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Rome
[TV : HBO - BBC]
(Michael Apted, Allen Coulter, Julian Farino, etc. -
EU-GB, 2005)
(page 9/18)
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APPENDICES : CLODIA
& CLODIUS
Il y a un grand absent dans Rome (HBO) : P.
Clodius Pulcher, le fameux chef de bande populiste. A vrai
dire, il aurait difficilement pu y apparaître puisqu'il
se fit tuer en janvier 52 par la bande rivale de T. Annius Milo,
alors que la minisérie débute huit mois plus tard,
à l'automne de la même année, au moment de
la reddition d'Alésia. Toutefois, le personnage étant
emblématique de son époque, sa personnalité
transsude dans la minisérie directement à travers
l'homme de main de César, Erastes
Fulmen (et, dans la Deuxième Saison, son successeur,
L. Vorenus, le «Fils d'Hadès»). Personnage
de fiction, Fulmen est un Clodius au petit pied, mais résume
admirablement cette période troublée. Indirectement,
il se reflète encore à travers sa sur Clodia
qui servit de modèle aux scénaristes pour Atia.
Honneur aux dames, commençons par Clodia.
CLODIA
(Claudia Quarta Pulchra)
(née ca 94)
Clodia était l'épouse du consul de 60, Q. Cæcilius
Metellus Celer, son cousin, qu'elle trompa avec M. Cælius
Rufus, autre agitateur césarien comme son frère,
mais de bien moins grande envergure.
Quintillien rapporte une rumeur insistante selon laquelle elle
empoisonna en avril 59 son consul de mari (1).
Clodia nous est surtout connue par le Pro Cælio
de Cicéron, qui plaida la cause de Cælius (2),
accusé d'avoir assassiné un créancier. Plus
tard, en 48, César ayant pris Rome par le pronunciamiento
que l'on sait et mis en place ses créatures, le dictateur
qui ne le tenait pas en très haute estime ne le récompensa
pas à sa «juste valeur». Alors Cælius
tenta de fomenter de nouveaux troubles et finit par être
mis à mort par des soldats qu'il avait tenté de
débaucher (cette conspiration de Cælius est au
centre du roman de Steven Saylor, La
dernière prophétie, une enquête
de Gordien le Limier).
A l'origine, elle portait semble-t-il le nom
de Claudia Quarta, étant la quatrième des cinq filles
d'Appius Claudius (les deux premières moururent en bas
âge). Très proche de son frère Publius, elle
le suivit dans sa fantaisie de modifier son nomen aristocratique
de Claudius pour une orthographe populaire, «Clodius».
Intelligente, cultivée, c'était une femme libre
qui aimait s'entourer d'artistes, de libertins et... d'amoureux
transis. Selon Plutarque, elle «était surnommée
Quadrantaria, parce qu'un de ses amants avait mis dans une
bourse des pièces de bronze et les lui avait envoyées
au lieu d'argent (quadrans est le nom que donnent les Romains
à la plus petite des pièces de monnaie de bronze).
C'était surtout à propos de cette dernière
sur que de mauvais bruits couraient sur Clodius»
(PLUT., Cicéron, 28).
Sa façon de vivre avait de quoi choquer
le Romain le moins traditionaliste. C'était «une
veuve qui a ouvert sa maison aux désirs de tout le monde
et est ouvertement installée dans la vie de femme entretenue,
qui assiste délibérément à des dîners
avec des hommes dont elle n'est pas le moins du monde parente,
le fait à Rome, dans ses jardins, ou au milieu de la bonne
société de Baies, qui se comporte non seulement
par sa démarche mais par sa toilette et son entourage,
non seulement par le feu de ses regards, non seulement par la
liberté de ses propos, mais aussi par ses étreintes,
ses baisers, ses baignades, ses promenades en barque, ses soupers
de telle sorte qu'on la prenne, je ne dis pas seulement pour une
femme galante, mais une femme galante provocante et affriolante...»
(CIC., Pro Cælio, 49). On le voit, Cicéron,
qui avait des rapports conflictuels avec le frère de celle-ci,
Clodius, ne la portait pas dans son cur : «En ce
qui me concerne, je la déteste : elle est à histoires,
elle est en guerre avec son mari» (CIC., Ad Atticum,
II, 1). Il avait circonscrit la légèreté
de ses murs dans cette formule blessante : «Amica
omnium potius quam cuiusdam inimica» («Amie de tous
les hommes plutôt que ennemie d'un seul») (CIC,
Pro Cælio, 32).
Selon Plutarque, cette animosité de
Cicéron venait en fait de la jalousie de son épouse.
«Terentia détestait Clodius parce qu'elle s'imaginait
que sa sur Clodia voulait épouser Cicéron
et machinait ce mariage par l'entremise d'un certain Tullus de
Tarente, un intime de Cicéron. Comme ce Tullus fréquentait
assidûment chez Clodia, qui habitait dans son voisinage
et qu'il était empressé auprès d'elle, il
éveilla les soupçons de Terentia» (PLUT.,
Cicéron, 28).
Catulle et Lesbia
Aux alentours de 58, un certain M. Cælius Rufus, ami de
Cicéron, avait succédé à Catulle dans
l'affection de Clodia.
