site peplums
 
logo peplums

De La Chute de l'Empire romain
à Gladiator

Page 10/16

 

Pages précédentes :

De La Chute de l'Empire romain à Gladiator

I — VOIES PARALLÈLES

1. Introduction

2. Deux films

3. A propos de La Chute de l'Empire romain

4. A propos de Gladiator

II — LES PROTAGONISTES

5. Les protagonistes historiques

6. Les protagonistes cinématographiques

Conclusion

III — ANNEXES

7. A propos de la bataille contre les Germains dans Gladiator

8. A propos des combats de gladiateurs (1) :
De l'archéologie au mythe

9. A propos des combats de gladiateurs (2) :
Les gladiateurs au cinéma

 

Sur cette page :

10. Bibliographie historique

Orientation bibliographique
Romans historiques
Auteurs anciens
Auteurs modernes
Etudes modernes

IV — FICHES TECHNIQUES

11. La Chute de l'Empire romain

11.1. Fiche technique

Fiche artistique
Distribution
Notes
Discographie
Vidéographie

1. VHS
2. DVD simple
3. DVD coffret

11.2. Bibliographie
11.3. Scénario
11.4. L'intrigue (documentation de presse)
11.5. Les intentions des scénaristes (documentation de presse)
11.6. Le producteur : Samuel Bronston
11.7. Le réalisateur : Anthony Mann
11.8. Les lieux de tournage
11.9. Dialogues du film

11.9.1. Pax Romana
11.9.2. L'esclavage n'est pas rentable

Les discours du film
Fellows Roman

 

Pages suivantes :

11.10. Critiques
11.11. Analyse : De la Chute de l'Empire romain à la chute de l'«empire américain» (Nadine Siarri)
11.12. Sur le tournage (Henry-Jean Servat)

12. Gladiator

V — CHRONOLOGIE

13. Chronologie du déclin de l'Empire romain

VI — FILMOGRAPHIE

14. Filmographie des gladiateurs

 

10. Bibliographie historique

Orientation bibliographique
Pour remettre les pendules à l'heure, nos visiteurs se reporteront - bien sûr - aux bios de Marc Aurèle par Charles Parain (rééd. chez Complexe) et par Pierre Grimal (chez Fayard), sans oublier l'Histoire Auguste, rééditée chez Bouquins.

 
marc aurele - charles parain marc aurele - pierre grimal histoire auguste
 

Romans historiques
Epinglons plus spécialement les excellents romans de François Fontaine centrés sur les Antonins, en particulier à propos d'Avidius Cassius et de la Guerre des Marcomans, L'Usurpation, ou le roman de Marc Aurèle (Fayard, 1979) et, du point de vue de Pompeianus, second mari de Lucilla, D'Or et de Bronze - Les Mémoires de T. Pompeianus (Julliard, 1986), ainsi que, de Gilbert Sinoué, La Pourpre et l'Olivier (Orban, 1987), à propos de Marcia, la célèbre concubine chrétienne de Commode, et du futur seizième pape Calixte (217-222)...
Enfin, de François Fontaine encore, Douze autres Césars (Julliard, 1985) qui se présente, de Nerva à Alexandre-Sévère, comme une «reconstitution» des œuvres perdues de L. Marius Maximus.
Ces quatre romans donnent une idée de ce qu'on aurait pu faire sur cette période et dans le respect de l'histoire...

 
l'usurpation - françois fontaine mourir a selinonte - françois fontaine or et de bronze - françois fontaine
     
blandine de lyon - françois fontaine pourpre et olivier - gilbert sinoue
 

Dans Blandine de Lyon (Julliard, 1987), F. Fontaine retrace le martyre de sainte Blandine, en 177, sous Marc Aurèle. Et le même auteur, décidément intarissable sur les Antonins, raconte comment Hadrien succéda à Trajan dans Mourir à Sélinonte (Julliard, 1984; rééd. Presses Pocket, n° 2809, 1987 - avec annexes historiques de Cl. Aziza).

La novélisation de La Chute de l'Empire romain par Harry Whittington a été publiée chez Marabout (Géant, n° 205, 1964) à l'époque, et celle de Gladiator par Dewey Gram, chez J'Ai Lu (n° 5743).

 
chute empire romain - harry wittington gladiator - dewey gram
 
Auteurs anciens
  • Histoire Auguste (Suétone et les écrivains de l' -),
    [Recueil de six compilateurs : Ælius Lampridius, Ælius Spartianus, Flavius Vopiscus, Julius Capitolinus, Trebellius Pollion et Vulcacius Gallicanus]
    traduction Théophile Baudemart publiée sous la direction de M. Nisard, Paris, Firmin Didot [J.J. Dubochet et Cie], 1845;
  • Histoire Auguste (trad. A. CHASTAGNOL), Laffont, coll. «Bouquins», 1994, 1244 p.;
  • MARC AURÈLE, Pensées pour moi-même (suivies du Manuel d'Epictète et du Tableau de Cébès) (trad., introd. et notes de Mario Meunier), Garnier, 1960.
Pour Hérodien et Dion Cassius il n'existe - à notre connaissance - pas d'édition française disponible, on se référera donc aux éditions anglaises (Loeb Classical) ou allemandes (Teubner). Notons toutefois :
  • HÉRODIEN, Histoire romaine, traduction L. Halévy, Paris, 1887;
  • DION CASSIUS, Histoire romaine, traduction Gros & Boissée, 10 vols, Paris, 1870.
 

Auteurs modernes

  • Edward GIBBON, Histoire du déclin et de la chute de l'Empire romain (Decline And Fall of the Roman Empire, 1776),
    traduction de M.F. Guizot, 13 vols, Paris, 1812;
    Rééd. du précédent, 2 vols, Robert Laffont, coll. «Bouquins», 1983, 1.187 p. et 1.273 p.
De par sa réputation universelle, l'œuvre de Gibbon reste un «must» pour le grand public. Notons une réédition abrégée illustrée :
  • E. GIBBON, Décadence et chute de l'Empire romain (Londres, Bison Books, 1979), Paris, Fernand Nathan, 1981, 256 p.
Voir aussi :
  • MONTESQUIEU, Considérations sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence (1734), Olivier Orban, 1988.
 
Etudes modernes
  • Peter BROWN, Genèse de l'Antiquité tardive (trad. Aline Rousselle), Mayenne, N.R.F.-Gallimard, 1983, 195 p.;
  • A. CHASTAGNOL, La fin du monde antique, Paris, 1976, 383 p.;
  • P. CHAUNU, Histoire et décadence, Paris, 1981, 365 p.;
  • COLLECTIF, Gibbon et Rome à la lumière de l'historiographie moderne - Colloque, Genève, 1977, 264 p.;
  • Pierre GRIMAL, Marc Aurèle, Fayard, 1991, 449 p.;
  • Henri-Irénée MARROU, Décadence romaine ou antiquité tardive ? (IIIe-IVe s.), Seuil, coll. Points-Histoire, n° H 29, 1977;
  • Henri-Irénée MARROU, Christiana tempora, Rome, 1978, pp. 3-85;
  • J.-P. MARTIN, Le siècle des Antonins, Paris, P.U.F., coll. Documents histoire, n° 20, 1977;
  • S. MAZZARINO, La fin du monde antique, Paris, 1973, 210 p.;
  • Charles PARAIN, Marc Aurèle (1957), Bruxelles, Editions Complexe, 1982, 217 p.;
  • Lucien MUSSET, Les invasions. Les vagues germaniques, P.U.F., coll. «Nouvelle Clio - L'histoire et ses problèmes», n° 12, 1965, 329 p.;
  • P. PETIT, La Paix romaine, Paris, P.U.F., coll. Nouvelle Clio, n° 9, 1971;
  • P. PETIT, Histoire générale de l'Empire romain, Paris, Le Seuil, coll. Points-Histoire, 1974, vol. 2, 254 p. - vol. 3, 287 p.;
  • André PIGANIOL, Le sac de Rome - Le mémorial des siècles, Albin Michel, 1964; rééd. La chute de l'Empire romain - Le mémorial des siècles, Marabout Université, n° MU 379, 1982;
  • R. REMONDON, La crise de l'empire romain, de Marc Aurèle à Anastase, Paris, 1970, 363 p.;
  • Pierre RICHE & Philippe LE MAÎTRE, Les invasions barbares (1953), P.U.F., Que sais-je ?, n° 556, rééd. 1983.
 

