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De La Chute de l'Empire romain
à Gladiator

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De La Chute de l'Empire romain à Gladiator

I — VOIES PARALLÈLES

1. Introduction

2. Deux films

 

Sur cette page :

3. A propos de La Chute de l'Empire romain

3.1. Le siècle des «Empereurs adoptés»

3.2. Le contexte historique

4. A propos de Gladiator

4.1. Pollice verso

4.2. Panem et circenses

4.3. Uchronie

 

Pages suivantes :

II — LES PROTAGONISTES

5. Les protagonistes historiques

6. Les protagonistes cinématographiques

Conclusion

III — ANNEXES

7. A propos de la bataille contre les Germains dans Gladiator

8. A propos des combats de gladiateurs (1) :
De l'archéologie au mythe

9. A propos des combats de gladiateurs (2) :
Les gladiateurs au cinéma

10. Bibliographie historique

IV — FICHES TECHNIQUES

11. La Chute de l'Empire romain

12. Gladiator

V — CHRONOLOGIE

13. Chronologie du déclin de l'Empire romain

VI — FILMOGRAPHIE

14. Filmographie des gladiateurs

 

3. A propos de La Chute de l'Empire romain

 
fall roman empire

3.1. Le siècle des «Empereurs adoptés»

On appelle aussi les Antonins : les «Adoptés». Car, à l'opposé de ce qui se pratiquait sous les dynasties précédentes, la transmission du pouvoir ne se fait plus par la filiation ou le degré de parenté, mais par l'adoption par l'empereur d'un collaborateur qui a fait ses preuves. C'est devenu un lieu commun que de considérer le règne des Antonins (96-192) comme l'âge d'or de l'Empire romain. Après les dynasties julio-claudienne et flavienne - brocardées par le pamphlétaire Suétone dans sa Vie des douze Césars - une série d'empereurs (Nerva, Trajan, Hadrien, Antonin le Pieux, Marc Aurèle) va révéler des administrateurs avisés, qui consolident l'Empire, lequel connaît sous leur règne sa plus grande extension. En tout cas, les Antonins ont prouvé qu'ils avaient de meilleurs publics relations (Tacite, Suétone) que les premiers Césars, d'Auguste à Domitien.

Un seul parmi les Antonins aura la faiblesse de déroger à cette règle : Marc Aurèle. Le dernier des Antonins. Après avoir associé à son règne un coempereur incapable, son frère adoptif Lucius Verus, (1) qui était aussi son gendre, l'époux de sa fille Lucilla, celui-ci léguera son trône à un autre non moins «incapable», son propre fils Commode.

Le règne de Commode ne sera qu'un hiatus de 12 ans dans une période de relative stabilité politique, à défaut de paix sur les frontières, qui va se perpétuer sous les premiers Sévères... Pourtant, faiblesse ou sagesse, Commode - une fois empereur - s'était empressé de faire la paix sur le limes germanique. Ici encore, l'historien peut s'interroger sur la nature de cette paix. Car Commode n'a pas eu bonne presse : en tant que populiste, il s'aliéna les classes dirigeantes de l'Empire, donc les intellectuels, ceux qui écrivent l'Histoire (cf. infra Commode).

Le limes. — Désormais la frontière entre la Magna Germania indépendante et l'Empire romain descend des côtes de la mer du Nord, remonte la basse vallée du Rhin, passe par le Westerwald et le Taunus jusqu'au Main, dont elle suit partiellement le cours. De là, passant par l'Odenwald, elle continue vers le Neckar et le Danube.
Au début, le limes n'est qu'un fossé de 548 km de long et surveillé par des miradors. Les fortifications seront complétées par Trajan (98-117) et Hadrien (117-138) : 1.000 miradors et 100 fortins en ponctueront le tracé, ne laissant passer que les commerçants, refoulant les indésirables.

Pour ce qui concerne l'époque de Marc Aurèle, les textes ne nous ont laissé que des indications fragmentaires sur la conduite des opérations militaires romaines sur le front du Danube. Et la colonne de Marc Aurèle, Piazza Colonna à Rome - bande dessinée à l'imitation de celle de Trajan pour les guerres daciques -, n'en a pas la lisibilité (2).

Tout commença, semble-t-il, lorsque Furtius roi des Quades et allié des Romains, fut déposé par un certain Ariogeasus, guerrier remuant qui entreprend des raids en direction de l'Italie. La contre-attaque de Marc Aurèle ne se fit pas attendre (pour le déroulement des guerres germaniques, voir Chronologie). Mais en 174, après quatre années de guerre, Marc Aurèle considère que le Danube n'est plus une frontière suffisante. En effet, entre Aquincum (Budapest) et Sirmium (3), le fleuve creuse une boucle dans le dispositif Romain, une poche délimitée par le Danube et la Tisza, dans laquelle Tibère naguère avait permis aux Sarmates de s'installer. L'empereur rêve d'absorber cette poche, de soumettre les Iazyges (Sarmates) et d'ainsi créer une nouvelle province, la Sarmatie, limitée au Nord par les Carpates. Auparavant toutefois, il lui faut réduire les Marcomans et reporter le limes sur les montagnes au nord de la Moravie et dans les Monts Métalliques. Ainsi seulement l'Empire romain offrira-t-il des deux Pannonies à la Dacie une frontière droite, plus facile à défendre.

