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Spartacus : Blood and Sand
(13 ép. TV - prod. Starz)
(R. Jacobson, M. Hurst, J. Warn etc.,
EU - 2010)

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Spartacus : Blood and Sand

1. En guise d'introduction...

2. Starz Entertainement : le retour de Spartacus

3. Sexe et violence

3.1. Sexe

3.2. Femmes «en péplums»

3.3. Violence

Sur cette page :

3.4. Gladiateurs
Mise au point

3.4.1. L'argent
3.4.2. Sexualité
3.4.3. Alimentation
3.4.4. Motivation
3.4.5. Les volontaires (auctorati)
3.4.6. Le subligar ou subligaculum
3.4.7. Armes offensives
3.4.8. Spartacus, thræx et/ou dimachærus ?
3.4.9. Le bouclier : arme défensive et offensive
3.4.10. Armes défensives
3.4.11. L'escrime

4. Conclusions

5. Internet

Pages suivantes :

6. Filmographie

 

3.4. Gladiateurs

La plupart des gladiateurs de Batiatus sont, comme Spartacus et Crixus, des esclaves choisis pour leur agressivité et contraints de s'entraîner et de s'entre-tuer pour le plaisir de la foule. Seulement pour le plaisir de la foule ? On peut en douter à regarder Spartacus : Blood and Sand. Ils se battent aussi pour leur réputation de tueurs, et pour l'honneur de leur ludus. Ne sont pris que des sujets présentant des dispositions pour cet art qui tend au divin. Tuer est, en somme, un privilège des dieux dont l'exercice vous identifie à eux.
L'épisode 5 va jusqu'à assimiler les jeux du cirque à un sacrifice humain destiné à obtenir quelque chose des dieux, la pluie par exemple. Dans le contexte romain, c'est parfaitement absurde. On a un peu l'impression que le scénariste a confondu les Romains avec les Aztèques, qui eux aussi connurent une certaine forme de gladiature (1) !

gladiateurs au ludus

Les nouvelles recrues sont cordialement méprisées par leurs aînés, et ne seront considérées comme gladiateurs véritables, frères de l'arène que lorsqu'elles auront fait leurs preuves en livrant de vrais combats contre d'autres gladiateurs, généralement - mais pas nécessairement - issus d'autres ludus, comme Théokolès (ép. 5) ou Périclès (ép. 11). Spartacus, pourtant aguerri par la guerre contre les Gètes, devra tout réapprendre sous la férule du Doctor.


Mise au point
Une petite mise au point préliminaire s'impose. Il y a eu deux sortes de gladiature, qui eurent en commun d'engager aussi bien des volontaires libres que des esclaves contraints (des prisonniers de guerre, p. ex.). Au fil de son évolution qui dura 800 ans, ce qui à l'origine était un duel funéraire - cf. la proto-gladiature homérique - s'est professionnalisé : de sacré, le munus est devenu un ludus profane.
Aussi convient-il de distinguer la
gladiature ethnique de la gladiature technique. La gladiature ethnique opposait, au départ, des prisonniers de guerre combattant avec leurs armes nationales (Samnites, Gaulois, Thraces [2]), c'est-à-dire armés de boucliers, de casques et de glaives militaires. Au fil du temps, les samnites n'étaient plus nécessairement des individus originaires du Samnium, de même pour les gaulois ou les thraces.