L'aimable poète Catulle, pauvre petit provincial à
la santé fragile, fit de ses amours la grande affaire de
sa jeunesse. Que fut-il exactement pour cette fille des Claudii,
célèbres pour leur arrogance parmi les plus arrogants
des patriciens romains, sinon un simple caprice, un amant d'une
nuit ou d'un mois, d'une circonstance ou d'une autre ? Sans doute
se décrit-il inconsciemment lui-même quand il évoque
le moineau de Lesbia : «Car il était tout miel
et connaissait sa maîtresse aussi bien qu'une enfant connaît
sa mère; il ne s'écartait pas de son giron mais
sautillant tantôt par-ci tantôt par-là, il
pépiait sans cesse pour sa dame et pour elle seule.»
On comprend que, délaissé plutôt
que trompé, le pauvre Catulle ait parfois poussé
son chagrin et sa rancur jusqu'à l'hyperbole :
«Cælius, ma Lesbia, notre Lesbia, cette Lesbia,
La Lesbia, celle que Catulle, et elle seule,
Celle que plus que lui-même, plus que les siens, celle
qu'il a aimée plus que tous,
Aujourd'hui dans les carrefours et les culs-de-sac,
Elle écorce les descendants de Remus le magnanime !»
(CATULLE, LVIII, ad Marcum Cælium Rufum).
Dans sa maison du Palatin, que les archéologues
ont identifié avec la «Maison des Griffons»,
elle entretenait autour d'elle un cercle d'amoureux transis, dont
notre poète Catulle qui la célébra sous le
pseudonyme de «Lesbia».
Erigée en génie du crime,
Clodia a fait les délices du «polar-peplum»,
notamment Steven Saylor : 4. Un
Egyptien dans la ville (The Venus Throw, 1993),
en -56, Marcus Cælius est accusé du meurtre de Dion
d'Alexandrie, en ambassade à Rome... quel rôle joue
la sulfureuse Clodia et le poète Catulle (d'après
le Pro Cælio de Cicéron); 5. Meurtre
sur la voie Appia (A Murder on the Appian Way,
1996), en -52, l'assassinat du démagogue Clodius, frère
de la précitée Clodia, et époux du «dragon»
Fulvia (3)...
(d'après le Pro Milone de Cicéron); et
8. La dernière
prophétie (A Mist of Prophecies, 2002),
en -48, César guerroie en Grèce à la poursuite
de Pompée : quel rôle dans sa stratégie joue,
à Rome, la prophétesse Cassandre morte empoisonnée,
mais aux funérailles de laquelle ont assisté les
sept plus puissantes femmes de Rome, qui se haïssent mutuellement
- Terentia, femme de Cicéron, alors en Grèce
avec Pompée; Antonia, cousine et épouse de
Marc Antoine; Cythéris,
actrice de pantomime et maîtresse de Marc Antoine; la
deux fois veuve Fulvia (4)(de
Clodius, puis de Curion); la fille de feu le dictateur Sylla,
Fausta, épouse de l'agitateur Milon, présentement
exilé à Marseille; Calpurnia, l'épouse
de Jules César, ses yeux et oreilles; et... Clodia
qui, à quarante-sept ans, a bien quelques fils gris
dans sa chevelure mais de beaux restes encore. Le tout sur fond
d'un complot ourdi par M. Cælius et... Milon (?). Clodia
apparaît également dans Sacrilège
à Rome (The Sacrilege, 1992) de John
Maddox Roberts qui a pour thème la profanation des Mystères
de la Bonne Déesse par P. Clodius Pulcher, en
62.
En 1936, dans Le baiser de Lesbie, l'Italien Alfredo Panzini
exprima le point de vue romantique du poète Catulle, le
vilain petit canard dont ne voulaient point entendre parler les
philologues «sérieux» d'avant-guerre qui n'en
produisaient que des traductions expurgées (trad. fr. :
Bruxelles, Office de Publicité, coll. «Traducta»,
1943). Enfin, en pleine vogue des caligulades érotiques,
Variety (5 novembre 1980) annonça le projet d'un film
intitulé Clodia avec Olimpia Carlisi dans le rôle,
qui devait être réalisé par Franco Brocani
et produit par Teobaldo Cerullo pour Texas Film Corp. & Linea
Cinematografica. Projet non abouti, à notre connaissance. |
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CLODIUS
(P. Clodius Pulcher)
(ca 92-janvier 52)
Sacrée famille que celle de Publius Clodius et de sa sur
Clodia. Originaires de la Sabine, les Claudii étaient
très anciens, s'étant établis à Rome
dès l'époque royale. C'est le consul M. Claudius
Marcellus qui, après trois ans de siège, prit Syracuse
défendue par Archimède (en 212). Les empereurs Tibère
et Claude, qui se nommaient l'un et l'autre Tiberius Claudius
Nero, en descendaient aussi, quoique appartenant à
la branche des Nero; mais l'empereur Néron (L. Domitius
Ahenobarbi) n'était un Nero qu'en vertu de son adoption
par Claude.
La génération qui nous intéresse
comptait au moins trois mâles : Appius Claudius Pulcher,
Publius Clodius Pulcher et Sextus Clodius Pulcher : Publius
était semble-t-il le puîné, car le prénom
Appius - particulier aux Claudii - était forcément
porté par l'aîné. Dans le bien comme dans
le mal, les Claudii étaient de fortes personnalités.
C'est un Appius Claudius Cæcus qui en 312 construisit à
ses frais la voie Appienne, laquelle relie Rome à Capoue
(plus tard, elle sera prolongée jusqu'à Brindisium).
Et parmi d'autres, on se souvient encore d'un Appius Claudius
Pulcher, consul en 249, qui pendant la Première Guerre
punique perdit la flotte romaine en l'engageant dans une action
malgré l'avis défavorable des... poulets sacrés.