3.2. Le contexte historique

La thèse du film
Un communiqué de presse nous renseigne sur la thèse historique illustrée par le scénario du film.
«(Après la mort de Marc Aurèle), en moins de quatre-vingt-dix ans... quatre-vingt-dix empereurs ou prétendants à la pourpre impériale devaient se succéder sur le trône de Rome ! Parmi cette lignée des artisans du désastre figurent notamment, après ce fou vicieux et sanguinaire de Commode, Septime Sévère, Caracalla, Héliogabale qui, originaires d'Afrique ou de Syrie, s'empressèrent de substituer aux Romains aux postes de commande des étrangers ignorant, pour la plupart, l'usage même du latin. Un Thrace, Maximien, fut même le premier barbare qui eut le privilège de revêtir la toge impériale, longtemps après que la dignité d'empereur eut été... vendue aux enchères à l'acquéreur qui offrirait la plus forte solde aux gardes prétoriens !
Les territoires pacifiés par Marc Aurèle furent perdus. Les vertus qui avaient fait la grandeur de Rome disparurent pour faire place à la débauche, à la résignation, puis à la lâcheté, en même temps que se déchaînaient les persécutions contre les chrétiens. Les barbares s'introduisirent dans l'Empire, préparant dès 375 - après la capitulation de Valentinien Ier devant leurs incursions -, le début des grandes invasions germaniques qui recouvrent de ténèbres sanguinaires le début du Moyen-Age»
(4)

La chute est encore loin !
Samuel Bronston et Anthony Mann «ont vraisemblablement voulu illustrer la fameuse thèse de Renan», qui voyait dans la mort de Marc Aurèle «le moment décisif où la ruine de la vieille civilisation fut décidée» (5). «Le jour de la mort de Marc Aurèle peut être pris comme le moment décisif où la ruine de la vieille civilisation fut décidée, écrivait Renan. Maintenant, c'est après le plus grand effort de rationalisme gouvernemental, après quatre-vingt-quatre ans d'un régime excellent, après Nerva, Trajan, Hadrien, Antonin, Marc Aurèle que le règne du mal recommence, pire que jamais. Adieu, vertu; adieu, raison. Puisque Marc Aurèle n'a pu sauver le monde, qui le sauvera ?» «Entreprise non dénuée d'intérêt, même pour un public américain ignorant l'anachronisme d'une telle thèse», note le critique de la Saison cinématographique (6).
»Pourquoi - ajoute encore ce dernier - la mort de Marc Aurèle marque-t-elle la chute d'un empire qui ne s'écroulera réellement que deux siècles plus tard ? Là encore les auteurs se sont contentés d'une ébauche, reculant devant une explication honnête, alors qu'il aurait fallu dépeindre la décomposition morale généralisée qui régnait alors et souligner l'aspect périmé d'une organisation économique et sociale. Que nous offre-t-on ? Des intrigues de palais, quelques légions en révolte, un peuple qui danse pourvu qu'on lui lance des pièces d'or ? Quelle saisissante ellipse» (7).

Enfin, comme le souligne Claude Aziza, «en 192, l'Empire est bien loin de sa fin ! Bien plus, même si quelques signes inquiétants se font sentir ça et là, il est encore au sommet de sa puissance.
Il est temps de tordre le cou à un mythe tenace, celui de la «décadence» et par là, de la chute de l'Empire. Image d'Epinal, véhiculée par deux tendances contradictoires :
- la républicaine pure et dure;
- celle des Pères de l'Eglise qui auraient bien voulu que l'âge du Christ coïncide avec le glas de Rome. En fait, les IIIe et IVe s. seront des siècles de mutations non de déclin. Et si l'on admet que l'Empire romain d'Occident cesse d'exister après la prise de Rome par Odoacre (8)(476), il perdure, sous d'autres formes, dans l'Empire byzantin.»

Edward Gibbon (1737-1794)
De nombreux films historiques sont tirés de romans célèbres (Ben Hur, Quo Vadis, Spartacus). Dans le cas présent, les scénaristes de Samuel Bronston sont partis d'un livre illustre chez les Anglo-Saxons : L'histoire du déclin et de la chute de l'Empire romain d'Edward Gibbon, auquel ils emprunteront partiellement le titre. Cependant, il ne s'agit plus cette fois de littérature romanesque, mais d'un ouvrage historique du XVIIIe s. encore bien !

Gibbon naquit en 1737 à Putney, près de Londres, dans une famille de petite noblesse que les affaires avaient enrichie. S'étant converti au catholicisme à 15 ans, il fut contraint de quitter Oxford, où il faisait ses études, et les poursuivit à Lausanne, où le Dr Pavillard lui servit de tuteur. Gibbon vivra la plupart du temps à Lausanne. En 1793, il retournera à Londres, où il mourra un an plus tard.

C'est en visitant Rome en 1764, à l'âge de 27 ans, qu'il concevra le projet d'écrire The History of the Decline and Fall of the Roman Empire, dont les premiers volumes paraîtront 12 ans plus tard - le dernier en 1788, un an avant le déclenchement de la Révolution française.