Gladiature technique. Ce n'est qu'à l'époque d'Auguste que l'on vit apparaître les silhouettes rendues familières par les toiles de J.-L. Gérôme relayées par le cinéma et la BD. Apparaissent alors le rétiaire, dont l'armement spécifique n'a rien de militaire, le provocator héritier du samnite, et le mirmillon qui semble-t-il procède à la fois du samnite et du gaulois. Seul le thrace, avec sa sica, traverse intact cette mutation, quoique en générant une variante : l'hoplomaque équipé d'une arme d'hast et d'un poignard.
Le rétiaire se cherche un adversaire digne de lui, un
contra retiarius. C'est d'abord le dimachærus ou scissor, pas très sexy ni très populaire il faut le reconnaître, avant que ne s'impose le secutor, une variante du provocator ou du mirmillon, mais avec un casque plus profilé pour ne pas laisser prise aux mailles du filet.
Mais surtout, la gladiature technique voit s'imposer les armes courtes : le poignard
(pugio) avec sa lame de 20-25 cm remplace désormais le glaive (gladius) (50 cm). Dans un second temps, vers le milieu du Ier s. de n.E., les gladiateurs qui jusque-là combattaient avec des casques militaires laissant découvert le visage, adoptent des grilles faciales. Ce sont de ces nouveaux casques, forcément antérieurs à l'éruption de 79, que l'on retrouvera dans le ludus gladiatorus de Pompéi; nous savons par ailleurs et par Suétone que l'empereur Claude aimait à observer les affres de l'agonie sur le visage des rétiaires, les seuls à ne pas porter de casque fermé (en fait, ils n'en portaient pas du tout).

A l'époque de Spartacus. Pour sa part, Spartacus entre dans l'Histoire - pour en sortir presque aussitôt - en 73-71 av. n.E. A ce moment il y a bien quelques amphithéâtres en dur en Campanie, notamment à Capoue et à Pompéi, mais aucun à Rome (3), et la gladiature ethnique a encore quelques belles décennies devant elle. Nous ne connaissons pas trop bien les «règles d'engagement» des gladiateurs à ce moment-là. Sans doute les glaives prévalaient encore, mais les casques fermés n'avaient toujours pas fait leur apparition dans l'arène. En outre, il est douteux qu'on y ait vu des rétiaires, encore à venir.
Le but était-il alors d'étendre raide mort l'adversaire comme on l'admet le plus souvent (idée reçue ?), ou simplement de le soumettre comme ça sera la règle au siècle suivant, dans la
gladiature technique ? Aucune vraie certitude à ce sujet, nous semble-t-il. Les scénaristes de Spartacus : Blood and Sand peuvent alors raconter ce qu'ils veulent !
Une seule chose nous semble sûre : si Spartacus et ses camarades se sont insurgés en bloc, c'est qu'ils devaient avoir une solide bonne raison de le faire, des conditions de vie inacceptables
(4). Mais cette Troisième guerre servile, la seule menée par des gladiateurs (5), sera aussi la dernière, la donne se modifiant désormais avec la professionnalisation de la gladiature.


3.4.1. L'argent
Les gladiateurs touchent un certain pourcentage sur les gains de Batiatus lequel contre rétribution les loue à l'éditeur des jeux, un magistrat. Les tués lui seront facturés en sus. La série n'est pas très claire à ce sujet, mais la plupart des combats montrés nous donnent à voir des duels où le premier à embrocher ou décapiter (sic) son adversaire a gagné. Cependant, dans quelques cas, on voit le vaincu - soumis par son antagoniste - tendre deux doigts et demander grâce (ép. 3, ép. 10). Il semble que, pour les scénaristes, les combats de gladiateurs ne sont pas d'habitude des combats à mort, autrement le ludus gladiatorus fermerait bien vite faute de combattants. Le spectacle débute donc, en hors-d'œuvre, par des duels où une rémission est probable. En revanche, il est couronné par ce qui est nommé ici le «primus», l'engagement sine missio de deux champions (l'impression qui subsiste est équivoque, puisque ce sont ces primus (6), plus dramatiques, plus juteux, qui sont de préférence filmés).

Les gains des gladiateurs sont conservés par Batiatus, comme un compte courant dont il soustraira les dépenses, notamment les prostituées qu'on leur fournit. Théoriquement, ils pourraient ainsi économiser de quoi racheter leur liberté, mais l'on verra que Batiatus à l'ego surdimensionné n'apprécie pas trop ce qu'il considère comme une trahison. Un de ses champions paiera de sa vie avoir voulu racheter sa liberté (ép. 6) (7). On ne quitte le ludus que les pieds en avant ! Inutile donc de songer à une autre vie loin du sable de l'arène, c'est une vérité très simple que Crixus, par exemple, a très bien comprise...