Comme ceux-ci manquaient d'appétit, le consul Claudius
les avait fait jeter à la mer : «Qu'ils boivent,
s'ils n'ont pas faim !» («Bibant, si edere nolunt
!»). Le lendemain, le mécréant avait perdu
toutes ses quinquérèmes...
Le père Appius
Le père de P. Clodius, Appius Claudius Pulcher (fils aîné
du consul syllanien de 92) avait eu de son épouse Cæcilia
Metella Balearica huit enfants. Les deux premiers étaient
des filles, qui moururent en bas âge. Vinrent ensuite trois
garçons et trois filles. Toutefois, la mort de son brillant
cadet Caius sonna le tocsin pour le chef du clan : Appius-père
dut restreindre son train de vie d'ancien préteur qui n'avait
pas obtenu de province à piller. Chassé du Sénat,
il abandonna sa maison du Palatin pour aller vivre à la
campagne avec sa petite famille.
Pourtant, lorsque revint Sylla, Appius-père réintégra
le Sénat et devint consul en 79. L'année suivante
il obtint la Macédoine où il combattit victorieusement
Thraces et Celtes. Mais, physiquement épuisé par
la guerre, il mourut en rentrant en Italie.
Monsieur Claude...
Plutarque dit qu'en 63 - lorsqu'il profana les Mystères
de la Bonne Déesse -, Clodius était encore imberbe.
Et sans doute fallait-il qu'il le soit pour pouvoir se déguiser
en joueuse de lyre. Naturellement, s'agissant d'un homme qui s'était
déguisé en femme, il faut comme toujours être
prudent avec les insinuations malveillantes de la rhétorique
politique. Ainsi Cicéron, faisant un jeu de mot sur son
cognomen Pulcher («Beau»), le qualifie de «beau
mignon» (pulchellus) (CIC., Ad. Att., II,
1, 4).
... et ses «Claudettes»
Outre Appius, Publius et Sextus, il y avait encore trois filles.
Trois Clodia qui, toutes les trois, se signalèrent par
leur appétit de vivre. Leurs débauches, comme disent
les esprits chagrins. L'aînée Claudia Tertia était
la femme de Q. Marcius Rex (PLUT., Cic., 28-29); la puînée,
Claudia Quarta (5)
- notre Clodia - devint celle du consul de 60, Q. Metellus Celer
(PLUT., Cic., 28 ou 29); quant à la cadette Quinta,
elle épousa le grand général L. Licinius
Lucullus (CIC., Pro Milone, 73).
Le tribun de la plèbe
Pour pouvoir devenir tribun de la plèbe, P. Claudius se
fit, en 58, adopter par un plébéien plus jeune que
lui nommé F. Fonteius et démocratisa l'orthographe
de son nom en «Clodius» (SUÉT., Cæs.,
20). Tout aussi excentrique, sa sur Claudia Quarta suivit
son exemple et devint «Clodia».
On imagine assez mal l'étendue de la puissance de ce personnage
qui, dans la mouvance de Jules César, joua un rôle
important quoique trouble dans la vie politique de la fin de la
République. Qu'on se rappelle seulement que, le jour où
il fut assassiné sur la voie Appienne, il se rendait à
Lanuvium, petite ville dont il était le dictateur,
pour procéder à l'élection d'un flamine.
Le frère incestueux
Avec beaucoup de tendresse, Florence Dupont expose le cas Clodius-Clodia,
nous refaisant «Bonnie & Clyde» version dipienne
: «Clodius a toujours été beau. Il était
le seul à mériter le surnom de Pulcher, avec ses
traits purs, ses pommettes hautes, ses cheveux drus et noirs,
ses grands yeux sombres, mais si mince et si timide que ses surs
jouaient à le déguiser en fille. Les nuits d'orage
ou de cauchemar, il se réfugiait dans leur lit pour se
faire bercer comme une bébé. Adulte, il gardera
avec ses surs cette complicité tendre qui le fera
accuser d'inceste. (...) Les Romains ont une éducation
trop stricte dès la petite enfance, pour jamais vivre innocemment
leur sexe. Ils s'exaltent aux images interdites sans toucher jamais
une jeune fille libre, fût-elle leur sur. (...) Donc
tandis que les autres Claudii devenaient des Romains bien conformes,
Clodius et Clodia ne guérissaient pas de leur enfance.
Ils restaient fidèles aux rêves puérils de
luxe et de pouvoir. A partir de cette année 59, ils se
sont tous les deux jetés tête baissée dans
la modernité qui fait si peur aux Romains. Ils ont voulu
tout, tout de suite. Ils ont nargué les traditionalistes
nobles, ils ont choqué les simples plébéiens,
provoqué l'opinion publique, lui avec ses extravagances
politiques, elle avec ses plaisirs et ses amours tumultueuses.
Puis d'excès en excès ils sont devenus bizarres;
ils ont lassé leurs amis en refusant leurs conseils. Ils
se sont enfermés dans une solitude orgueilleuse dont même
leurs frères étaient exclus. Puis l'argent est venu
à manquer. Du cynisme en paroles, ils sont passés
à l'acte. Il y a eu des voisins spoliés, des meurtres
étouffés, des scandales financiers, des chantages.
Les jardins du Tibre reçurent des visiteurs étranges
qui ont fait fuir les derniers habitués de la maison du
rêve. Des vachers, des prostitués, des scribes et
même des esclaves publics, amenés par Clodius, découvrent
le luxe des grands et pour noyer leur timidité ingurgitent
grossièrement des flots de vin épais qu'ils vomissent
ensuite sur les coussins de pourpre. Devant le frère et
la sur il n'y a plus que la mort. Ils sont à bout
de course» (6).