«Il n'était pas rare de rencontrer, au siècle dernier, en Angleterre et aux Etats-Unis - écrit D. Charlan -, des gens qui, dans toute leur vie, n'avaient lu que deux livres : la Bible et Gibbon. Pendant deux siècles au moins, tous les intellectuels, tous les hommes politiques anglo-saxons, subirent l'influence de Gibbon. Le cas est unique. Dans aucun pays, un livre d'histoire ne prit une telle importance. C'est au point qu'on a pu dire que pour vraiment comprendre les politiques anglaise et américaine, et les conceptions du monde d'où découlent ces politiques, et ce jusqu'à nos jours, il est utile de connaître Gibbon.
»
(...) [C']était un curieux personnage. De taille minuscule, obèse, excentrique dans l'habit comme dans le comportement, suprêmement intelligent mais absurdement borné à certains points de vue, individualiste et anticonformiste mais, en même temps, réactionnaire et même rétrograde, d'un jugement large s'efforçant toujours de se baser sur une connaissance précise, mais, à la fois, d'une partialité butée en matière de religion, Gibbon personnifie assez bien un type d'humaniste anglais du XVIIIe s. qui ne survécut pas aux guerres napoléoniennes.
»Nourri de lectures classiques, ami de Voltaire, d'Helvétius et de quelques autres philosophes français, ayant vécu plus de la moitié de sa vie en Suisse et en France, parlant d'ailleurs le français de préférence à l'anglais, Edward Gibbon n'était pas tourné vers l'avenir, mais plutôt vers le passé. Il siégeait au Parlement à l'époque de la guerre d'Indépendance des Etats-Unis et ne comprit visiblement rien à ce qui se passait dans le Nouveau-Monde. Il n'entrevit rien des évolutions sociales et économiques qui s'annonçaient, pour son pays et pour l'Europe. Pour lui, une société humaine idéale avait existé, au temps de la splendeur de l'Empire romain, sous l'empereur Trajan, en particulier. Le déclin de cet empire était le déclin de l'humanité entière. C'était, en somme, un pessimiste rétrograde.
»C'est lui qui, entre 1776 et 1788, publia cette gigantesque
Histoire du déclin et de la chute de l'Empire romain qui raconte, en douze cents pages, l'évolution de l'Empire, depuis Auguste jusqu'à la prise de Constantinople par les Turcs, en 1453. Les historiens, aujourd'hui, y relèvent des erreurs en masse - car, Gibbon n'a pas très bien compris les causes de la chute de Rome et, en particulier, fort mal interprété le développement du christianisme -, mais c'était le premier essai de description et d'explication globale de cette période de l'Histoire. C'était la première fois qu'un écrivain utilisait ainsi toutes les sources connues pour brosser un tableau complet.
»Cette somme apparemment complète et définitive devait plaire, devait flatter - tout autant que la nostalgie de la puissance impériale, d'un ordre universel que l'incurie des successeurs de Trajan avait laissé se corrompre - les bourgeois anglais du temps de Victoria (alors que se créait l'Empire britannique), les gentilshommes sudistes (qui maintenaient un autre empire), voire les bourgeois yankees (finançant la «marche vers l'ouest»), qui trouvaient dans Gibbon des mises en garde, des exemples - surtout des exemples à ne pas suivre -, et un esprit, un idéal, ou faut-il dire un orgueil de caste.»

Il est à noter que si le film d'Anthony Mann ne fait qu'une très mince allusion aux chrétiens (le stoïcien Timonidès est, en fait, un crypto-chrétien comme le révèle la petite croix qu'il serre dans ses vêtements lorsque Livius découvre son cadavre), celui de Ridley Scott n'est guère plus explicite. Quelques plans de chrétiens conduits aux fauves avaient bien été prévus, qui tombèrent au montage final, étant jugés hors sujet et superfétatoires. Jusqu'alors, les péplums américains «s'inspiraient du conflit entre paganisme et christianisme, tel qu'on l'imaginait au XIXe s. Mais, au contraire de Gibbon qui considérait le christianisme comme une des causes décisives de l'affaiblissement de l'Empire, la Rome hollywoodienne, elle, s'employa à le valoriser comme source de renouveau», remarquera Glen Bowersock (9), professeur à l'Institute for Advanced Study de Princeton. C'est un des grands mérites du film de Scott, de ne pas ramener une prédication chrétienne sonnant le glas de l'Empire encore loin d'être en décadence, mais au contraire de lui substituer le code d'une morale stoïcienne ouverte sur une vision de l'Empire et de la société à venir.
Quarante ans plus tôt, Anthony Mann avait tiré une toute autre carte en jouant sur la similitude apparente du christianisme et du stoïcisme. En réalité, le stoïcien Marc Aurèle, partageant les préjugés de son temps vis-à-vis de ces «ennemis du genre humain», en aurait été fort surpris !