3.4.2. Sexualité
En arrivant chez Batiatus, Spartacus espère encore retrouver sa femme. A cette fin, il témoigne d'un zèle excessif dans l'espoir de devenir le nouveau champion de Capoue à qui le dominus ne pourra refuser cette faveur. Mais lorsqu'il a l'indiscutable preuve de la vanité de ses efforts, il ne vit plus que pour le combat et la satisfaction de son propriétaire, y compris lorsque celui-ci - le mettant au courant de ses aspirations politiques - le prie de se prostituer auprès d'une patricienne romaine.

public de amphitheatre

Car si sur les gradins, les plébéiennes hystériques montrent leurs seins lorsque jaillit le sang numérique, les patriciennes - quant à elles - rêvent toutes de se faire aimer par une de ces brutes. Si bien que leur caserne devient facilement un lieu de débauche où Batiatus prostitue ses «champions» à la concupiscence des matrones les plus huppées... quand il ne livre pas ses esclaves femelles à ses «Titans». Ou fait directement venir du bordel les «employées» de son ami Marcellus.

Un nouveau venu, Ségovax, est acquis par Ilithyia sur la base des respectables dimensions de son pénis. Ilithyia, l'épouse du conquérant de la Thrace, le légat Glaber, laisse entrevoir au Gaulois la possibilité de récupérer sa liberté s'il élimine Spartacus qui l'a insultée. Mais lorsqu'aux thermes Ségovax glisse une cordelette autour du cou du Thrace pour l'étrangler, son ennemi personnel Crixus vient à sa rescousse. Crixus, à qui Spartacus a ravi son titre de champion. Malgré sa rancœur et en dépit de blessures dont il n'est pas encore remis, blessures du reste infligées par le Thrace lors d'un précédent combat. Car pour Crixus, Spartacus est «un frère gladiateur» qui a droit à une mort honorable dans l'arène, par le glaive d'un autre gladiateur - de préférence le sien ! Ce qui n'est pas encore le cas de ce tirone, cette bleusaille de Ségovax...

3.4.3. Alimentation
C'est un cliché des péplums : les Romains boivent du vin et sont de grands mangeurs de viande, fussent-ils simple légionnaire ou gladiateur. Les légions de Cléopâtre de Cottafavi, comme d'autres films, les montrent plus volontiers festoyant dans les tavernes que se mettant à la diététique. On connaît la légende selon laquelle Milon de Crotone, athlète olympique, dévorait quotidiennement neuf kilogrammes de pain, autant de viande, et buvait huit litres et demi de vin ! Pourtant l'ordinaire d'un citoyen de condition modeste, comme aussi celui d'un soldat ou d'un gladiateur, voit plus volontiers de l'eau dans sa coupe, des bouillies de céréales ou des féculents (lentilles, haricots) dans son écuelle. Spartacus : Blood and Sand y a veillé : pas de viande, pas de vin. Les gladiateurs se nourrissent d'une sorte de bouillie; on parle même de «porridge» (ép. 4).
Vu les performances physiques attendues des cascadeurs et acteurs-gladiateurs, le tournage de Spartacus s'est déroulé sous le signe de la diététique. Les acteurs et cascadeurs se soumirent au régime des athlètes de haut niveau qu'étaient en réalité les pensionnaires de Batiatus. «Pour incarner un gladiateur, il fallait aussi manger comme un gladiateur, raconte le journaliste Joe Wuebben (8). Sous la tente où tout le monde déjeunait, il y avait une table pour l'équipe de tournage et les acteurs qui ne combattaient pas («la table romaine» déclare [Manu] Bennett en plaisantant), et une autre pour les gladiateurs («la table des esclaves») où les repas consistaient, par exemple, en poulet et poisson au gril, steak maigre, riz brun, brocoli et autres légumes. Ni crèmes, ni sauces riches, ni sucres rapides comme pour l'autre table. (...) «Je pense que mon alimentation doit être assez proche de celle d'un gladiateur de cette époque», déclare Bennett, dont le régime sain commence par un bol de flocons d'avoine tous les matins.»
Sous la tutelle sévère de leur entraîneur Tim Wong, les préoccupations diététiques modernes, devant la caméra, semblent avoir rencontré la réalité historique, même s'il est assez difficile d'identifier le peu appétissant contenu des écuelles de Barca, Varro et consorts...