Soumis à un interrogatoire serré,
les esclaves de Lucullus révéleront que leur maîtresse
débauchée Claudia Quinta avait poussé le
libertinage en commettant un inceste avec son frère. «L.
Lucullus, sous la foi du serment, a déclaré que,
par des interrogatoires d'esclaves, il avait acquis la certitude
que Clodius avait commis un abominable inceste avec sa propre
sur» (CIC., Pro Milone, 73) et Plutarque
de renchérir : «On croyait généralement
aussi que Clodius avait eu des rapports avec ses deux autres surs,
dont l'une, Tertia, était la femme de Marcius Rex et l'autre,
Clodia, celle de Metellus Celer.» (PLUT., Cic.,
28 et 29). Clodius aurait donc entretenu des relations incestueuses
avec chacune de ses trois surs ! L'invective politique ne
recule décidément devant rien. «Trompettes
de la Renommée, vous êtes bien mal embouchées...» |
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Chronologie de Clodius et Clodia |
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74-66 (?) |
— |
Pendant que Claudia Quinta mène joyeuse vie à
Rome, son plébéien mari L. Licinius Lucullus
fait la guerre en Orient pour le compte de Sylla (Troisième
Guerre contre Mithridate, 74-66 [7] ).
Ce Lucullus fut certainement un des plus grands généraux
de la fin de la République, probablement le plus intègre;
mais le grand public se souviendra davantage du gastronome
qu'il fut aussi («Ce soir, Lucullus dîne chez
Lucullus !»), l'homme qui introduisit le cerisier
en Italie.
Affectés à son état-major, P. Claudius
Pulcher et son frère Sextus prennent part à
la Troisième Guerre de Mithridate et font les quatre
cents coups. S'estimant traité avec insuffisamment
de considération, P. Claudius fomente une révolte
des soldats. |
68 |
— |
[Clodius a 24 ans] Son autre beau-frère, Q. Marcius
Rex, gouverneur de Cilicie, lui confie le commandement de
sa flotte, mais P. Claudius est capturé et rançonné
par les pirates (DION CASSIUS, XXXVIII, 30, 5). A propos de
cette affaire, Cicéron mettra en cause sa moralité
(CIC., De harusp. resp., 42).
Libéré, il reparaît en Syrie, où
il manque de perdre la vie lors d'une mutinerie dont une fois
de plus on le suspecta d'en avoir été à
l'origine. |
66 |
— |
[Clodius a 26 ans] Première conjuration de Catilina.
Cicéron préteur. |
65 |
— |
[Clodius a 27 ans] Rentré à Rome, P. Claudius
entame une carrière politique. Il intente une action
judiciaire contre Catilina pour extorsion de fonds, mais se
laisse acheter contre un acquittement. |
63 |
— |
[Clodius a 29 ans] Seconde conjuration de Catilina. P. Claudius
ne trempe probablement pas dedans, mais au contraire apporte
son soutien à Cicéron dans cette affaire. Selon
Plutarque (PLUT., Cic., 29), il figura parmi ses gardes
du corps. |
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Le scandale des Mystères de
la Bonne Déesse |
62 |
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(décembre) — [Clodius a 30 ans -
Clodia en a 32] Tous les ans, les principales matrones romaines
se réunissaient dans la demeure du Pontifex Maximus,
pour célébrer les Mystères de Bona
Dea. Les hommes n'étaient pas admis à cette
célébration, qui était dirigée
par l'épouse du Grand Pontife, en l'occurrence -
cette année-là - Pompeia Sylla, femme de Jules
César. «Etant épris de Pompeia, femme
de César, il [Clodius] pénétra
secrètement dans sa maison avec le costume et l'attirail
d'une joueuse de lyre. Les femmes y célébraient
le sacrifice secret dont la vue est interdite à l'autre
sexe, et aucun homme ne se trouvait là. Mais Clodius,
étant tout jeune et encore imberbe, espérait
se glisser avec les femmes chez Pompeia sans être
reconnu. Cependant, comme il était entré de
nuit et que la maison était grande, il ne savait
par où passer. Tandis qu'il errait ici et là,
une servante d'Aurelia, mère de César, l'aperçut
et lui demanda son nom. Contraint de parler, il dit qu'il
cherchait une suivante de Pompeia, du nom d'Habra. La servante
s'aperçut que sa voix n'était pas une voix
féminine; elle poussa un cri et appela les femmes.
Celles-ci ferment les portes, fouillent toute la maison
et surprennent Clodius réfugié dans la chambre
de la jeune esclave qui l'avait fait entrer. L'affaire s'ébruita;
César répudia Pompeia, et Clodius se vit intenter
une action d'impiété.
Cicéron était ami de Clodius, et dans l'affaire
de Catilina il avait trouvé en lui un auxiliaire
très zélé et un garde du corps. Clodius
se défendit contre ses accusateurs en affirmant qu'il
ne se trouvait même pas à Rome à ce
moment-là et séjournait très loin de
la ville sur ses terres. Mais Cicéron déposa
contre lui et déclara que Clodius était venu
dans sa maison et l'avait entretenu de certaines affaires.