 
tribune des rostres

4. A propos de Gladiator

Le succès public de Gladiator fut immédiat, comme en témoigna toute une série d'imitations aussitôt mises en chantier (dont une trilogie hardcore et un soft de derrière les fagots), des projets de «suite», ou tout simplement un regain d'intérêt pour les films à sujet antique - ce, tant pour le grand que pour le petit écran : Troie, La Passion, 300, la série Rome et d'innombrables docufictions.
Aussi la critique «professionnelle» dut-elle s'incliner sous le poids de l'évidence, non sans raideur parfois. Tandis que des latinistes érudits donnaient leur point de vue, scrutaient en doctes épigraphes les inscriptions sur les bâtiments (10) ou les dérapages linguistiques, on se gaussa un peu facilement d'une erreur de date dans un carton du générique (180 avant ou après J.-C. ? Ah ces Amerloques !) ou on salua - un rien méprisant - le succès logistique typiquement made in Hollywood; plus, l'on déplora le rythme précipité, le montage à l'esbroufe des combats contre les Germains ou entre gladiateurs; un certain triomphe de l'art pompier, mais comment pouvait-il en être autrement étant parti d'une toile du Maître de Vesoul (?); l'inévitable abus des poncifs, tandis que d'autres au contraire - plus perspicaces - soulignèrent telle notable transgression au genre, comme le refus du happy end ou en saluèrent les litotes et les trouvailles : pas d'orgie ni de chrétiens (11) mais, bien au contraire, l'éloge du stoïcisme romain. Ne s'agissait-il, en somme, que d'un film pop-corn tout juste bon pour un public américain ou qui ne séduirait qu'un public masculin... de moins de 16 ans ? Un «film pour hommes», ce qui est un comble si l'on songe à tout le mal que se donnèrent les scénaristes pour emporter l'adhésion de ces 50 % de public féminin convoités - objectif du reste rondement atteint, comme en témoigna le site fanique de Dominique Charlier qui publia une série de romans composés par d'enthousiastes jeunes femmes comme Aurore Dolbec, la canadienne Susan Spicer, l'argentine Hebe Bianco, l'italienne Ilaria Dotti ou la japonaise Kumiko Ikeda etc. On constatera assez banalement que le péplum est un cinéma de genre et un laboratoire privilégié pour l'industrie cinématographique, illustrant les prouesses du virtuel et de l'infographie qui trouva même le moyen de «ressusciter» l'acteur Oliver Reed décédé avant la fin du tournage.
Avec une bonne dose de mauvaise foi, Gladiator ne serait qu'un film de pur divertissement, ne contenant aucun message. Ce qui exige une sérieuse dose de cécité : centré sur le Colisée, le film de Ridley Scott est bel et bien une pertinente réflexion sur le pouvoir des médias, du spectacle qui détourne le public des vrais problèmes de la société où il vit ! A notre avis, ce critique grincheux était tellement enthousiasmé par le show qu'il en perdît les pédales...

Certes Ridley Scott obéit à la seule loi du show-business : la reconstitution d'un monde romain crédible lui suffit. Usant de sa licence poétique, il peut se passer d'une vaine «évocation historico-archéologique plausible», idéal de toute manière jamais atteint, même avec la meilleure volonté : par exemple, une description fiable des us et rituels de l'amphithéâtre. On songe à Blaise Cendrars sarcastique : «Qu'est-ce que ça peut te foutre de savoir si j'ai réellement pris l'Orient-Express, puisque moi je te l'ai fait prendre !» Car il sait parfaitement, Ridley Scott, que monté sur le trône impérial à dix-neuf ans, le jeune empereur Commode fut plutôt une victime de l'Histoire, et probablement pas le monstre que l'on a dit; que les catapultes romaines ne portaient pas à un kilomètre; que la couleur des bandes laticlaves sur la toge des sénateurs était le rouge, non le noir; ou que certaines armes imaginées pour le film étaient à dessein fantaisistes ou, comme le casque à visière rentrante du gladiateur Tigris, s'inspiraient de sources aussi inavouables que le modèle actuellement en dotation chez les sapeurs-pompiers français...

4.1. Pollice verso

Dans notre manuel de latin de VIe, il y avait une reproduction en noir et blanc de la fameuse toile de Gérôme, Pollice verso (1872). Un gladiateur bedonnant, le corps couturé de cicatrices, pressait de son pied la gorge d'un jeune rétiaire terrassé, dont le doigt tendu implorait grâce. A côté de la loge impériale, les vestales, baissant le pouce (pollice uerso) réclamaient la mort du maladroit. Les vestales... ces vierges pudiques consacrées au culte de la déesse du foyer semblaient ici des fauves hystériques assoiffés de sang, qui ont droit de vie ou de mort, insiste le chrétien Prudence, qui nous a conservé l'anecdote (PRUD., Contre Symmaque, 11, 1098-9). La connotation sexuelle ne vous aura pas échappé : celles dont la virginité ne sera pas déflorée aspirent à voir le sang du jeune homme gicler de sa carotide tranchée : Jugula !, «Egorge-le... Tranche-lui la jugulaire !» Avec une précision hyperréaliste, l'artiste avait noté les traits de lumière filtrant par les ouvertures des velaria, ces larges panneaux de toile tendus au-dessus des spectateurs pour les protéger des ardeurs du soleil.

 
gerome - pollice verso
 

Naïvement, nous nous interrogions à propos du photographe qui avait pris ces... instantanés... Nous savons aujourd'hui que cela aurait pu être l'auteur de Gladiator - voyageant à bord de la Machine à remonter le Temps - Ridley Scott, à qui le producteur exécutif et codirecteur de DreamWorks, Walter Parkes, et le producteur, Douglas Wick, montrèrent une reproduction de cette toile, actuellement conservée au Phoenix Art Museum, Arizona.
C'est, en effet, à partir de cette toile du Maître de Vesoul - et quelques autres de ses œuvres comme Dernières prières des martyrs chrétiens (1883), Ave Cæsar, morituri te salutant (1859), etc.(12) - que fut conçu Gladiator.- On en retrouve l'ambiance chromatique et jusqu'au moindre détails.