IV - FICHES TECHNIQUES

11. La Chute de l'Empire romain

11.1. Fiche technique

Chute de l'Empire romain (La)
Chute de l'Empire romain (La) [FR]
Chute de l'Empire romain (La) [BE]

Etats-Unis, 1963

Fall of the Roman Empire (The) [EU]
Caduta dell'Impero Romano (La) [IT]
Fall of the Roman Empire (The) [EU]
Fall of the Roman Empire (The) [GB]
Untergang des Römischen Reiches (Der) [AL]
Caida del Imperio Romano (La) [SP]

Prod. : Samuel Bronston (Madrid) - Rank / Technicolor / 35 mm Ultra-Panavision (Technirama [1]) / 4.595 m / 188' (EU) [ou 180', 185' ?] [copyright : 153'] - 179' (FR) [puis 150'] - 135' (SP)

Fiche technique
Réal. : Anthony MANN; Scén. : Ben BARZMAN, Basilio FRANCHINA & Philip YORDAN; Images : Robert KRASKER, B.S.C.; Camera : John HARRIS; Camera 2e éq. : Cecilio PANIAGUA; Prod. : Samuel BRONSTON; Prod. assoc. exéc. : Michael WASZYNSKI; Prod. assoc. : Jaime PRADES; Dir. prod. : C.O. ERICKSON; 1er assist. réal. 1ère éq. : José Lopez RODERO; Script-girl : Elayne SCHREYECK; Répétiteur des dialogues : George TYNE; Dir. opérations 2e éq. : Andrew MARTON; Dir. 2e éq. : Yakima CANUTT; 1er assist. réal. 2e éq. : José Maria OCHOA; Chef de la figuration : Maude SPECTOR; Montage : Robert LAWRENCE; Décors : Veniero COLASANTI & John MOORE; Conseiller technique & historique : Dr Will DURANT; Fresques : Maciek PIOTROWSKI; Directrice de l'habillement : Gloria MUSETTA; Costumes : CERATELLI & PERUZZI (Italie); Coiff. : Grazia DI (DE) ROSSI; Maq. : Mario VAN RIEL; Ing. son : David HILDYARD (Westrex); Ing. son studio : Gordon K. MCCALLUM; Montage effets son. : Milton BURROW; Montage musique : Leon BIRNBAUM; Aide monteuse : Magdalena PARADELL; Effets spéc. : Alex WELDON; Chef accessoiriste : Stanley DETLIE; Superv. techn. (chef machiniste) : Carl GIBSON; Chef électricien : Bruno PASQUALINI; Musique : Dimitri TIOMKIN.

chute empire romain
 

Fiche artistique
Sophia LOREN (Lucilla [VF : Antonia]) - Stephen BOYD (Gaius Livius Metellus) - Alec GUINNESS (Marc Aurèle) - James MASON (Timonidès) - Christopher PLUMMER (Commode) - Anthony QUAYLE (Verulus, gladiateur) - John IRELAND (Ballomar, chef des Barbares) - Mel FERRER (Cléandre, courtisan aveugle) - Omar SHARIF (Sohamus, roi d'Arménie) - Eric PORTER (Julianus, patricien ami de Commode) - Douglas WILMER (Niger, patricien ami de Commode) - Peter DAMON (Claudius, patricien ami de Commode) - Andrew KEIR (Polybius, tribun ami de Livius) - George MURCELL (Victorinus, tribun ami de Livius) - Lena VON MARTENS (Helva, princesse des Barbares) - Gabriella LICUDI (Tauna, une jeune barbare) - Rafael Luis CALVO (Lentulus, guide de Cléandre) - Normann WOOLAND (Virgilianus, proconsul d'Egypte) - Virgilio TEXERA (Marcellus, gouverneur de Syrie) - Michael GWYNN (Cornelius, préfet du prétoire) - Guy ROLFE (Marius, sénateur) - Finlay CURRIE (Cæcina, sénateur).

DISTRIBUTION
INT/ J. Arthur Rank (The Rank Organisation)
AL/ Rééd. Avco Embassy - 20th Fox
BE/ Rank; puis Excelsior
EU/ Paramount Pictures (sortie à New York, 25 mars 1964)
Rééd. Joseph E. Levine & Avco Embassy
FR/ Rank (sortie en France, 30 avril 1964). Le 29 avril 1964, inaugure - hors compétition - le XVIIe Festival cinématographique de Cannes. Rééd. '80 : Argos Films
SP/ Globe Film S.A.

NOTES
Tourné aux studios Samuel Bronston, Madrid.
Copyright 1964 par Bronston-Roma Productions - Tous droits réservés - Approuvé par certificat MPAA, n° 20602.

Post synchronisation française
LINGUA SYNCHRONE - Réal: Richard HEINZ.
Texte de Max MORISE, supervisé par Philippe ERLANGER [Ph. Erlanger : historien français, directeur des échanges artistiques au Ministère des Affaires étrangères] - Enregistré à l'Auditorium Jean Mermoz par Louis KIEFFER.
Voix : William SABATIER - Jean-Claude MICHEL - Gérard FERAT - Nathalie NERVAL - René ARRIEU - Pierre ASSO - Jacques BERLIOZ.

DISCOGRAPHIE
The Fall of the Roman Empire, B.O. 33t LP, réf. CBS 62.277; P. 1964.-
Musique composée et dirigée par Dimitri Tiomkin, à la tête du Symphony Orchestra of 110 of England's Finest Musicians.
Réédition dans le coffret «Dimitri Tiomkin», réf. CBS 66.604 (6 disques 33t : The Fall of the Roman Empire, 55 Days at Peking, The Alamo, The Guns of Navarone, The Old Man and the Sea, Wild is the Wind); P. ca 1980, réf. CBS 83.119.

FILMOGRAPHIE
Pas d'extraits en Super.8 (?).
Existe toutefois une version complète sur disque laser.

VIDÉOGRAPHIE
1. VHS : La chute de l'Empire romain, Hollywood Video.

2. DVD : La chute de l'Empire romain, Opening Edition, réf. 786148, 19/9 compatible 4/3, 170'. Reprise chez Fabbri.

3. DVD : Edition collector 3 DVD : Le Cid - La chute de l'Empire romain - Les coulisses des films (bonus)
Editeur : Opening Video.

  • Le Cid - Format : 2.35 Cinémascope - 16/9 compatible 4/3 - Langues : français mono, anglais stéréo - s/t fr - Film annonce - 177'. DVD 9
  • La chute de l'Empire romain - Format : 2.35 Cinémascope - 16/9 compatible 4/3 - Langues : français mono, anglais stéréo - s/t fr - Film annonce - 172'. DVD 9
  • Bonus : Les coulisses des films
    La chute de l'Empire romain - Rome in Madrid (Making of) (VO s/t fr) (10') - L'analyse de Jean Douchet (30') - Requiem (interview Claude Aziza - réal. : Noël Simsolo) (43') - Le Cid - Le Médiateur (interview Pierre-Henry Deleau) (36') - Filmographie de Anthony Mann.
 

11.2. Bibliographie

Presse

  • Esteban MARQUEZ, «De grands acteurs vivent en Espagne, dans la neige et le froid - La chute de l'Empire romain», Ciné Revue, n° 5, 1963, p. 23;
  • J. VAN COTTOM, interview de Samuel Bronston et Anthony Mann, Ciné-Presse, n° 19, 11 mai 1963;
  • J. VAN COTTOM, «Sophia Loren - Grande vedette de La chute de l'Empire romain», Ciné Revue, n° 20, 16 mai 1963, pp. 17-22;
  • «Omar Shariff - Le Forum de La chute de l'Empire romain», Ciné Revue, n° 22, 1963, p. 19;
  • J. VAN COTTOM, «Stephen Boyd : La femme étant la femme, l'homme peut-il vraiment la comprendre ?», Ciné Revue, n° 23, 6 juin 1963, pp. 16-17;
  • Roland FOUGÈRES, «Dimitri Tiomkin, le plus célèbre compositeur du cinéma, rêve à une musique vivante pour La chute de l'Empire romain», Ciné Revue, n° 44, 1963, pp. 30-31;
  • Roland FOUGÈRES raconte La chute de l'Empire romain, Ciné Revue, n° 11, 1964, pp. 20-31;
  • Jacques MONTFORT, «Trois heures d'enchantement visuel», Ciné Revue, n° 41, 1964, pp. 6 et 7;
  • Kinematograph Weekly, 16 mars 1964;
  • La saison cinématographique 1964, pp. 59-60;
  • «La chute de l'Empire romain. De fabuleux destins ballottés entre le pouvoir et l'amour» (film raconté), Ciné Revue Magazine, Hors Série, n° 1A, janvier 1979, pp. 24-31;
  • Henry-Jean SERVAT, Secrets de tournages, Le Pré aux Clercs, 2001, pp. 122-133.
 