repas des gladiateurs

Difficile d'identifier la substance blanchâtre qui emplit l'écuelle de Barca : une bouillie de céréales, un fromage genre ricotta ? Selon le médecin grec Galien qui, avant de devenir le médecin particulier de l'empereur Marc Aurèle, veilla pendant quatre ans sur la santé des gladiateurs de Pergame, ceux-ci se contentaient quotidiennement de bouillie d'orge (GAL., De la nourriture, VI, 529 - éd. Kühn)

 

3.4.4. Motivation
C'est un sentiment de l'honneur très proche du bushido qui anime ces gladiateurs - les plus vils des hommes et, en même temps, les plus admirés. On retrouve ici cette mentalité des corps d'élite toutes époques confondues, depuis les Spartiates morts pour obéir aux lois. Comment ne pas songer aux Novios de la Muerte de la légion étrangère espagnole, ces «Fiancés de la Mort» dont les membres défilent la chemise largement ouverte sur la poitrine, que dans une attitude de défi ils offrent aux balles de l'ennemi. On se rappelle le mot mémorable du général de Négrier qui, en 1884, commandait la légion étrangère française : «Légionnaires, vous êtes soldats pour mourir. On vous envoie là où on meurt.» Et le fameux «Le hussard qui à trente ans n'est pas encore mort n'est qu'un jean-foutre !» du général Lasalle. Sabreur téméraire, Lasalle devait tomber à Wagram, à trente-quatre ans. Privilège du grade.

Ashur lui-même, sa jambe à peine guérie, rêve de retourner dans l'arène, ce qui fait bien rire les autres gladiateurs car il demeure trop diminué pour reprendre sérieusement du service. Psychologiquement, cette attitude pourrait passablement étonner de la part du personnage retors et calculateur qu'il incarne, plutôt porté vers les coups bas et le combat dans l'ombre des coulisses.

Les auteurs anciens, notamment Cicéron, nous ont à suffisance exposé comment le citoyen romain voyait les gladiateurs, considérés tout à la fois comme infâmes, mais aussi comme des modèles de courage stoïque devant la mort. Toutefois, aucun gladiateur ne nous a laissé ses mémoires où apprendre comment lui-même et ses camarades se voyaient. Aussi le scénariste est-il libre d'imaginer ce qu'il veut - depuis le sentiment de honte chez les romanciers marxistes comme Howard Fast, jusqu'à celui d'appartenance à une corporation d'élite, des «Titans» ou des «Demi-Dieux» ainsi que sans équivoque le proclame la série produite par Starz.

C'est par un entraînement impitoyable, nourri de la douleur physique, que le Doctor trempe le caractère de ses tueurs. «Si l'on souffre un peu personnellement, on finit par s'adapter à la fois physiquement et mentalement pour supporter de nouveau la douleur, explique Feuerriegel (9). Quand on fait quelque chose et qu'on s'y habitue, on sait comment s'y prendre la fois d'après : c'est de cette façon qu'on s'endurcit.»
Manu Bennett (Crixus) est du même avis, mais estime que ce n'est pas seulement l'habitude et la mémoire du muscle qui leur ont permis d'aller jusqu'au bout. «C'est l'esprit de camaraderie qui nous a poussés à aller plus loin et je crois vraiment que ça devait être le cas dans les ludi à l'époque romaine, affirme-t-il. On y arrivait comme esclave et on ne savait probablement rien, mais les encouragements d'autres hommes dans ce genre de milieu font grimper le taux de testostérone et vous obligent à être plus physique et plus combatif.»
Pendant le tournage de Spartacus, on a aussi enseigné la discipline. Si quelqu'un arrivait au ludus en retard ou si son comportement était «indigne de celui d'un gladiateur» (sic) (ce sont les termes de Wong), c'est-à-dire qu'il ne faisait pas assez d'efforts pour progresser ou qu'il se présentait au ludus avec un pantalon de jogging aux motifs floraux, par exemple, il devait enfiler un lest de 20 kg appelé «le gilet» pendant une partie de l'entraînement, ce qui corsait la difficulté des exercices ! Camaraderie, compétitivité, discipline et douleur : ces éléments ont jeté les bases d'un vécu physique et mental qui a préparé des acteurs et cascadeurs professionnels à incarner des gladiateurs.
«Le camp d'entraînement nous a apporté une expérience profonde et intime de la vie d'un gladiateur, souligne encore Manu Bennett. C'était extrêmement intense. Dès l'instant où on a franchi cette porte, on a dit au revoir à notre vie normale et découvert l'univers très éprouvant de l'entraînement, de la musculation et du combat» (10).