Cela était vrai; néanmoins l'on crut que ce
n'était pas par amour de la vérité
que Cicéron faisait cette déposition, mais
pour se justifier aux yeux de sa femme Terentia. Elle détestait
Clodius parce qu'elle s'imaginait que sa sur Clodia
voulait épouser Cicéron. [...] De caractère
difficile et habituée à gouverner Cicéron,
elle l'excita à se joindre à ceux qui attaquaient
Clodius et à témoigner contre lui. Beaucoup
de notables aussi attestèrent que Clodius était
un parjure et un fourbe, qu'il avait acheté des foules
de citoyens et débauché des femmes. Lucullus
produisait même des servantes qui déposèrent
que Clodius avait eu des relations intimes avec la plus
jeune de ses surs, au temps où elle était
la femme de Lucullus. On croyait généralement
aussi que Clodius avait eu des rapports avec ses deux autres
surs, dont l'une, Tertia, était la femme de
Marcius Rex et l'autre, Clodia, celle de Metellus
Celer. [...] Clodius, ayant échappé au péril,
fut élu tribun du peuple. Il s'acharna aussitôt
sur Cicéron, lui suscitant toute sorte de tracas,
liguant et ameutant tout le monde contre lui»
(PLUT., Cic., 28-29).
Traîné en justice pour
cette «violation des lois divines et humaines»
Claudius, malgré l'accablant réquisitoire
de son «ami» Cicéron, s'en sortit en
corrompant ses juges.
Pompée, à qui l'on demanda son avis, évita
de se mouiller en révoquant en doute la légalité
du jury : il se borna à déclarer que le Sénat
savait ce qu'il faisait.
Selon Gérard Walter, Cicéron
aurait par vengeance téléguidé son
ami P. Claudius - qui l'avait si bien soutenu l'année
précédente, dans l'affaire Catilina - alors
que César s'était opposé à son
senatus consultum ultimum illégal.
Claudius étant l'amant de Pompeia ou voulait le devenir,
Cicéron aurait utilisé la passion de ces deux
jeunes écervelés pour déclencher un
scandale au cours de fêtes religieuses et ainsi discréditer
le Pontifex Maximus et préteur urbain César,
dans la maison duquel - la Regia, sur le Forum, à
côté de la Maison des Vestales - se déroulait
ce rite interdit aux hommes. La description minutieuse que,
plus tard, dans une lettre à son ami Atticus, Cicéron
fera de Claudius se déguisant en femme a un parfum
de vécu, fait remarquer Walter, qui pense que Cicéron
assista lui-même à la mascarade. Par ailleurs,
nous savons également que Claudius se trouvait justement
chez Cicéron juste avant de partir pour son expédition
sacrilège chez Pompeia. Si nous le savons, c'est
parce que Cicéron en témoignera, enfonçant
ainsi son ami Claudius qui se prévalait d'un alibi
- avoir été absent de Rome la nuit des faits
(CIC., Ad Att., I, 13, 14, 16, 17). Mais pourquoi
Cicéron trahit-il son ami Claudius, alors qu'il aurait
été le complice, voire l'instigateur de son
sacrilège ? Pour complaire à sa terrible épouse
Terentia qui, selon Dion Cassius, soupçonnait son
mari d'avoir des vues sur Claudia, la sur de
Claudius... !
John Maddox Roberts dans Sacrilège
à Rome a donné une toute autre
«explication» à cette affaire - mais
ici nous quittons la spéculation de l'historien pour
entrer dans le fantasmatique domaine du romanesque. Selon
le romancier, donc, le cadre des Mystères
de la Bonne Déesse aurait été
choisi pour une entrevue discrète - pas d'homme admis
! - entre Jules César himself, maître
des lieux, Cn. Pompée dont les légions campaient
sous les murs de la ville (et qui n'avait pas le droit de
pénétrer dans le pomrium tant
qu'il n'aurait pas célébré son triomphe
et, ensuite, démobilisé ses légions),
P. Clodius l'agitateur populiste et quelques autres complices.
Hélas, Clodius déguisé en joueuse de
lyre fut découvert par une servante. |
61 |
— |
[Clodius a 31 ans] P. Claudius est questeur en Sicile; il
brigue l'édilité. |
60 |
— |
[Clodius a 32 ans] (Juin) P. Claudius déclare vouloir
passer au parti plébéien et en être un
tribun. |
59 |
— |
[Clodius a 33 ans] Le consul Bibulus s'efforce de contrer
P. Claudius, «l'homme de César». Briguant
le tribunat de la plèbe, qui lui est interdit en tant
que patricien, Publius Claudius se fait adopter par un plébéien
et change donc son nom en «Clodius». «Cicéron
déplorant dans un plaidoyer le malheur des temps, le
même jour et à la neuvième heure, César
fit passer son ennemi Publius Clodius de la classe des patriciens
dans celle de la plèbe, faveur que depuis longtemps
ce dernier s'efforçait en vain d'obtenir»
(SUÉT., Cæs., XX).
Pseudo conspiration de Vettius, instiguée par César
et Vatinius contre eux-mêmes (Vettius sera assassiné
en prison). |
58 |
— |
[Clodius a 34 ans - Clodia en a 36] Le proconsul César
est parti rejoindre sa province, la Gaule. Clodius, tribun
de la plèbe depuis le 10 décembre 59, et le
consul Pison condamnent Cicéron à l'exil sous
prétexte qu'il a fait exécuter sans jugement
des partisans de Catilina. Clodius fait raser sa maison
sur le Palatin où, à la place, il fait ériger
un Temple consacré à la Liberté ! De
toute évidence, il n'a pas digéré le
coup des Mystères de la Bonne Déesse.
Clodius a donc été «chargé
par César d'empêcher les deux triumvirs restés
à Rome de nuire au triumvir absent», comme
l'écrit le R.P. Van Ooteghem, tout en tenant le Sénat
en respect - spécialement Caton et Cicéron.