... Dans notre manuel, la légende sous la photo précisait que, bien que n'étant plus de première jeunesse, ce gladiateur possédait suffisamment de «métier» pour venir à bout d'adversaires débutants, plus impulsifs. C'est à peu près le même langage que tient le laniste, le maître de gladiateurs Proximo (Oliver Reed) à sa recrue Russell Crowe lorsqu'il lui reproche, après son premier combat, d'avoir un peu trop rapidement «expédié» ses adversaires : les spectateurs n'en ont pas eu pour leur argent !

gladiator
 

Sur l'écran large, Rome - la maîtresse du Monde - s'ouvre sur une image décolorisée du Colisée, avec une vaste esplanade où sont impeccablement alignées les légions. Ce plan un peu incongru dans un film Technicolor fait référence d'image d'archive, qui n'est pas sans nous rappeler certain Congrès de Nuremberg. Car la Rome de Commode est la Rome du Pain et des Jeux, le règne de la démagogie où il suffit au Prince, c'est-à-dire à l'Empereur, de flatter des plus vils instincts de la populace pour contrer l'œuvre éclairée des professionnels de la politique, du Sénat garant - paraît-il - des institutions républicaines. Bref, des classes «éduquées».Bien sûr, cette prise de position se discute (revoyez votre Histoire Romaine), mais en attendant, le sang jaillit, des fragments de cervelle volent à travers la salle obscure : Maximus n'y va pas de main morte dans sa volonté de venger sa famille massacrée et d'honorer sa promesse faite à l'Empereur mourant Marc Aurèle.

Le film de Ridley Scott n'est pas qu'un hommage à Jean Léon Gérôme, c'en est aussi un à La Chute De L'Empire Romain (1964) d'Anthony Mann et au Spartacus (1960) de Kubrick. Nous ne sachons pas que Marc Aurèle ait interdit les combats de gladiateurs, mais il est vrai qu'il les embrigada massivement pour aller combattre Quades et Marcomans : ils formaient le corps des Obsequentes (les «Suivants»). L'empereur-philosophe décédé, Commode préféra négocier avec les Marcomans afin de pouvoir regagner au plus vite Rome et ses plaisirs... En cette fin du IIe s., les Romains avaient tendance à prendre des raclées des Germains, et plutôt intérêt à négocier...

Russell Crowe, qui interprète Ælius Maximus avec une sobriété exemplaire et manie le glaive avec dextérité (le cinéma de Hong Kong des années '70 est passé par là), n'est pas sans faire songer, cinématographiquement, à ce général Livius qu'incarna Stephen Boyd dans le précité film d'Anthony Mann. Historiquement, il nous rappelle peut-être qu'à cette même bataille évoquée au début du film, participa un certain Marius Maximus, tribun à la légion III Italica qui, d'une certaine manière, est un peu le narrateur de notre aventure puisque l'Histoire Auguste serait un condensé de son œuvre d'historien (13).

4.2. Panem et circenses

Partant de la toile fameuse de Jean Léon Gérôme (1824-1904), Pollice Verso, le réalisateur de Gladiator, peintre de formation, se livre à une réflexion sur la relation du pouvoir et des spectacles de masse. Son peuple rassasié de pain (la société de consommation ?) et anesthésié par les jeux, est oublieux de la peste qui ravage les quartiers populaires de Rome (id. est le sida, les aliments génétiquement modifiés, le réchauffement climatique, la pollution de la nappe phréatique, etc.). Aussi Commode peut à son aise, en despote accompli, juguler la classe politique... Ironie, tandis que le film sortait sur nos grands écrans (juin 2000), la petite lucarne de la TV relayait l'événement sportif qui passionnait toute l'Europe, avec son cortège de violences «hooliganiques» et le quadrillage policier qui en est le corollaire !

chute empire romain
Où deux conceptions s'affrontent, aussi diamétralement opposées que l'être et le paraître :
le Forum politique dans La Chute de l'Empire romain et le Colisée médiatique dans Gladiator
gladiator
 

Il est amusant de noter que, autant Bronston avait soigné sa reconstitution du Forum romain, autant Ridley Scott s'en est peu soucié. La colossale main de bronze, ci-dessus, qui dominait le Forum bronstonien et semblait le bénir, est remplacée par un pied géant, de marbre, qui semble écraser ce Forum «reconstitué» dans un angle du fort Ricasoli, à Malte, où le film fut tourné. Ce pied serait-il supposé être un vestige du «Colosse de Néron» auquel le Colisée est redevable de son nom ? En tout cas, le peuple romain n'y est qu'une masse de lilliputiens sous la botte de Commode. Le Forum scottien n'est qu'un recoin populeux au-dessus duquel plane en arrière-plan le panorama contemporain de Malte (on aperçoit du reste, sur les photos, quelques clochers d'église) dans lequel on a injecté quelques bâtiments néo-classiques londoniens, dont le British Museum, comme le rapporte Laurent Hugueniot, superviseur de l'infographie 3D (14). L'autre face du «Forum» consiste en une aire gigantesque adossée (sic) au Colisée avec d'immenses colonnades (qui paraissent d'autant plus énormes que le char de Commode est en réalité un modèle réduit, filmé de loin). Clin d'œil au cinéma de Leni Riefenstahl : la couleur virée au noir et blanc pour donner l'impression d'images d'archives d'un passé pas si éloigné que cela, en fin de compte...

