour texte
(4) "Ursus France" a
été rebaptisée "Aminours" - Retour
texte
(5) Vittorio MARTINELLI,
"Laissez-nous faire, nous sommes forts", in Aldo BERNARDINI
& Jean A. GILI, Le cinéma italien (1905-1945)
- De "La prise de Rome" à "Rome ville ouverte", Centre
Georges Pompidou, coll. Cinéma/Pluriel, 1986 (280 p.),
p. 86.
(Traduction de "Lasciate fare a noi, siamo forti", dans Alberto
FARASSINO & Tatti SANGUINETI, Gli uomini forti, Milan,
Mazzota, 1983.) - Retour texte
(6) MARTINELLI, Ibidem.
- Retour texte
(7) MARTINELLI, Ibidem.
- Retour texte
(8) Sollima se fera un
renom comme l'un des maîtres du western italien, avec
des films comme Colorado/The Big Gundown (avec Lee Van
Cleef). - Retour texte
(9) A propos du tournage
de la meule, cf. infra, "Samson", 5.3.1. - Retour
texte
(10) Coscénariste
d'Hercule à la conquête de l'Atlantide,
d'Hercule contre les vampires et du Défi des
géants. - Retour texte
(11) Ed Fury (Edmund
Holovchik, 1934), Mr. Universe 1957, fut le principal interprète
d'Ursus dans les '60. On se reportera au superbe dossier "Ed
Fury" - dont une interview réalisée par Gérard
DESSÈRE -, publié par Pierre CHARLES, Ciné-Zine-Zone,
n° 51-52, s.d. (2e trim. 1991), 106 p.(voyez aussi ce courrier
de septembre 2003). Pour les amateurs de musique de film,
signalons la compilation CD CIAK Ursus/Ursus nella Valle
dei Leoni/Ursus nella Terra di Fuoco (qui contient aussi
des extraits de "Gli Invincibili Tre"), réf. CD-CIA 5090,
P. 1991. - Retour texte
(12) Exhumée
via Appia par les archéologues du début
du XIXe s. - Retour texte
(13) Dans le même
ordre d'idées, les "films cosaques" comme ceux qui célèbrent
les exploits d'Agi Mourad, montrent la résistance des
tribus caucasiennes contre l'impérialisme russe. Même
s'ils semblent soutenir la thèse opposée (ici,
ce sont les "barbares" qui ont le beau rôle), le discours
anticommuniste reste convergent. - Retour
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(14) Incarné
par James Gregory. - Retour texte
(15) Les salles de la
Gaumont-Italie seront rachetées par la Cannon. - Retour
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(16) ZDF, jeudi 3 mai
1984. - Retour texte
(17) Inor, dans la version
de 1964, interprété par Luciano Marin. - Retour
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(18) Selon une déclaration
de Riccardo Freda, un certain Tancredi aurait été
le premier "Ursus" dans Quo Vadis ? (1906, 1910 ?); Freda,
dans les années '50-'60 lui confiera encore des petits
rôles. - Retour texte
(19) Ce titre a, semble-t-il,
également été utilisé pour Deux
Corniauds contre Hercule. - Retour
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(20) "Hercule et le
Diable." - Retour texte
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