Profitant de l'absence de son ami César, parti guerroyer
en Gaule, Clodius va donc pendant six années soumettre
Rome à un régime de terreur grâce à
ses bandes armées, et notamment se déclarer
l'adversaire de Pompée : «Voyant que c'était
à lui-même que le peuple s'attachait, parce
que tous ses actes et toute sa politique visaient à
lui plaire, il entreprit aussitôt de faire casser
quelques-unes des ordonnances de Pompée, il enleva
son prisonnier Tigrane et le garda avec lui, puis fit poursuivre
en justice des amis de Pompée, pour mesurer sur eux
jusqu'où allait le crédit du grand homme.
Enfin, un jour que Pompée était sorti pour
paraître à un procès, Clodius avec une
bande de gens pleins d'impudence et d'impertinence qu'il
avait sous ses ordres, se plaça dans un endroit bien
en vue, et lança des questions comme celles-ci :
«Qui est l'imperator aux mauvaises murs
? Qui est l'homme qui cherche un homme ? Qui est celui qui
se gratte la tête avec un seul doigt ?» Et
tous, comme un chur exercé à donner
la réplique, répondaient à grands cris
à chaque question, lorsque Clodius secouait sa toge
: 'C'est Pompée !'» (PLUT., Pompée,
48).
Dans ce sens,
Clodius va faire ratifier par la plèbe dix lois connues
sous le nom de Clodia lex :
Les quatre premières, le 4 juin 58 :
1 frumentaria : le blé jusqu'alors vendu
au peuple six as pour un tiers de boisseau sera distribué
gratuitement pendant un mois;
2 de censoribus : les censeurs ne peuvent exclure
du Sénat un citoyen, ni lui infliger aucune peine
infamante qu'après l'avoir accusé et fait
condamner publiquement;
3 de auspiciis : interdiction de prendre les auspices
et d'observer le ciel lorsque le Peuple serait assemblé
pour les affaires publiques. Abrogation de la lex Ælia
Fufia qui autorisait l'empêchement de tenir les
comices lorsque les augures étaient défavorables,
ce dont un précédent magistrat conservateur
avait abusé;
4 de collegiis : les anciennes corporations ou associations
(collegia) d'ouvriers abolies depuis Numa seront
rétablies, et l'on en créera d'autres du même
genre, noyaux des «milices» populistes.
Ensuite :
5 de insula Cypro : Ptolémée roi de
Chypre est déchu de sa royauté, et son île
devient une province romaine. Le but visé étant
de se débarrasser de Caton le Jeune en l'envoyant
conquérir l'île (sans lui en donner les moyens
: pas de légions !), avec l'espoir qu'il échouera.
Clodius sera déçu dans son attente car Caton
sera parfaitement à la hauteur.
Début mars :
6 de judiciis : tout individu qui, sans condamnation
antérieure et sans jugement, aurait attenté
à la vie d'un citoyen, sera privé du feu et
de l'eau. Cette loi visait spécialement Cicéron
(CLICK et
CLICK), ce
qui incita ce dernier à prendre d'initiative le chemin
de l'exil
(19 mars) sans attendre une condamnation. Il prit la route
de la Macédoine ignorant que son ennemi Pison allait,
le lendemain, en recevoir le gouvernement. Les biens de
Cicéron sont néanmoins confisqués,
sa maison du Palatin est détruite et le terrain qu'elle
occupait, mis aux enchères, est acquis par Clodius
grâce à un homme de paille;
7 de prouinciis consulum : (20 mars) les consuls
Pison et Gabinius recevraient le gouvernement de la Grèce
et de la Macédoine pour le premier, de la Syrie pour
le second. Tous deux avaient soutenu Clodius dans ses desseins
et en recevaient la récompense.
Enfin :
8 de ui : quelques habitants des villes municipales
seront protégés contre les injustices publiques
et les violences de leurs concitoyens;
9 de sacerdotio : le prêtre de Cybèle
à Pessinonte sera destitué de sa charge, laquelle
sera confiée au galate Brotigone;
10 de tribunis : les tribuns de la plèbe
auront le pouvoir de proposer et de faire librement les
lois.
Aidé de son frère Sextus,
P. Clodius libère Tigrane, prisonnier de Pompée
à Rome où il a été confié
à la garde du préteur L. Flavius (8),
et le mettent sur un bateau en partance pour l'Orient. Au
cours de cette spectaculaire évasion, il y aura des
morts romains - des hommes de Pompée envoyés
à leur poursuite, que ceux de Clodius mettront en
déroute les armes à la main.
(9-11 avril ?)
Décès du consul de 60, Q. Cæcilius Metellus
Celer, époux de Clodia, qu'elle trompait avec
M. Cælius Rufus. La rumeur parlera d'un empoisonnement. |
57 |
— |
[Clodius a 35 ans] Les consuls Lentulus et Q. Metellus
Nepos (bien que ce dernier soit un ennemi de Cicéron)
et le sénateur L. Cotta votent une loi rappelant Cicéron
de son exil (volontaire) et désavouent Clodius. Grogne
des partisans de Clodius groupés autour du tribun de
la plèbe Sext. Atilius Serranus.