Novélisation
  • Harry WITTINGTON, The Fall of the Roman Empire, A Gold Metal Book, février 1964, n° 701; rééd., n° d1385;
    Harry WITTINGTON, La chute de l'Empire romain (trad. Denyse et Henri Fagne), Bibliothèque Marabout Géant, n° 205, 1964; 278 p. [La traduction française contient un commentaire historique de D. Charlan].
 
Programme souvenir
En Belgique il en existe au moins trois différents :
  • Le programme du gala organisé par la F.N.A.P.G. avec la participation de la chanteuse Dalida [couverture noir et blanc et orange];
  • Le programme-souvenir, imprimé en France, adaptation française du Kine Weekly par Monique Abelleira [couverture couleur];
  • Le programme The Fall of the Roman Empire [tiré-à-part du «film raconté» de Bonnes Soirées, 16 p., sous couverture crème, impression brune].
 
War Game
Ne fait pas partie du merchandising du film, mais serait à mettre en parallèle avec l'œuvre d'Edward Gibbon :
  • Terence DONNELLY, Decline and Fall of the Roman Empire, Ariel (Edson Printers Ltd, Watford, Herts, GB), (1972) 1977. Avec notice française.
 

11.3. Scénario

En 180 de n.E., l'Empire romain est à l'apogée de sa gloire. L'empereur Marc Aurèle a donné rendez-vous aux gouverneurs, princes et rois de l'Empire dans un fort perché (Vindobona [Vienne] ?) sur les pentes enneigées des chaînes de montagnes situées dans le nord, sur le Danube.

Il désire solliciter leur aide afin de pouvoir réaliser la Pax Romana dont l'empereur Auguste posa les premiers jalons.
Seules deux frontières restent hostiles à Rome : celles de la Perse, à l'est; celles du Barbaricum, au septentrion.

Parmi les arrivants se trouvent Livius Gaius Metellus - un tribun militaire qui fut élevé par l'empereur comme son fils - et le roi des Arméniens, Sohamus qui, lui, aspire à obtenir la main de Lucilla, la fille de Marc Aurèle.

Son fils Commode s'intéressant beaucoup plus aux plaisirs qu'à l'avenir de l'Empire, l'empereur décide que Livius sera son successeur. Il a fait part de ses projets à ce dernier en présence de Lucilla. Ces propos sont malheureusement entendus par Cléandre, l'haruspice aveugle - mais pas sourd - de la Cour. Sans perdre un instant, Cléandre et le clan des courtisans de Commode complotent la mort de César, qu'il faut empêcher d'officialiser sa décision.

Sur ces entrefaites arrive de Rome Commode, accompagné de son ami Verulus et d'une cohorte de gladiateurs déguisés en légionnaires. Courageux mais cruel, le fils dilettante de l'empereur est bien décidé à participer aux opérations militaires avec cette étrange «troupe».
Très indécis - car Commode est son ami, presque son frère - Livius informe le fils de Marc Aurèle des intentions de son père. Froissé, Commode prend Livius pour un habile intrigant et lui répond par d'amers sarcasmes.

Plus habitués à parader et à mourir dans l'arène sous les vivats de la foule, qu'à l'ingrate besogne du légionnaire dans la forêt obscure des Barbares, les gladiateurs lâchent le terrain et compromettent la stratégie romaine. Livius est contraint de laisser échapper les Barbares pour voler au secours de Commode.

Pour la punir de sa lâcheté, Livius décide de décimer la cohorte des gladiateurs. Mais Commode le somme d'arrêter la punition. Les deux hommes s'affrontent dans un duel-course de chars sur les routes raides et escarpées de la montagne. Les traits du char de Livius se rompent, et celui-ci a tout juste le temps de sauter dans celui de Commode, pendant que le sien se fracasse sur les rochers.
Leur folle course s'étant ainsi achevée, ils en viennent aux mains, et leur affrontement se s'arrête que par l'interruption d'un détachement romain.

Malgré le grand amour que Lucilla éprouve pour Livius, elle accepte, à la demande de son père, de se soumettre à la raison d'Etat et d'épouser Sohamus. Marc Aurèle pense ainsi démontrer au monde la valeur qu'il attache à ses frontières de l'Est. Livius supplie Lucilla de partir avec lui mais, au même moment, arrive une dépêche urgente du quartier général de l'empereur les priant de s'y rendre immédiatement. Ils y arrivent juste à temps pour assister au dernier soupir de Marc Aurèle empoisonné par une pomme que lui a offert Cléandre.
Trop faible pour pouvoir dire ce qu'il souhaite, il meurt en murmurant seulement le nom de «Livius».
Aucun document ne prouvant que César avait désigné Livius comme son successeur, le tribun décide d'éviter la discorde politique et renonce à des droits qu'il ne peut établir. Il proclame lui-même Commode empereur. En reconnaissance de sa soumission, Commode le nomme commandant en chef de toutes les légions de l'Empire. Lucilla, quant à elle, doit se résigner à obéir aux dernières volontés de son père et épouse Sohamus.
Timonidès, un philosophe grec ardent partisan des idées de Marc Aurèle, croit comme le défunt empereur que l'amour peut surmonter la haine. Il tente d'amener les prisonniers marcomans à ces conceptions. Supplicié par leur chef Ballomar, qui lui brûle la main, le courage du stoïcien ébranle la férocité des barbares - qui détruisent l'idole de leur dieu Wotan.

timonides et ballomar

Lucilla retourne à Rome afin de prévenir Commode d'une rébellion qui se fomente en Orient, suite aux taxes excessives qu'il impose aux populations. (Taxes dont l'unique objet est de financer ses plaisirs extravagants, à Rome.)
Sous le conseil pressant de Lucilla, Livius demande au sénat l'autorisation pour les Barbares de s'installer sur le territoire fertile de l'Empire. Touché par le vibrant discours de Timonidès, le sénat lui accorde son soutien. Les Marcomans seront autorisés à se fixer en Italie, à Ravenne. Furieux, Commode empêchera désormais les amants de se revoir. Lucilla est renvoyée chez son mari en Arménie, et Livius aux frontières orientales.
Appuyés par les Parthes, les Arméniens se révoltent contre Rome; plus grave : ils sont soutenus par les Légions d'Orient (Syrie et Egypte). [Floue allusion du film à la rébellion d'Avidius Cassius en 175, sous Marc Aurèle ?]
Livius est chargé de liquider cette révolte. Il arrive non sans mal à convaincre les légions rebelles qu'elles sont en réalité manipulées par les Parthes ennemis. En échange de sa promesse de plaider la cause des Provinces d'Orient pressurées, Livius retourne la situation. Les Romains réconciliés écrasent les Parthes et les Arméniens; Livius affronte Sohamus et le tient bientôt à sa merci, mais un javelot lancé par un légionnaire étend raide mort le roi arménien. Ayant retrouvé Lucilla, le général vainqueur éconduit les émissaires de Commode venus lui promettre les plus hautes faveurs en échange d'une répression aveugle et cruelle contre les provinces repenties. Livius les renvoie à Rome, enchaînés dans des cages à fauves.

livius - sohamus

Les légions de Livius, Polybius et Victorinus réunies marchent sur Rome. En Italie, elles découvrent le village marcoman exterminé par ordre de Commode, et Timonidès mourant.
Les légions s'arrêtent aux portes de Rome. Livius entre seul dans la ville, pour une ultime tentative de raisonner l'Empereur. Dans le Temple de Jupiter Capitolin, il trouve Commode - l'esprit complètement dérangé - prétendant tenir une conversation avec les dieux. Il les entend se rire des conseils de Livius ! L'officier est arrêté. Quand à ses légionnaires, Commode n'a d'autre ressource que de les acheter au poids de l'or. L'honnête Polybius est abattu, tandis que Victorinus, étouffant ses scrupules, accepte les sesterces.
C'est la débâcle. Lucilla essaye d'assassiner son impérial dément de frère. Démasquée elle est condamnée à périr sur le bûcher dressé sur le Forum, où doivent ainsi brûler - holocauste au dieu Commode - des captifs barbares et des sénateurs opposants. [Allusion du film à l'audacieux rebelle gaulois Maternus, qui - ses bandes anéanties - s'était introduit dans le Palais dans le but de poignarder Commode ?]

Ayant imprudemment avoué à Lucilla sa liaison avec leur mère Faustine et revendiqué la paternité de Commode, le gladiateur Verulus est assassiné par l'empereur qui ne peut souffrir l'idée de son illégitimité.

commode - verulus

Commode défie Livius en duel, sur le Forum, afin de démontrer au peuple que ses victoires passées dans l'arène étaient le fruit de sa vaillance, non de la complaisance de ses amis gladiateurs.
Au terme d'un âpre duel livré dans le quadrilatère délimité par les boucliers des prétoriens, Livius tue l'«empereur-gladiateur» et délivre Lucilla de justesse, cependant que les autres condamnés périssent dans les flammes. Toutefois le héros vainqueur refuse le trône impérial et s'éloigne avec la femme qu'il aime, cependant que l'Empire est mis aux enchères...