3.4.5. Les volontaires (auctorati)
Parmi les gladiateurs de Batiatus, Varro est un cas à part. Il est un engagé volontaire, un auctoratus (litt. : «celui qui se vend»). La manière dont les scénaristes perçoivent son engagement n'est pas très claire. Citoyen romain, il s'est vendu comme gladiateur pour éponger ses dettes de jeux, mais il attend avec impatience sa libération... dans un an. Il pourra alors retrouver sa femme et son fils. Cette date «dans un an» est soit une espérance, soit un terme fixé par contrat (11). On ne nous le précise pas (12); mais l'échéance d'un contrat nous semble le plus probable. En attendant, il est prisonnier du ludus, avec interdiction de sortie. Bien que les auctorati s'engagent à souffrir «le fouet, le feu et le fer», nous n'avons aucune certitude quant à savoir si - historiquement - ils étaient retenus prisonniers dans leur ludus tout le temps de leur engagement.
Toutefois, considérons le cas d'un citoyen honorable. Engagé dans la légion, il perd lui aussi un certain nombre de ses droits de citoyen, comme celui de se marier - à certaines époques du moins, notamment sous Auguste - et accepte implicitement, de se soumettre à la discipline militaire, à risquer des punitions, voire sa vie. Le légionnaire se voit, bien entendu, astreint à rester dans le camp légionnaire, avec interdiction d'en sortir sauf mission ou permission. On peut penser que les auctorati étaient eux aussi soumis à surveillance. On sait au moins qu'ils étaient autorisés à vivre maritalement dans le ludus, puisqu'on a trouvé des stèles funéraires dédiées à tel combattant, dédicacée par leur épouse. Il semble que Varro ait vécu à une mauvaise époque, puisqu'il a, pour sa part, dû se séparer de son Aurelia.

3.4.6. Le subligar ou subligaculum
Intéressons-nous, maintenant, à la manière dont sont équipés les gladiateurs dans le Spartacus de Starz. A commencer par leur cache-sexe ou leur pagne, comme vous voudrez. Très sexy. Certains gladiateurs portent des slips de cuir identiques à ceux des Spartiates de 300, qui mettent bien en valeur ce que les susdits gladiateurs ont à offrir aux dames. Toutefois leur agencement très étudié n'a aucun rapport avec le subligar, le rectangle d'étoffe qui, après avoir couvert les fesses, retombait en tablier sur le devant.

 

gladiateurs

Crixus, Barca, Gnæus et les autres. Notez les slips de cuir, façon 300, moulant finement les virils attributs de nos gladiateurs. Rien à voir avec le subligar romain

 

subligaculum

Mirmillon (à gauche) contre thrace (à droite). Notez le subligaculum, simple étoffe nouée autour des reins, passant entre les jambes avec un pan rabattu sur le devant
(reconstitution ACTA-Expérimentation à Malagne [Rochefort, Belgique, 2005] - photo M. Eloy)

A noter que la harde que portait Charlton Heston galérien dans Ben Hur, de même que les «pampers» de Kirk Douglas et ses amis dans Spartacus, étaient tout autant «étudiés» même si allant vers d'autres perspectives.