 
gladiator - colisee
 

Cinéma d'évocation donc, non de reconstitution. Sauf le Colisée qui vraiment en impose. Partiellement reconstruit, mais complété par infographie. Le spectateur a vraiment l'impression que des parties de la toile de Gérôme ont été purement et simplement scannées, tant est remarquable la restitution de ses ambiances chromatiques, avec les rais de lumière tombant des velaria.
«Notre objectif commun se résuma à un mot : «authenticité», déclarera Ridley Scott. Nous n'avions aucunement l'intention de tourner un documentaire archéologique, mais nous tenions à restituer fidèlement l'esprit du temps. J'ai disposé pour cela d'une excellente équipe qui s'est documentée et rendue sur place. Ils ont accompli un travail extraordinaire : on respire l'ambiance de la ville, de l'arène, on se sent transporté à l'époque romaine.» De fait, on peut discuter quantité de détails, qu'il s'agisse des costumes (15), de la tactique militaire ou des usages de la gladiature - les combats dans l'amphithéâtre étaient strictement codifiés, ce dont Ridley Scott n'a eu cure ! Mais il convient d'être prudent : après tout, l'archéologie nous apprend que les camps légionnaires de Jules César avaient rarement, sinon jamais, la forme rectangulaire idéale que nos manuels montrent en exemple (16)...

En fait d'anachronismes... comment y échapper, au cinéma ? Ca démarre avec, par exemple, le bouchon de gourde que l'on dévisse (comme si l'Antiquité produisait industriellement des pas filetés, même si Archimède avait depuis longtemps inventé le principe de la vis) et ça remonte jusqu'aux plastrons de légionnaire formés de trois disques (vieux modèle samnite parfaitement obsolète au IIe s. de n.E.) pour La chute de l'Empire romain. Et cela revient avec le casque de gladiateur à masque facial rentrant (inspiré des modèles contemporains pour pilotes ou pompiers) en passant par des allusions spectaculaires au national-socialisme, mais en faisant, au passage, ses choux gras du panorama contemporain de La Valette sous réserve de quelques incrustations néo-classiques comme nous venons de le voir pour Gladiator.

4.3. Uchronie

La mort de Marc Aurèle, frappé par la peste à Vindobona, mit fin à l'Age d'Or que l'Empire romain avait connu sous le règne des Antonins. Sous le gouvernement de ces derniers - nous l'avons dit - la transmission du pouvoir n'était pas héréditaire. L'empereur choisissait son successeur parmi ses proches collaborateurs, sage formule qui, après les fureurs sanguinaires de Domitien, avait valu à Rome 84 ans d'administration sans faille, sous les règnes de Nerva (96-98), Trajan (98-117), Hadrien (117-138), Antonin (138-161) et Marc Aurèle (161-180). Après la mort de ce dernier, celui de Commode (178-193) aurait été le règne d'Ubu-Roi.

 

mort de marc aurele

Marc Aurèle s'éteint, entouré de Livius et de Lucilla (Antonia, VF). Hélas, aucun témoin digne de foi ne pourra confirmer son intention de léguer l'Empire romain à son général, plutôt qu'à son fils... (La chute de l'Empire romain)

Le dauphin de Marc Aurèle
Les historiens se sont interrogés sur ce dérapage. En 1857, le philosophe français Charles Renouvier (1815-1903) fit paraître sous forme de roman un essai philosophique intitulé Uchronie (17) (seconde édition, révisée, en 1876). Sur la fin de son règne, postulait-il, au lieu du cruel Commode, son fils, l'empereur Marc Aurèle choisissait pour successeur le sévère général Avidius Cassius. Ensemble, ils rédigent une constitution nouvelle, émancipent les esclaves, instaurent davantage de liberté démocratique et - surtout - relèguent les chrétiens en Orient.
Homme fort sage et clairvoyant, Avidius Cassius fait appliquer cette ligne politique révolutionnaire, conduisant à un essor considérable dans les arts et les progrès technologiques. Avec pour conséquence que la religion chrétienne devenait sans lendemain, faute d'un Constantin pour l'imposer. Après leur disparition, Pertinax poursuit leur œuvre. Pertinax mort, on assiste à l'avènement d'une nouvelle République après un règne de Commode écourté. Septime Sévère n'accédera jamais à l'empire, ni bien sûr Théodose que le lecteur croisera cependant, simple consul.
La fin d'Uchronie vire totalement au pamphlet anti-catholique. Dans deux appendices, écrits soi-disant en 1658 et en 1709, puis en 1715. Renouvier délaisse totalement l'uchronie pour confronter son imaginaire à la réalité. Réalité dont il accable à nouveau l'Eglise, génératrice des tous les maux : l'Inquisition, les dragonnades de Louis XIV sur lesquelles il insiste spécialement.

Qui fut en réalité cet Avidius Cassius ? Dans l'Histoire Auguste, Avidius Cassius était un excellent chef militaire, qui avait conduit de main de maître la guerre contre les Parthes (18). En 175, alors que la santé de Marc Aurèle était au plus mal, il se proclama empereur avec - a-t-on dit - la complicité de l'impératrice Faustina. Avidius, en effet, aurait convenu avec l'épouse de Marc Aurèle de l'épouser, sitôt veuve. Malheureusement pour le félon, l'empereur se rétablit ! Le règne de l'usurpateur, en Egypte, n'avait duré que trois mois. Il prit fin à l'initiative d'un simple centurion qui l'assassina et envoya sa tête à Rome. Etranger à sa mort, Marc Aurèle - qui le tenait en haute estime - lui pardonna à titre posthume ainsi qu'à ses partisans, priant le Sénat de ne point persécuter la famille d'Avidius, demeurée à Rome (19).