 

11.4. L'intrigue (documentation de presse)

«Il n'est jamais agréable pour un père de devoir admettre l'indignité de son fils. Encore ce père doit-il savoir prendre ses responsabilités, et à plus forte raison lorsqu'elles engagent tout un empire. C'est donc le cœur labouré, mais la voix claire, qu'en présence de sa fille Lucilla, Marc Aurèle informa de ses décisions le jeune et brillant tribun Livius que ce serait lui, Livius, et non son fils Commode, qu'il chargeait de l'écrasante succession de son empire ! Très digne, Lucilla écouta sans broncher ces quelques mots qui entravaient son avenir; de très tendre sentiments l'unissaient à Livius, qui le lui rendait bien. Et elle pressentait obscurément combien les charges de l'empire allaient peser sur leur amour naissant.
Sinistre pressentiment qu'un fait apparemment anodin allait s'empresser de confirmer. A l'issue de cet entretien si lourd d'importance, Lucilla et Livius se heurtèrent au fourbe Cléandre, prophète aveugle et âme damnée de Commode. De ses yeux morts jaillissaient des éclairs de haine et de violence sur lesquels Lucilla ne se méprit point. Cléandre, de toute évidence, avait éventé le secret des décisions de Marc Aurèle. Et de ce Cléandre, Lucilla savait qu'il n'y avait pas moins à redouter que de la malédiction de tous les dieux !
Quelques jours passèrent pourtant, sans raviver les appréhensions de Lucilla. Livius avait rejoint ses troupes et dirigé une expédition punitive contre une tribu barbare plus turbulente que permis. Malheureusement, cette modeste opération avait failli tourner à la confusion de Rome en raison de l'intervention intempestive de Commode, soudain soucieux de glaner quelques faciles lauriers de stratège. Excédé, Livius le provoqua en un combat singulier : une course de chars effrénée dont le vainqueur devrait précipiter le vaincu du haut d'un rocher. Comment allait se terminer cette course implacable, et pas toujours très régulière de la part de Commode ? ... Le mieux du monde ! En fait, Commode était trop éprouvé par sa vie de débauches pour prendre le meilleur sur un Livius rompu à toutes les disciplines sportives. Longtemps indécise, la course finit par donner l'avantage à Livius. Mais, ivre de rage, Commode se tendit en un effort désespéré qui l'amena à deux doigts de sa perte; au moment même où son char déséquilibré, s'abîmait dans le vide, Livius le rattrapa, le sauvant ainsi de la mort.
Convaincu de s'être acquis la gratitude éternelle de Commode, Livius a rejoint Lucilla, qu'il informe des récents événements. Lucilla, hélas ! n'a pas le cœur à rire. Ainsi qu'elle le redoutait, son chemin va s'écarter à jamais de celui de Livius : Marc Aurèle vient en effet d'accorder sa main à Sohamus, le roi d'Arménie. D'abord effondré, Livius reprend vite le dessus et presse Lucilla de s'enfuir avec lui loin des intrigues de l'Empire. Que pèsent la gloire et les honneurs à côté de toute une vie de bonheur à deux ?

Peut-être Livius serait-il parvenu à convaincre Lucilla s'il n'avait été interrompu par la plus tragique des nouvelles : Marc Aurèle agonisait. Ah ! ce n'était pas pour rien que Lucilla s'était méfiée de Cléandre ! Profitant de ses petites entrées chez l'Empereur, le prophète de malheur lui avait offert une pomme empoisonnée. Lucilla et Livius, atterrés, assistent en ses derniers instants l'Empereur, qui use ses derniers souffles à chuchoter le nom de Livius.
Mais aucun testament, aucun document officiel n'existe pour attester que Livius, et non pas Commode, est bien l'héritier désigné par l'infortuné Marc Aurèle. Rien ne s'oppose à l'accession de Commode au trône de l'Empire, même pas Livius, qui renonce sans lutte ni amertume à ses ambitions légitimes. Commode se fait donc proclamer empereur. Sur une flamme sacrée, Livius lui prête serment de loyalisme et, en échange, se voit promu général en chef des armées romaines.
Lucilla, pour sa part, cache mal le désenchantement que lui inflige le renoncement de Livius. Fille d'empereur, il lui est déjà difficile d'admettre son indifférence vis-à-vis du trône ! En outre, elle le juge sévèrement pour son inertie à faire respecter les dernières volontés de Marc Aurèle. Pour elle, la raison d'Etat prime toutes les autres, y compris celles du cœur ! Elle le prouve en épousant l'homme que son père lui avait désigné : Sohamus. Rarement vit-on épousée aussi lugubre, mais rarement aussi femme eut autant qu'elle le sentiment du devoir accompli. Plaise aux dieux qu'elle en doive jamais le regretter !

Et la vie continue ! Pour oublier ses peines de cœur, Livius s'est jeté à corps perdu dans ses nouvelles responsabilités de général en chef. N'ayant jamais admis la demi-défaite que lui avaient infligée les barbares et bien que sachant parfaitement que Commode en était le vrai responsable, il décide une nouvelle expédition punitive. Oublieux de toute pitié comme de la plus élémentaire humanité, il les traque dans leurs derniers retranchements, décime leurs rangs et s'empare de leur chef Ballomar.
Mais en Livius, la bonté et la générosité ne se sont qu'assoupies ! Timonidès l'a bien compris, qui, en philosophe et ardent supporter des idées généreuses de Marc Aurèle, croit, tout comme ce dernier, que l'amour peut triompher de la haine. Son vibrant plaidoyer en faveur des barbares hirsutes et sidérés par tant de générosité ébranle Livius, qui promet d'intervenir près de l'Empereur pour leur assurer la paix.
Ce que Livius ignore, c'est que Commode incline moins que jamais à l'indulgence en ce moment où les ennuis affluent de tous côtés. Ainsi Lucilla est-elle rentrée à Rome pour l'informer de ce qu'une rébellion se fomente à l'Est, à la suite des taxes excessives imposées au peuple. Au vrai, si Lucilla s'est faite elle-même messagère d'aussi mauvaises nouvelles, c'est moins dans le désir de revoir son frère que dans l'espoir de retrouver Livius, que toute sa volonté n'a nullement réussi à effacer de son cœur.
Et effectivement, les deux amoureux séparés se retrouveront, mais pas tout à fait comme ils l'avaient rêvé. Tandis que Commode enjoint à Lucilla de retourner en Arménie, il ordonne à Livius d'aller écraser des régiments romains félons qui, à la frontière de l'Est, ont rejoint les forces rebelles avec l'intention non déguisée d'envahir Rome et de le contraindre, lui, Commode, à l'abdication.

chute empire romain

Malgré sa répugnance à opposer des Romains à d'autres Romains, Livius accepte. Il n'a d'ailleurs pas le choix ! Dans les plaines de l'Est, il rencontre donc les armées de Sohamus, bien décidé à s'alléger une fois pour toutes de l'écrasante tutelle romaine. Une fois de plus, Lucilla supplie Livius de se joindre à eux afin de détruire ensemble la néfaste autorité de Commode. Livius refuse, et le combat s'engage, terriblement inégal, entre les troupes minoritaires de Livius et toute l'armée de Sohamus...
Bien qu'inégal, l'affrontement évolue très vite en faveur de Livius, dont les extraordinaires talents de stratège n'ont jamais trouvé à mieux s'employer. Bientôt, la vaste plaine ne constitue plus qu'un gigantesque brasier où viennent s'abîmer les hordes arméniennes.