(23 janvier) Le tribun de la plèbe Q. Fabricius convoque
l'Assemblée du Peuple pour entériner le retour
de Cicéron, mais les gladiateurs du préteur
Appius Claudius, frère aîné de Clodius,
attaquent les partisans de Cicéron et en tuent quelques
uns. |
fin 57-début
56 ? |
— Sextus Clodius, âme damnée de son frère,
comparaît en justice, mais est tiré d'affaire
par sa sur Clodia |
56 |
— |
[Clodius a 36 ans - Clodia en a 38] Clodius édile
curule. Cicéron rentre d'exil grâce au soutien
du nouveau tribun de la plèbe T. Annius Milon. Il obtient
la restitution de son terrain et des dédommagements
pour faire reconstruire sa demeure. Les bandes armées
de Clodius saccagent le chantier, agressent physiquement l'orateur
dans la rue, incendient la demeure de son frère Q.
Tullius Cicero. Pompée intervient en faveur de l'orateur.
(entre le 2 et le 17 février) Devant l'Assemblée
du Peuple, Clodius fort de sa lex Clodia de ui intente
un procès à Milon pour violences avec ses bandes
armées alors que l'on débattait du retour de
Cicéron - procès perdu d'avance car, à
travers Milon, il attaque de front le parti sénatorial,
Pompée et Cicéron en tête (procédure
qui finira en eau de boudin, en raison du climat de violence
entre bandes rivales).
Il s'agit de déstabiliser Pompée, accusé
d'affamer le peuple en trafiquant sur l'annone, et d'envoyer
à sa place Crassus restaurer Ptolémée
XII Aulète (9)
sur le trône d'Egypte - le grenier à blé
de Rome.
Caton prend parti contre Pompée, mais fait l'éloge
de Cicéron.
(4 avril) Cicéron plaide Pro Cælio. M.
Cælius Rufus est accusé d'avoir - en janvier
de la même année - suscité des troubles
à Naples, commis un vol à l'encontre d'une certaine
Palla, molesté des membres d'une délégation
diplomatique alexandrine et, surtout, d'avoir reçu
de l'argent de son ancienne maîtresse, Clodia Quarta,
pour assassiner Dion, l'ambassadeur de la reine Bérénice
dont il avait la charge de plaider la cause auprès
du Sénat, et d'empêcher le retour de l'Aulète.
Finalement, ce crime fut attribué à l'hôte
de Dion, L. Lucceius - un ami de Pompée. (Ce procès
a inspiré à Steven SAYLOR, Un
Egyptien dans la ville, quatrième aventure
de l'enquêteur Gordien.)
(16 avril ? [10])
Entrevue de Lucques à laquelle assistent deux cents
sénateurs et cent vingt faisceaux de magistrats; Cicéron
y est absent. Les agissements de Clodius contre Pompée
- à l'instigation de César ou malgré
lui - creusent un fossé entre les triumvirs. César
comprend qu'il est urgent de resserrer ses liens avec son
associé. Il est convenu que Pompée et Crassus
seront les consuls de 55.
(15 mai) Dans De haruspicum responso, Cicéron
répond à Clodius et à sa lex Clodia
de auspiciis.
(juin) Dans De prouinciis consularibus, Cicéron
dresse un réquisitoire contre la lex Clodia de prouinciis
consulum et les proconsuls de Syrie, Gabinius, et de Macédoine,
Pison - qui ont approuvés son exil. Puis il fait l'éloge
de Jules César dont il soutient la prorogation du mandat
dans les deux Gaules.
(novembre) Pompée et Crassus ayant négligé
de faire enregistrer leur candidature pour le consulat de
55, le consul C. Cornelius Lentulus Marcellinus s'oppose à
leur élection. Pompée et Crassus provoquent
l'ajournement des élections, soutenus par... l'édile
Clodius (qui s'est réconcilié avec Pompée
!) et les tribuns C. Porcius Caton et Sufenas. |
55 |
— |
[Clodius a 37 ans] (mi-février) Avec l'accord de
Pompée et de Crassus, Clodius brigue une rogatia
libera - une lucrative mission à Byzance et/ou
auprès de Brogitaros : Crassus invite Cicéron
à ne pas lui mettre des bâtons dans les roues.
Cicéron, qui s'est assagi, laisse faire. |
54 |
— |
[Clodius a 38 ans] Appius Claudius Pulcher, le frère
aîné de Clodius, consul. «Conservateur,
partisan des Meilleurs; il a une volonté de fer et
louvoie habillement entre les clans et les partis. Rusé,
sans scrupule, il a le plus souvent un pied dans chaque camp.
En 54, il obtient le consulat, en rendant des petits services
aux dynastes et, comme son père, marie ses filles cette
année-là. Il donne l'une au fils aîné
de Pompée, l'autre à Marcus Brutus, une des
figures du parti des Meilleurs. Il a le goût des uvres
d'art, fait venir de Grèce tableaux et statues. Comme
son ancêtre, le grand Appius, il a peu de religion.
Cicéron aime à plaisanter son «appiété»;
l'orateur parte d'expérience, ils ont été
collègues dans le collège des augures. Appius
a en commun avec beaucoup de nobles patriciens une attirance
pour les cultes étrangers. Il a été initié
aux mystères d'Eleusis, il est dévot d'Isis
et s'adonne à la nécromancie. (...) [Frères
et surs, les Claudii resteront indéfectiblement
soudés, celles-ci intercédant auprès
de leurs époux pour pousser ceux-là.] A ses
moments les plus fous, Appius n'abandonnera jamais Publius»
(11). |
53 |
— |
[Clodius a 39 ans] Marc Antoine est, à la demande
de César, momentanément réconcilié
avec Cicéron. Clodius doit se cacher dans la boutique
d'un libraire, près du Forum, poursuivi par Antoine
l'épée au poing.
Clodius brigue la préture pour 52, et Milon le consulat.