Comme il a été dit plus haut, le mot «uchronie» fut expressément créé à l'occasion d'une extrapolation historique prenant sa source dans la succession de Marc Aurèle. Mais le terme a aujourd'hui été récupéré par la science fiction pour désigner toute espèce de jeu avec l'Histoire, du genre : «Que se serait-il passé... si Hitler avait envahi l'Angleterre ? si le général Lee avait écrasé le Nord à Gettysburg ? si Napoléon avait vaincu en Russie ou à Waterloo ? si les Carthaginois avaient gagné les Guerres puniques ? ou... si le Prince des vampires transylvaniens avait, en 1895, épousé Sa Gracieuse Majesté ?» Et la SF d'imaginer voyages dans le Temps, univers parallèles, paradoxes temporels qui s'enchevêtrent. Particulièrement savoureuse est, par exemple et par parenthèse, l'uchronie gothique mêlée de satire politique de Kim Newman, Anno Dracula. Et si, au lieu de séduire l'épouse d'un notaire de campagne, Dracula - dans son désir de conquérir l'Angleterre - avait plus logiquement visé à la tête, avait vampirisé la reine Victoria (20) ?

Le héros
«Que se serait-il donc passé si un autre empereur philosophe avait succédé à Marc Aurèle ?» Selon Charles Renouvier, anticlérical convaincu, l'Occident se serait donc épargné l'obscurantisme chrétien et aurait progressé beaucoup plus vite. Le cinéma hollywoodien élude, bien évidemment, ce genre de prospective «gibbonienne» remettant en question l'apport du christianisme, pour nous livrer des fresques chamarrées comme ce Gladiator (2000) ou, trente-cinq ans auparavant, La Chute de l'Empire romain (1964). Gladiator - comme c'est le cas, toujours, au cinéma - c'est avant tout de l'Histoire réécrite, synthétisée. L'Histoire avec un grand «H» propose une pléthore de personnages qui rendraient inintelligible le scénario. Difficile de concevoir un film ramassant en 155' un compte rendu scrupuleux du règne de Commode, qui dura quand même onze ans et neuf mois, pendant lesquels il eut à réprimer plusieurs conspirations dirigées contre lui. Il importe assez peu de savoir qui aurait pu être, historiquement ce général rebelle, amant de Lucilla : Gaius Livius Metellus, incarné jadis par Stephen Boyd et Ælius Maximus, aujourd'hui campé par Russell Crowe sont des personnages de fiction qui synthétisent plusieurs protagonistes historiques. Soit, outre le général Avidius Cassius, le préfet du prétoire Tarruntenus Paternus, qui remporta la dernière grande victoire de Marc Aurèle sur les Germains, en 179; le vieux général Ti. Claudius Pompeianus, qui épousa Lucilla en 173; ou peut-être l'historien Marius Maximus, plusieurs fois mentionné dans les Pensées pour moi-même et qui était un confident de Marc Aurèle. Comme son homonyme de celluloïd, ce Maximus participa lui aussi à cette dernière bataille contre les Germains. Sa carrière toutefois - dans notre univers temporel, s'entend - fut bien plus paisible que celle du héros de Gladiator, puisqu'il survécut au règne de nombreux empereurs... A l'évidence, le héros fictionnel des films de 1964 et 2000 emprunte à chacun d'eux : à qui ses succès militaires, son éviction, ses complots, un mariage ou l'éventualité d'un mariage avec... Lucilla ou Faustina, à qui encore sa familiarité de confident de Marc Aurèle.

Le complot
On s'interroge encore à propos du manque de perspicacité du philosophe-empereur Marc Aurèle, qui rompit avec la règle d'adoption des Antonins. De là à imaginer un complot... quelle aubaine pour les scénaristes ! Dans l'uchronie cinématographique, Marc Aurèle ne meurt pas de la peste, mais assassiné avant d'avoir pu officialiser le choix d'un «dauphin», au détriment de Commode. C'était l'argument suivi par Anthony Mann en 1964, et il est repris sans discussion par Ridley Scott. La référence à Mann est d'autant plus évidente que dans les deux films Commode périt en gladiateur, dans l'arène, alors qu'en réalité il mourut dans son lit, étranglé par un esclave ancien gladiateur !

Voilà les éléments qui, retriturés par les scénaristes, vont donner sa trame au film : une spectaculaire bataille contre les Barbares, une femme amoureuse et un peu comploteuse (Lucilla), Maximus, qui échappe au glaive du centurion que Commode a chargé de son exécution, etc. Remontés dans le désordre, certaines données étant inversées, tous ces éléments historiques créent une uchronie, une histoire parallèle à la grande Histoire, qui se développe dans une autre dimension désormais, celle du «roman historique». C'est ainsi que disparaissent purement et simplement certains protagonistes de première grandeur, telle la concubine chrétienne de Commode, Marcia : ils n'ont jamais existé dans cette dimension parallèle. «Dans une autre Histoire», pour paraphraser Kipling !