chute empire romain

Livius n'est pas le dernier à la peine. Pour lui, il s'agit surtout de s'emparer de Sohamus, seul moyen de mettre un terme à ce combat sanguinaire. A peine l'a-t-il rejoint qu'un javelot le frôle et cloue son adversaire au sol ! Mais Lucilla, abusée par les apparences, pourra-t-elle jamais croire que ce n'est pas lui qui a tué son mari ?
Ainsi que Livius s'y attendait, Lucilla ne lui pardonne pas la mort d'un époux qu'elle n'aimait guère, sans doute, mais auquel l'unissaient les profonds liens de sa loyauté. En la ramenant vers Rome, Livius lui multiplie les prévenances, s'efforçant de lézarder le mur de silence qu'elle lui oppose. En pure perte.
C'est en quelque sorte Commode qui favorisa leur réconciliation. Ayant évidemment appris la victoire aussi brillante qu'inespérée de Livius sur les rebelles, il lui avait fait parvenir une dépêche par laquelle il s'engageait à partager le trône de Rome avec lui. C'était compter sans Livius, qui ne se contenta même pas de refuser : il lui répondit aussi qu'il devait y avoir une nouvelle Rome, dirigée par un nouvel empereur.
Cette insolence mit Commode dans une rage indescriptible. Pour l'assouvir, il ne trouva rien de mieux que de charger ses gardes de saccager le village barbare et de ramener Ballomar et son peuple à Rome, pour y être brûlés vifs. C'est en effet Livius, on s'en souvient, qui avait intercédé pour la grâce des barbares. Timonidès, ici agonisant, essaya bien d'entraver le massacre qui se préparait, mais il le paya de sa vie. Avec lui, c'est un peu du bon Marc Aurèle qui mourut une seconde fois !
C'est ainsi qu'approchant de Rome, Lucilla et Livius trouvent en cendres le village barbare qu'ils avaient toutes raisons de croire ami. Tant de fourberie leur donne la nausée. Tout au moins cette cruauté installe-t-elle en Livius la volonté inébranlable d'en finir une fois pour toutes avec Commode !
Abandonnant Lucilla aux portes de Rome pour lui éviter des risques inutiles, Livius pénètre dans la ville, tout entière livrée aux sauvages festivité des Saturnales. Livius affronte Commode dans le Temple de Jupiter et somme le Sénat de décréter quelle Rome, celle de Marc Aurèle ou celle de Commode, présidera aux destinées de l'Empire. Le Sénat prend le parti de Commode.
Aux portes de Rome, c'est l'anarchie totale. Pressentant que Livius ne se tiendra pas pour battu et tentera un coup d'Etat avec l'appui de ses légions, Commode leur a envoyé des chariots remplis d'or, sur lesquelles les soldats se ruent avec l'avidité que l'on imagine. C'est bien en vain que Lucilla tâche de faire entendre la voix de la raison. Ne pourra-t-elle rien tenter pour endiguer l'imminente catastrophe ?
Si pourtant ! Lucilla puise en son courage et en son amour la force de prendre sur elle tous les risques. Elle a réuni à grand-peine quelques soldats d'une loyauté à toute épreuve; avec eux, sur son char, elle fend la foule romaine en direction du Palais Impérial. Sa décision est prise : elle tuera Commode de ses mains. Mais Livius est-il encore en vie ?
Il l'est, mais pas pour longtemps. Un gigantesque bûcher barre tout le Forum; les barbares y sont enchaînés, et Lucilla s'affole d'y reconnaître Livius, ligoté lui aussi et prêt à être brûlé vif sur les ordres de Commode. N'écoutant que la voix de son cœur, Lucilla se rue vers Livius... pour bientôt se retrouver sur le bûcher, enchaînée à ses côtés. La victoire de Commode semble totale.
Pourtant un scrupule inattendu vient d'assaillir Commode. En fait, il s'agit moins d'un scrupule que d'un souci, vital pour lui, de bien reprendre son peuple en mains. Il suggère alors à Livius un combat singulier, qui permettra aux dieux de désigner celui qui doit dicter sa loi à Rome.

chute empire romain

Bien que rompu par toutes les épreuves qu'il vient de traverser, Livius accepte, et en plein Forum, dans une sorte de ring formé par des boucliers, un terrible duel s'engage entre les deux hommes. Un duel qui ne pourra prendre fin que par la mort de l'un des combattants. Sur le bûcher, Lucilla assiste, éperdue, au combat. Dans ce furieux quitte ou double, Commode est moins que jamais soucieux de la régularité de ses attaques.

commode - livius

Un coup bas lui permet de désarmer Livius, lequel rassemble ses pauvres forces en un effort surhumain... Un moment plus tard, Commode gît sur le sol, le corps transpercé d'un javelot. Livius ne prend même pas le temps de savourer sa victoire : il se rue vers le bûcher que l'on vient d'embraser, et c'est d'extrême justesse qu'il arrache aux flammes Lucilla. Les barbares, hélas ! doivent être abandonnés à leur sort. Et tandis qu'une âcre odeur de chair brûlée envahit le Forum, Livius prend dans ses bras le cadavre du responsable de cet odieux massacre. Il en fera volontiers cadeau à Rome, au Sénat, aux dieux, à quiconque le réclamera... Mais personne (et surtout pas Rome) ne revendique la dépouille de celui qui l'amena si près de sa perte.

commode - livius

Quant à Lucilla et Livius, ils en ont assez de Rome, de ses cruautés, de ses intrigues et de ses ignominies. Il n'est pas nécessaire de régner sur un empire pour vivre parfaitement heureux; il suffit d'être à deux, de s'aimer vraiment et de régner l'un sur l'autre plus sûrement que sur un royaume ! Cette sagesse-là, Lucilla et Livius ont mis du temps à la comprendre, mais ils n'en sont que mieux décidés à l'appliquer. Fi de Rome, des honneurs et des ennuis ! Désormais ils ne vivront plus que pour leur amour, cachés de tous et de tout. Rome survivra bien sans eux. Si tant est, bien sûr, qu'elle soit appelée à survivre. En fait, pour elle, c'était le commencement de la fin. La chute de l'Empire romain.»

programme (Bonnes Soirées, tiré-à-part)

 

11.5. Les intentions des scénaristes (documentation de presse)

La période de civilisation la plus heureuse et la plus prospère pour l'humanité se situe au IIe s., à l'époque où l'Empire romain s'étendait de la Grande-Bretagne à l'Arabie et de l'Espagne à la Turquie, avec à l'épicentre la merveilleuse cité de Rome. Cet empire puissant et respecté est resté jusqu'à ce jour le seul dans toute l'histoire qui ait pu conquérir le monde entier, tout au moins celui connu à cette époque.
Les classes de la Société y formaient un ensemble harmonieux qui fit l'admiration des philosophes, des historiens, de ses sujets et même de ses ennemis. Rome semblait éternelle lorsque l'Empereur Marc Aurèle mourut et fut remplacé par Commode, un homme dont les folies et la passion du pouvoir entraînèrent, après douze années d'infamies croissantes, la disparition des dernières vertus qui avaient fait sa grandeur, et provoquèrent sa chute.
Cette page d'histoire répétée maintes et maintes fois et même encore de nos jours, se renouvellera sans doute jusqu'à la fin des temps. Cependant la chute de l'Empire romain fut à une telle échelle qu'elle n'a jamais été dépassée. Le cinéma mondial attendait depuis longtemps ce récit, le plus passionnant qui puisse être raconté; cependant aucun producteur n'avait tenté jusqu'ici de porter à l'écran un sujet aussi vaste.
Mais Samuel Bronston, encouragé par le succès de ses célèbres productions
Le Cid et Les 55 Jours de Pékin, décida que ce sujet pouvait être filmé, et pour cela il a employé une telle richesse de moyens qu'il s'est lui-même surpassé.
Pour
La chute de l'Empire romain les décorateurs Colosanti et Moore ont recréé grandeur nature le Forum tel qu'il existait il y a dix-huit cents ans. Fidèle à l'histoire dans chaque détail, c'est le plus grand décor qui ait jamais été construit pour un film, à aucune époque, dans le monde entier. Il couvre cent hectares de la campagne espagnole et de nombreuses scènes d'intérieur ont été tournées dans les vastes studios de Samuel Bronston à Madrid et de Cinecittà à Rome.
Pour la mise en scène d'un film de cette importance, le producteur Samuel Bronston a fait appel à Anthony Mann dont la réalisation du film Le Cid fut acclamée par tous. Il est passé maître dans l'art de diriger le déploiement des grandes scènes de batailles, mais il a aussi la sensibilité nécessaire pour rendre l'atmosphère des scènes d'amour et de drame.
La musique faisant partie intégrante d'un grand film, la partition de ce film a été composée par Dimitri Tiomkin, lauréat de l'«Academy Award»
.
La chute de l'Empire romain est le couronnement de l'œuvre de Samuel Bronston qui en quelques années est devenu le producteur le plus en vue de l'industrie cinématographique. De son quartier général à Madrid, il contrôle toute une organisation qui se consacre entièrement à l'élaboration de chaque phase de la production, depuis la recherche du sujet d'un film jusqu'à la présentation de celui-ci dans les cinémas du monde entier.
Des esprits chagrins ont fait reproche à Samuel Bronston d'avoir fait subir à l'Histoire des outrages qui, à leurs yeux, sont impardonnables. Ils affirment, par exemple, que l'Empereur Marc Aurèle n'avait pas de fille
(2). Gageons que, malgré ces avis érudits - et pour imiter un vers célèbre - «Tout Bruxelles pour Lucilla aura les yeux de Livius».
Voici d'ailleurs, à ce sujet, un avis autorisé. Le Dr Will Durant, l'éminent historien, conseiller du film La chute de l'Empire romain pendant son tournage, affirme qu'il est «fidèle à l'histoire au point de l'éclairer». Il dit encore : «Nous demandons à un roman ou à une pièce historique d'être fidèles aux événements majeurs et aux personnages de l'histoire dont ils s'inspirent, et je crois que ce film y parvient.» En dépit de ses 78 ans, le Dr Durant ajoute : «J'avoue que j'aime aussi les histoires d'amour, et qu'il ne me déplaît pas du tout de voir de temps à autre les yeux ensorcelants de Sophia Loren dans les remous d'un empire à l'agonie. Il est doux de sentir que malgré tout ce qui peut s'écrouler autour de nous, la femme demeure, et suffit à nous combler.»