C'est la guerre ouverte entre leurs bandes respectives, ce
qui retarde la tenue des élections. |
52 |
— |
[Clodius a 40 ans] (18 janvier) Sur la voie Appienne, près
de Bovillæ, Clodius est assassiné par Birria
et Eudamus, deux gladiateurs-gardes du corps appartenant à
son ennemi T. Annius Milo. Excités par son épouse
Fulvia, ses partisans érigent son bûcher funéraire
devant la Curie, qu'ils incendient ensuite, ainsi que la demeure
de l'interrex.
Huit ans plus tard, dans sa seconde Philippique, son
vieil ennemi de Cicéron dira de Clodius, en manière
d'épitaphe [il s'adresse à Marc Antoine] : «Tu
as dit que P. Clodius avait été tué à
mon instigation. Qu'en penserait donc le public, s'il avait
été tué le jour où, dans le Forum,
sous les yeux du peuple romain, tu le poursuivais l'épée
à la main, et tu aurais terminé l'affaire, s'il
ne s'était jeté dans l'escalier d'une librairie
et n'avait, en l'obstruant, arrêté ton attaque
? Que j'aie approuvé cette action, je l'avoue, mais,
que je l'aie conseillée, personne, pas même toi,
ne le dit. Quant à Milon, je n'ai pas même pu
approuver son dessein, car il a terminé l'affaire avant
que personne eût pu soupçonner qu'il en avait
formé le projet. Mais c'est moi, dis-tu, qui l'avais
conseillé. Apparemment un homme comme Milon avait besoin
de conseiller pour servir l'Etat ! Mais je m'en suis réjoui.
Quoi donc ? dans une telle allégresse de la cité
tout entière, devais-je être le seul à
m'affliger ?» (CIC., Philippiques, II, 21-22).
(27 février) Pompée fait afficher deux projets
de loi : l'un, ui, fait mention de l'assassinat de
Clodius et de l'incendie de la Curie suite aux émeutes
lors des funérailles du démagogue - l'autre,
de ambitu, relatif aux tentatives de brigue illicites.
Traîné en justice, Milon est maladroitement défendu
par Cicéron et exilé à Marseille.
(Cet épisode est raconté par Steven Saylor
dans Meurtre
sur la voie Appia, enquête policière
de Gordien le Limier.) |
47 |
— |
[Clodia a 47 ans] Dans une lettre à son ami Atticus,
Cicéron déclare vouloir racheter les jardins
de Clodia, en bordure du Tibre. «Ce sont les
plus beaux, mais voudra-t-elle les vendre ? Elle est très
riche...»
(C'est cette Clodia désenchantée, vieillissante
dans ses jardins, que Steven Saylor met en scène en
48 - elle a alors 47 ans - dans La
dernière prophétie, enquête
policière de Gordien le Limier.) |
44 |
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[Clodia a 49 ans] (15 avril) Dans une autre lettre à
son ami Atticus, Cicéron demande des nouvelles de Clodia.
Ensuite la sulfureuse sur de Clodius disparaît
de l'Histoire... suivie moins de deux ans plus tard par Cicéron
lui-même, qui est assassiné par les proscripteurs
d'Antoine (7 décembre 43). |
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Rome : coffret
de la Saison 2 |
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Suite… |
NOTES :
(1) QUINTILLIEN, VIII, 6, 53 - cité
par R.P. J. VAN OOOTEGHEM, s.j., Les Cæcilii Metelii
de la République, Académie royale de Belgique,
1967, p. 277. - Retour texte
(2) On a également conservé
quelques lettres de la correspondance Cicéron-Cælius.
- Retour texte
(3) Fulvia, qui ensuite se remariera
avec Marc Antoine. - Retour texte
(4) Fulvia épousera Marc Antoine
en 45. - Retour texte
(5) Nous suivons ici la reconstitution
de la famille Clodius dans l'ordre défini par Florence
DUPONT, L'affaire Milon. - Retour texte
(6) F. DUPONT, op. cit., pp.
238-239. - Retour texte
(7) Ancien questeur de Sylla, Lucullus
(ca. 117-56) vainquit Mithridate qu'il contraignit à
se réfugier chez Tigrane d'Arménie. Lucullus conquit
alors sa capitale Tigranocerte, mais ses troupes finirent par
se révolter. Pompée reprit le commandement de la
guerre en 66.
Le très curieux péplum gothique de Giuseppe Vari,
Rome contre Rome (en Belgique : Le sorcier de l'Arménie;
aux Etats-Unis War
of the Zombies) est censé se passer pendant les
opérations menées en Arménie par Lucullus,
lequel toutefois n'apparaît guère dans le film (heureusement
pour l'historien, qui s'accomode mal de ces histoires de légionnaires
morts-vivants !). - Retour texte
(8) Il n'y avait pas de prison à
Rome. Les prisonniers de marque étaient assignés
à résidence chez des particuliers qui en avaient
la responsabilité. - Retour texte
(9) Il le sera finalement en 55, par
Aulus Gabinius gouverneur de Syrie, une créature de Pompée.
Pour se faire reconnaître roi d'Egypte par le Sénat
romain, l'Aulète avait versé à César
un pot de vin énorme - 6.000 talents - ce qui lui avait
d'ailleurs valu de se faire chasser de son pays par les Alexandrins
las d'être pressurés. - Retour
texte
(10) On ne connaît pas la date
exacte de l'entrevue de Lucques. Le R.P. Van Ooteghem la situe
après le 11 avril, mais avant le 15 mai : probablement
le 16 avril. - Retour texte
(11) F. DUPONT, L'affaire Milon,
op. cit., pp. 238-239. - Retour texte
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