L'honneur d'un capitaine
Quelques mois après la sortie du film de Ridley Scott, un documentaire consacré aux sous-marins nucléaires russes occupés à pourrir en rade de la mer de Barents - sinon dans ses profondeurs, comme le Koursk - s'achevait sur quelques phrases musicales empruntées à la B.O. du film (Arte - dimanche 19 novembre 2000). Le message subliminal passe bien. La musique de Hans Zimmer exprime la souffrance des soldats trahis, les éternels perdants de toutes les guerres - lesquelles ne seraient jamais que de simples opérations politiciennes, comme le rappelait si bien Clausewitz («La guerre est le prolongement de la politique»). Les harkis de la Guerre d'Algérie, abandonnés par la France ingrate... Les G.I.'s revenus du Viêt-nam, couverts de l'opprobre de la «sale guerre», désavoués par la Patrie qui les y avait envoyés...
Maximus ne rêvait que de cultiver sa terre, auprès de sa femme et de son fils. La guerre et son prolongement, la politique, lui ont tout pris, et il connaîtra toutes les déchéances avant que la mort le libère. La conclusion de Gladiator ? C'est Lucilla (Connie Nielsen) qui la tirera : «Rome mérite-t-elle la vie d'un homme si brave ? Nous l'avons cru autrefois. A vous de faire que nous puissions le croire encore ! (Temps. Impérative :) C'était un soldat de Rome. Honorez-le !»

 

gladiator - mort de maximus

«C'était un soldat de Rome. Honorez-le !»

Suite…

NOTES :

(1) Marc Aurèle et Lucius Verus étaient tous les deux, par adoption, fils d'Antonin le Pieux. - Retour texte

(2) P. GRIMAL, Marc Aurèle, Fayard, 1991, p. 205. - Retour texte

(3) Sirmich, ville de Pannonie II, au confluent de la Save (Savus) et du Bozzeut (Bacuntius)). - Retour texte

(4) «Douze années qui changèrent la face du monde», source perdue, pp. 60-62. - Retour texte

(5) C.C., La saison cinématographique 1964, pp. 59-60. - Retour texte

(6) Et C.C. d'ajouter : «Si les auteurs avaient eu, sous couvert de grand spectacle, l'intention d'élaborer quelque chose de sérieux [Kubrick avec des impératifs commerciaux semblables est bien parvenu à faire un Spartacus !]... Or il n'en est rien.» (Et d'énumérer quelques «erreurs» historiques.
A cette critique, il convient de faire remarquer deux choses :
1. Les impératifs commerciaux de Spartacus et de La chute... n'étaient pas les mêmes. Bronston a, avant tout, voulu faire du spectacle. A preuve le superbe décor du Forum dont on chercherait en vain l'équivalent dans Spartacus. Kirk Douglas, producteur de ce second film, avait pour principale préoccupation de «faire passer» un message politique. Rappelons que c'est également Anthony Mann qui avait commencé le tournage de Spartacus, et que K. Douglas le remplacera très rapidement par S. Kubrick, preuve de l'inadéquation intellectuelle des deux hommes;
2. Il resterait à démontrer que la conception marxiste du personnage de Spartacus (si mal connu historiquement), soit autre chose que du roman historique anachronique. - Retour texte

(7) C.C., La saison cinématographique 1964, pp. 59-60. - Retour texte

(8) A propos d'Odoacre mettant fin à l'Empire romain d'Occident en déposant le petit Romulus Augustule : voir le très romanesque La dernière légion de Doug Lefler (2006). - Retour texte

(9) G. BOWERSOCK, «De Gibbon à Gladiator - Les prophètes de la décadence», L'Histoire, n° 254, mai 2001. - Retour texte

(10) Ces inscriptions, qui sont - sans plus - censées donner un cachet d'authencité, ne font que se faire brièvement entrevoir lorsque l'on suit le film. Mais si vous vous sentez une âme d'épigraphiste, nous recommandons le documentaire Strength and Honor, qui occupe le DVD 2 de l'édition longue en trois disques, où certains plans les captent parfaitement et lisiblement. - Retour texte

(11) Quoique ces derniers... on y a échappé de peu : cf. les scènes coupées. - Retour texte

(12) Toutes reproduites dans J.-Cl. GOLVIN et Ch. LANDES, Amphithéâtres et Gladiateurs, C.N.R.S., 1990; ainsi que dans «Les amphithéâtres de la Gaule», Dossiers Histoire et Archéologie, n° 116, mai 1987. - Retour texte

(13) Comme le rappelle F. Fontaine dans ses Douze autres Césars. - Retour texte

(14) SFX, n° 83, juin 2000, p. XXVII. - Retour texte

(15) Pour les scènes de la vie privée, décorateurs et costumiers se sont également inspirés des toiles splendides d'Alma-Tadema [1836-1912]. - Retour texte

(16) Jacques Harmand les qualifie de trapézoïdaux ou subtrapézoïdaux (J. HARMAND, Vercingétorix, Fayard, 1984, p. 59). - Retour texte

(17) Ch. RENOUVIER, Uchronie. L'Utopie dans l'Histoire (1876), rééd. Fayard, coll. Corpus des œuvres de philosophie en langue française, 1988; cf. aussi : Eric B. HENRIET, L'Histoire revisitée. Panorama de l'Uchronie sous toutes ses formes, Amiens, Ed. Encrage, 1999. - Retour texte

(18) Hist. Aug., coll. Bouquins, pp. 187-191. - Retour texte

(19) Plus tard, Commode fera brûler vifs sa femme et ses enfants. Le scénariste de Gladiator semble s'en être souvenu. - Retour texte

(20) De 1888 à 1998, quatre romans couvrent un siècle d'histoire britannique revisitée... au vitriol - des premiers mouvements socialistes à l'apothéose du conservatisme thatchérien ! - le vampirisme étant à lire selon différents niveaux, notamment comme métaphore socio-politique. - Retour texte