documentation presse - avant-première à Bruxelles

 

11.6. Le producteur : Samuel Bronston

Samuel Bronston, américain né en Russie mais élevé en France (études de musique et de lettres à la Sorbonne, puis sciences politiques), avait déjà produit à Hollywood Martin Eden, Jack London et Walk in the Sun avant de s'installer comme producteur indépendant en Espagne, où il rachète les studios Chamartin (à 16 km de Las Matas, où seront construits les décors).
Un accord est conclu avec le gouvernement franquiste, prévoyant des facilités fiscales et l'abondante figuration de l'armée espagnole. Vantant implicitement la beauté des paysages espagnols, les films étaient censés attirer les touristes et ainsi - indirectement - améliorer l'image de la dictature à l'étranger. Son initiative lui vaut d'être promu dans l'Ordre royal américain d'Isabelle la Catholique.

On tourna dans les studios Bronston, John Paul Jones (1959 - avec Robert Stack et Bette Davis); El Cid, Anthony Mann (1961 - avec Charlton Heston et Sophia Loren); Le Roi des rois, Nicholas Ray (1961) et Les 55 jours de Pékin, Nicholas Ray (1963 - avec Charlton Heston et Ava Gardner).

La chute de l'Empire romain sera aussi la «chute de l'empire Bronston», dont les ramifications s'étendaient à 7 succursales internationales : New York, Hollywood, Londres, Paris, Rome, Buenos-Aires et Tokyo; ruiné par cette entreprise, Samuel Bronston sera obligé de s'enfuir, traqué par le fisc espagnol.

Interview de S. Bronston (extraits)
[Jo VAN COTTOM]

De la fidélité historique
       Restez-vous entièrement fidèle à l'Histoire ?
S.B.   Nous restons fidèles à la vérité historique tant que cette fidélité ne nuit pas à la valeur «entertainment» de notre film mais, de toute manière, nous ne nous éloignons jamais beaucoup de l'Histoire parce qu'alors, cela devient ridicule.

       Concevez-vous votre film exclusivement sur un plan «spectacle» ou estimez-vous que les grands films historiques possèdent une valeur éducative ?
S.B.   Tous les films historiques possèdent une valeur éducative et c'est une des raisons pour lesquelles nous en faisons. Nous essayons de toucher autant que possible toute la famille, du père aux enfants et, jusqu'ici, nous y avons parfaitement réussi. Sans que cela n'apparaisse trop, nous voulons donner une leçon.

Du «Kolossal»...
       Selon vous, quelle est la chose qui a l'importance la plus déterminante : la dimension du sujet ou la dimension du procédé technique ?
S.B.   La dimension de la conception du sujet. Sur le plan technique, tout est plus ou moins établi de manière permanente.

Des projets qui n'aboutiront pas...
       Vous m'aviez dit un jour - je crois que c'était lors de la réalisation du Cid - que vous pariiez sur le Marché Commun. Vous qui travaillez en Espagne, seriez-vous aidé si l'Espagne entrait dans le Marché Commun ?
S.B.    Sur un plan économique, je ne pense pas que ce serait plus intéressant pour nous qu'aujourd'hui, mais nous serions aidés sur le plan politique : il y aurait un relâchement de la tension actuelle.

       Je sais que, tandis que La chute de l'Empire romain voit le jour, vous préparez déjà vos prochaines productions. Pourriez-vous m'en parler ?
S.B.    En juillet de cette année, nous commencerons un film avec Frank Capra, Le Cirque [Quand le cirque était roi], pour lequel nous avons une distribution assez brillante : John Wayne, Claudia Cardinale et David Niven. A notre programme de 1964, nous avons deux films de grande dimension : Paris 1900 [réalisateur envisagé : Vittorio de Sica] et un film pour lequel je viens seulement de signer le contrat mais qui possède un magnifique sujet : The Night Runners of Bengale [Les révoltés du Bengale]. Nous le réaliserons entre l'Angleterre et l'Espagne. Le sommet de notre production sera sans doute La Révolution française, prévu pour 1965 (3).

propos recueillis par Jo van COTTOM (4)

 

11.7. Le réalisateur : Anthony Mann

Anthony Mann (1906-1967), célèbre pour ses films policiers et, surtout, ses westerns avec James Stewart (Winchester 73 (1950), L'homme de la plaine (1955), Je suis un aventurier (1955), etc.), avait déjà fait deux brèves incursions dans le péplum. D'abord en tournant l'incendie de Rome pour Quo Vadis (Mervyn Le Roy, 1951). Ensuite en commençant le tournage du Spartacus (1959) de Kirk Douglas; celui-ci le remplacera rapidement (5) par Stanley Kubrick. Douglas lui reprochait notamment de s'être laissé embobiner par le cabotinage de Peter Ustinov, qui se croyait la vedette du film !

La chute... fut sa seconde collaboration avec S. Bronston, pour le compte de qui il avait déjà réalisé El Cid en 1961.

La direction de la seconde équipe (scènes de foule, batailles, poursuite en char) sera confiée à Andrew Marton et Yakima Canutt, qui avaient déjà travaillé ensemble sur la course de chars de Ben Hur (1959).

A Jo van Cottom, Anthony Mann déclarera : «Il ne faut pas se moquer du public. Il est devenu plus difficile. Durant les années de guerre, il allait voir n'importe quoi pour échapper à l'étau de la réalité. A présent, les gens achètent des frigidaires, des voitures, ils prennent des vacances; de ce fait, le film doit être de qualité pour que le spectateur se dérange» (6).

 
anthony mann
 

11.8. Les lieux de tournage

Construction du décor : travaux préparatoires : automne 1960; la construction du Forum débute au 1er octobre 1962.

Premier coup de manivelle : 14 janvier 1963 (dans la forteresse); durée du tournage : 143 jours, dont 69 consacrés à des scènes d'action.
Coût : 8 milliards d'anciens francs. 6.000 figurants, 500 techniciens, 1.500 chevaux.

Les décors extérieurs de Rome (le Forum romain, les Portes de la ville, la voie Appienne, le village barbare) ont été construits sur quelque 220.000 m2 par Veniero Colasanti et John Moore dans un ancien champ de seigle, sur l'emplacement du décor de «Pékin» (dont des éléments seront récupérés), à Las Matas, à 50 km de Madrid, sur la route de l'Escorial, ancienne demeure historique des rois d'Espagne.

Au niveau du péplum Veniero Colasanti et John Moore, architectes de théâtre et d'opéra, étaient déjà coauteurs des décors de Fabiola (1947), et en ce qui concerne les productions Bronston, du décor de Pékin, dans les 55 jours...
La construction du Forum nécessitera 2 ans de recherches et 3.000 croquis pour les 27 structures figurant les principaux monuments. 1.100 ouvriers y participeront pendant 7 mois avec le concours de 400 sculpteurs et spécialistes du travail sur plâtre.
Après le tournage (et la fermeture des studios Bronston), le décor deviendra une attraction touristique; en 1966, Richard Lester viendra y tourner une comédie musicale d'après Plaute, Le Forum en folie.

La forteresse sur le Danube : au nord de Madrid, dans la Sierra Guadarrama (à 27 km de Ségovie).
La bataille contre les Perses : plaine bosselée de Manzanares El Real.
D'autres extérieurs sur les bords du lac Santillana (Espagne centrale).
Les intérieurs dans les Studios S. Bronston à Madrid, et de Cinecittà à Rome (cinq à Rome, dont la chambre de Lucilla - le Gymnase de Commode - le Temple de Jupiter - la salle du trône impérial [7]).

 

11.9. Dialogues du film (extraits) (8)

11.9.1. Pax Romana

Où l'empereur Marc Aurèle voit défiler nombreuses les délégations de ses gouverneurs de provinces et les salue, aidé en cela par son ami et nomenclator Timonidès. Après une importante ovation, Marc Aurèle pourra faire son discours :

(Défilé bruyant des cavaliers.)

TIMONIDES (soufflant les noms des officiels) :
—     Pertinax, de Bretagne.

MARC AURÈLE (s'exécutant) :
—     Bienvenue à Pertinax de la lointaine Bretagne...

(Temps musical, défilé.)

QUELQU'UN, dans la foule des soldats, poussant le premier cri de salut :
—     Gloire à César !

chute empire romain

LES DÉLÉGUÉS, faisant chorus :
—      Gloire à César ! Gloire à César ! (le cri s'amplifiant) Gloire à César ! (l'enthousiasme dégénère en cris emmêlés).

MARC AURÈLE (prenant enfin la parole) :
—      Princes ! Proconsuls ! Gouverneurs ! (Un temps.) Vous êtes venus des sables des déserts de l'Egypte, des montagnes altières de l'Arménie, des forêts touffues de la Gaule, et des plaines ensoleillées de l'Espagne. (Temps.) Vous êtes issus de races différentes, vos mœurs et vos coutumes ne se ressemblent guère; vous avez chacun votre langue et vos chants. Vous n'adorez pas les mêmes dieux... et pourtant, comme les branches épaisses d'un chêne majestueux, vous êtes tous les ramifications d'un même tronc, puissant et tutélaire : Rome ! (Temps.) Regardez autour de vous : le spectacle qui s'offre à vos yeux ne suffit-il pas à évoquer la majesté de Rome ? et la grandeur de son œuvre ? Il y a deux siècles encore, les Gaulois étaient nos plus farouches ennemis : nous les saluons maintenant comme des frères ! A la surface du monde, il ne reste que deux petits territoires qui nous soient hostiles : l'un est au nord, et les peuplades qui l'habitent méritent à juste titre l'appellation de barbares; l'autre est à l'est, la Perse ! (Temps.)
Il n'y a qu'à ces deux frontières que vous trouverez encore des forts, des palissades, des tranchées et de la haine. Mais ce ne sont pas là les frontières que Rome désire. (Temps.) Rome... recherche des voisinages fraternels...
Nous avons dû soutenir de longues guerres... Votre contribution a été épuisante... mais le terme approche, nous atteindrons le bout de la route. Ainsi, nous allons connaître tous l'âge d'or de la paix retrouvée : l'ère de la Paix romaine ! Quel que soit votre pays, quelle que soit la couleur de votre peau, la paix, une fois rétablie, vous conférera à tous - à tous ! - les droits suprêmes, qui sont les privilèges des citoyens romains !

La foule GUERRIÈRE : Vaste éclat d'approbations - Ovations.

(Marc Aurèle manifeste la douleur; il chancelle : Livius se précipite à son côté.)

LIVIUS (inquiet) :
—      Qu'y a-t-il, César, tu es souffrant ?!

MARC AURÈLE (la voix étranglée) :
—      Ce n'est qu'une petite douleur au côté, ça passera...
(Reprenant avec vigueur :) Plus de provinces, plus de colonies, rien que Rome. Rome sera partout une famille de peuples égaux ! Tel... tel doit être l'avenir !

La foule GUERRIÈRE : Ovations générales.

MARC AURÈLE (à part soi) :
—      Puissent les dieux hâter ce jour...

(Les ovations se poursuivent.)

11.9.2. L'esclavage n'est pas rentable

Retour de Pannonie, Livius et Timonidès veulent convaincre le Sénat de l'opportunité qu'il y aurait à affranchir des esclaves - à accueillir en alliés, sur le territoire de l'Empire, les barbares vaincus.

(Tumulte du sénat.)

ANNONCIATEUR :
—      Caius Livius, conquérant des Germains !

FOULE (acclamations générales) :
—      Caius ! Germanicus ! (Tollé et hourra général.)

(Après un temps d'acclamations, Livius prend la parole.)

chute empire romain

LIVIUS (solennellement) :
—      Vous qui m'accordez votre attention (temps), vous qui avez salué en moi le soldat (temps), vous qui avez bien voulu me porter en triomphe (temps)... : je vous remercie. Mais vous avez une décision difficile à prendre, aujourd'hui, et il ne faudrait pas que moi, en qualité de soldat, j'influence votre vote. (Temps.) Aussi je demande à César (temps) qu'un homme, qui ne soit ni un soldat ni un sénateur, mais un philosophe, un homme plein de sagesse (temps), puisse prendre la parole à ma place.

(Assentiment silencieux de César Commode, suivi de l'entrée de Timonidès. Léger brouhaha, lorsque apparaît Timonidès.)

TIMONIDÈS (d'une voix modeste, presque timide et inquiète) :
—      Concitoyens romains...

Les SÉNATEURS (en chœur) :
—      ... grecs ! ... grecs ! ... grecs !

TIMONIDÈS (ton de justification) :
—      Par la naissance je suis Grec, mais Romain par le cœur.

Un SÉNATEUR (impétueux) :
—      Esclave ! (Approbations enchaînées du sénat entier.)

TIMONIDÈS (ton raisonnable) :
—      Je suis né esclave, mais j'ai gagné ma liberté. (Temps. Reprenant sur un ton de concession :) Concitoyens romains... (temps de réflexion) je suis précepteur... et lorsque je constate, après avoir répété une centaine de fois la même chose à un élève, qu'en dépit de tout il continue à ne pas comprendre la leçon que je lui enseigne, je suis bien forcé d'en conclure qu'il y a probablement un défaut quelconque, soit dans la leçon (temps)... soit chez le précepteur... (Temps.)
Cent fois nous avons essayé de persuader ceux que nous nommons barbares combien il peut en coûter de faire la guerre contre Rome, en brûlant leurs villages, en crucifiant leurs guerriers et en réduisant leur jeunesse à l'esclavage. Les incendies s'éteignent, on enterre les morts, les esclaves meurent, peu à peu. (Temps.) Mais la haine que nous avons semée derrière nous, subsiste ! (Ton de colère.) La haine amène les guerres; les guerres provoquent des impôts... (Temps.) Et combien de malheurs encore ? La misère (temps), la faim, les maladies, tout cela est désastreux, ruineux ! (Temps.) Et pourtant, la solution est simple : il nous faut cesser de faire la guerre.

Un SÉNATEUR (indigné) :
—      Cesser de faire la guerre ?! (Temps.) Alors que tes amis ne cessent de nous attaquer ? (Temps.) C'est une trahison ! (Temps.) Tous ces peuples ont montré assez clairement ce qu'ils désirent : notre destruction ! et la destruction de la civilisation romaine !

TIMONIDÈS (ferme mais souple) :
—      Je le maintiens : la solution est simple. Il faut transformer ces amis, que vous me reprochez, en citoyens pacifiques. Confions-leur, pour les cultiver, nos terres abandonnées. Non seulement ils produiront de quoi se nourrir eux-mêmes, mais je vous le certifie, plus tard, ils enverront des vivres à Rome.

Un SÉNATEUR (impérieux) :
—      Oui, je suis d'accord ! qu'ils cultivent ces terres ! qu'ils produisent des vivres, mais comme esclaves ! (Temps.) C'est ainsi que nous avons toujours fait !

TIMONIDÈS (démonstrateur) :
—      Niger avait autrefois 20.000 esclaves sur ses propriétés. Que sont-ils devenus ? Tous sont devenus des affranchis ! Pourquoi ?! (Temps.) Peut-être Niger est-il ennemi de l'esclavage ?! (Rires commençants.) Hein ? (Rires déclarés.) Non, parce qu'aujourd'hui il n'est plus avantageux d'avoir des esclaves. Les esclaves produisent moins que des hommes libres. Cherchons donc ce qui est à la fois profitable (temps) et juste. Accordons à ces gens-là le plus grand bien qui soit. Ne leur refusons pas le droit de jouir de la liberté romaine. La nouvelle se répandra dans le monde que Rome les a admis comme des égaux, et c'est seulement alors (temps) que nous aurons nos frontières humaines !... la paix romaine, que Marcus Aurelius avait promise... !

(Tumulte : mélange d'approbations et de condamnations.)

Le porte-parole de CÉSAR COMMODE :
—      Au nom de César !
(Silence pesant, et reprise du porte-parole :) Un jour, César me demanda à quel moment Rome fut-elle plus grande et plus forte, et je répondis à César : «Jamais Rome ne fut plus grande ni plus forte que maintenant !» et à quoi devons-nous que l'Empire soit ce qu'il est aujourd'hui ?! A notre dureté, à notre intransigeance... (Temps.) Egalité... Liberté... Paix ! (Temps.) Qui fait donc usage ce ces mots, à part les Grecs, les Juifs et les esclaves ?! Rappelons-nous que derrière ces barbares, il y en a des milliers d'autres, dont l'arme guette une défaillance de notre part pour nous anéantir ! Si nous acceptons ces barbares parmi nous, nos ennemis se hâteront de proclamer que nous sommes faibles ! Alors ils fonderont sur nous de toutes parts ! Et ce sera la fin de l'Empire romain. (Temps.) Ce sera la fin de... Rome.

Un SÉNATEUR (ton modéré) :
—      La fin de Rome ? (Temps.) Comment disparaît un empire ? Est-ce qu'il s'effondre d'un seul coup ? dans un tremblement de terre ? Non... Non... ! mais il arrive un temps où les peuples cessent peu à peu d'y croire, et... c'est alors qu'un empire commence à chanceler. (Temps.) Pères conscrits (temps), j'ai vécu sous quatre grands empereurs... Trajan, Adrianus, Antoninus... Marcus Aurelius... Et au cours de tant d'années, notre Empire a grandi, a changé. La loi de la vie est de grandir ou mourir. (Temps.) Et vous, les sénateurs, vous êtes le cœur de Rome. C'est par votre voix que le peuple s'exprime. (Avec conviction :) Parlez, pour que le monde vous entende ! Que le monde sache (temps) que Rome ne mourra pas. (Temps.) Ils sont des millions... (temps) des millions qui guettent à nos frontières. Si nous ne leur ouvrons pas nos portes, ils les briseront, et ils nous briseront, nous aussi... mais (temps), au lieu de cela, cherchons à grandir, de plus en plus, et à nous étendre. Accueillons ces gens parmi nous... C'est avec leur aide que l'Empire grandira encore. (Temps.) Honorables Pères conscrits, nous avons changé le monde. (Temps.) Ne pourrons-nous pas nous changer nous-mêmes ?...

Un SÉNATEUR (enthousiaste) :
—      Oui ! Le temps est venu !

Un second SÉNATEUR (poursuivant l'enthousiasme du premier) :
—      Que la guerre s'efface selon la Paix romaine !

(Tumulte, conflits, empoignades. Le sénat ne semble pas s'unir dans un tel enthousiasme.)

chute empire romain
 

Les discours du film
C'est le propre du roman historique de faire fleurir l'anachronisme le plus insidieux.
Prenons donc l'exemple des deux superbes discours que nous avons transcris ci-dessus. La fraternité entre les membres de l'Empire dont parle Marc Aurèle est un vœu pieux, qui n'a rien à voir avec ce que serait tenté de comprendre le spectateur du XXe s. Le monde antique est une société aristocratique où le bien-être, il va sans dire, ne concerne que les citoyens romains - ce qui exclut d'office non seulement les esclaves, mais aussi les sujets libres de l'Empire (il faudra attendre l'édit de Caracalla, en 212, pour voir conférer systématiquement la citoyenneté à tous les hommes libres).
Mais le discours de Timonidès n'est peut-être anachronique qu'en apparence. Anachronique dans sa compréhension par le spectateur non averti de la «Weltanschauung» antique. Il fleure bon le taylorisme nuancé de marxisme : l'ouvrier est plus rentable que l'esclave. Mais le marxisme et le taylorisme n'ont peut-être, après tout, que réinventé ce que l'on croyait oublié et que les Romains savaient déjà. N'a-t-on pas vu accéder aux plus hautes charges de l'Empire des citoyens nouveaux, nés d'affranchis, eux-mêmes fils d'esclaves venus à Rome les fers aux pieds ? Quand ce n'étaient pas ces affranchis eux-mêmes...

Le spectateur du XXe s. (oups... du XXIe s. maintenant, tout va si vite !) à qui ce discours s'adresse en réalité, ne retiendra, bien sûr, que l'interprétation «socialisante» à laquelle nous a conditionné l'idéologie de notre société industrielle - et qui a d'ailleurs trois niveaux de lecture, selon que l'on est exploiteur, exploité ou tout simplement exclu, et comportera encore bien des nuances en fonction du contexte économique (prospérité, récession). Le travail fait l'homme libre ! Le travail ennoblit l'homme ! Un véritable blasphème pour un citoyen romain antique...
On pouvait encore y croire dans les Golden Sixties. Aujourd'hui il est difficile de s'y référer encore, au vu de la mondialisation, du libéralisme sauvage et de la politique des délocalisations (9)...

Fellows Roman
En fait d'anachronisme, il paraît que l'expression par laquelle Timonidès s'adresse au Sénat de Rome : «Concitoyens romains» («Fellows Roman», dans la V.O.) a bien fait rire certain critique lors de la sortie du film (Y.B., Le Monde, 30 avril 1964 - cf. : «Critiques»).

Entendre les Romains parler anglais ou allemand, dans un film, n'est pas plus choquant ou anachronique que le français ou l'italien. Un film est destiné à être compris par le plus large public possible, avec le vocabulaire en usage dans cette langue. Fort heureusement, donc (hors les «confidentiels» Sebastiane de Derek Jarman, et Rudens de R. Licoppe [10]), ces films sont donc diffusés non pas en latin, mais dans une langue accessible. Accessible donc, et pas davantage ce jargon pédant dans lequel Jean Lombard était passé maître, lui qui truffait chaque phrase de ses romans de deux ou trois mots grecs ou latins, ce même pour les objets les plus banaux - «navigium» pour navire, par exemple -, sans compter quelques-uns de ces pittoresques néologismes dont la littérature «populaire» fin de siècle était friande.
Bien sûr, il y a le choix des mots. Le soldat qui s'adresse à son supérieur serait-il, selon notre goût, plus «antique» (plus authentique ?, ou plus «parnassien» ?) lorsqu'il dit : «Seigneur», plutôt que «Chef» - qui, lui, fait «pandore» (11) !
Où irions-nous si Liz Taylor-Cléopâtre conviait Antoine-Richard Burton à prendre dans son salon, non pas une collation - pardon : un «breakfast», dans la V.O. -, mais un «brachu deipnon» dans son «triklinion» - ou quelque chose dans ce goût-là ?

Tout de même, «Fellows Roman», Concitoyens romains, est plus sobre que le célèbre «Amis Romains, Concitoyens» («Friends Roman, Countrymen») par lequel Antoine s'adressait au peuple (Jules César, III, 2). «Countrymen» étant d'ailleurs équivoque lorsque nous le traduisons, car il désigne aussi bien le concitoyen que le paysan. Mais peut-être, au yeux d'un critique borné, est-ce là précisément la différence qu'il faut faire entre le saltimbanque inculte (puisqu'américain !), le dialoguiste hollywoodien, «ce pelé, ce galeux...» - et le grand William Shakespeare, génie consacré par les belles lettres !

 
chute empire romain
Suite…

NOTES :

(1) Selon publ. belge. - Retour texte

(2) Assertion ridicule. Outre Annia Aurelia Galeria Lucilla (149), Marc Aurèle eut au moins cinq autres filles : Annia Aurelia Galeria Faustina (147), Domitia Faustina (...), Fadila (159 ?), Cornificia (160 ?) et Vibia Aurelia Sabina (171-172) (cliquez ici). - Retour texte

(3) Autres projets : Isabelle de Castille, et un troisième péplum, Cyrus le Grand, jamais réalisés (N.d.M.E.). - Retour texte

(4) Jo van COTTOM, «Samuel Bronston m'a dit : La production de bons films arrêtera la crise du cinéma», Bruxelles, Ciné-Presse, n° 19, 11 mai 1963. - Retour texte

(5) Après quinze jours. - Retour texte

(6) Jo van COTTOM, «Samuel Bronston m'a dit : La production de bons films arrêtera la crise du cinéma», Bruxelles, Ciné-Presse, n° 19, 11 mai 1963. - Retour texte

(7) Selon Photo-Roman, n° 13, 1er juillet 1963. - Retour texte

(8) Transcription d'après la bande-son : Gian Lhassa. - Retour texte

(9) En réalité, rien de nouveau sous le soleil. Comment l'Empire britannique appauvrit-il le sous-continent indien, si ce n'est en lui appliquant les mêmes règles «libérales» (la culture de l'indigo, par exemple) que celles auxquelles nous nous voyons aujourd'hui confrontés, en Europe occidentale... - Retour texte

(10) ... qui ont depuis fait école avec Mel Gibson : latin et araméen pour La Passion, yucatèque pour Apocalypto. Certains docufictions BBC et autres marmonnent en bruit de fond un latin à peine audible, écrasé par la voix du narrateur (ainsi le français Brûlez Rome !) - Retour texte

(11) C'est dans ce sens qu'«Alix» passant du Lombard à Casterman, Jacques Martin remania l'ensemble des phylactères de son Sphinx d'Or. - Retour texte