 

3.4.7. Armes offensives
Outre l'institution de la gladiature telle qu'elle est représentée dans cette série, il y aurait sans doute beaucoup à dire; ainsi leur escrime. Mais à l'époque de Spartacus, les règles d'engagement devaient être encore assez différentes de celles du Ier s. de n.E. élaborées, notamment, par Acta-Expérimentation.
Parmi les bonnes choses, il y a par exemple les glaives de type «Mainz» et «Pompéi».

glaive type mainz

Spartacus armé d'un glaive de type «Mainz» (ép. 3). On appelle «Mainz» le glaive typique d'époque augustéenne, d'après des exemplaires trouvés à Mayence (Mongontiacum). Il s'agit d'une lame de 50 cm de long, légèrement cintrée mais très large, à deux tranchants et très effilée. Une lame de taille et d'estoc.
Outre cette arme et la rudis (épée d'exercice, en bois), on le verra le plus souvent manier une grande sica, assez proche de la falx que l'on voit entre les mains des guerriers Daces, sur la Colonne trajane.

 

3.4.8. Spartacus, thræx et/ou dimachærus ?
On discutera à l'infini du «dimachère» (dimachærus), dont on ne sait absolument rien sauf ce que l'on peut déduire d'une traduction littérale du mot : «qui a deux poignards (machæra)». Au long des épisodes 2 à 5, Spartacus combat dans une armatura qui correspond plus ou moins au thræx (thrace) (un petit bouclier, une sica - mais aussi un glaive droit, type «Mainz» - et deux ocreæ qui auraient dû être plus hautes pour un parmatus; quand au casque, il est acceptable même s'il n'a pas le fameux cimier «en griffon»).
Ayant évincé Crixus, Spartacus est maintenant le champion du ludus de Batiatus et, ceci acquis, il reçoit une armure et deux sicæ.

En soi, c'est déjà bizarre qu'un gladiateur qui a «percé» comme thrace se retrouve tout de go dimachærus.
L'escrime classique du thrace sica/bouclier est forcément très différente de celle du supposé dimachère sica/sica ou gladius/gladius. Et la technique étant toute autre, le champion risque de bien vite tomber de son piédestal (même si nous savons que certains gladiateurs appartenant à des armaturæ... marginales, pouvaient avoir une double spécialisation : ainsi, par exemple, cet Hylatis, dimachærus et essedarius (13), dont parle une inscription de Lyon (CIL, XIII, 1997)).
Surtout, nous risquons de nous heurter à une problématique âprement discutée par les spécialistes de la gladiature. Avec ses deux sicæ, notre champion entre semble-t-il dans la catégorie des dimachæri. Le problème étant, justement, que le dimachærus n'est qu'un nom, cité à trois reprises dans le corpus épigraphique, mais dont nous ne trouvons aucune représentation figurée attestée parmi les quelque 1.600 images sur la base desquelles travaillent les spécialistes comme Brice Lopez et Eric Teyssier.
Ce dernier, après examen de toutes les sources disponibles - textuelles ou figurées - est arrivé à la conclusion que ce gladiateur a porté différents noms selon l'époque ou la région (à preuve Artémidore, qui écrit dans non Onomacriton : «l'arbelas que l'on appelle aussi dimachærus») (14).

L'armatura des dimachères serait apparue vers -25, peu après celle des rétiaires auxquels elle était opposée (contra retiarius); elle aurait ensuite pris le nom de scissor à l'époque de Néron (+50), pour devenir cinquante ans plus tard et en Orient l'arbelas (+100) (15). Traditionnellement opposé à un adversaire muni d'une arme d'hast et d'une dague (rétiaire, hoplomaque), ce gladiateur à deux lames portait un très profilé casque de secutor, une paire d'ocreæ, une lorica squamata, une manica sur le bras droit prolongé par le pugio, et au bout du bras gauche, dénudé, un manchon terminé par un fer tranchant en forme de demi-lune. Ainsi équipé, ce combattant n'aurait eu aucune chance contre un autre gladiateur armé d'un bouclier et d'un coutelas ou glaive.

gladiateur - dimachaerus - scissor

Seul gladiateur à deux lames et porteur d'une cuirasse à être attesté dans le corpus, le dimachærus/scissor/arbelas s'oppose toujours au rétiaire - dont il peut trancher les rets avec le fer en demi-lune qui surmonte le manchon prolongeant sa main gauche. Connu notamment par la stèle de Myron (Asie Mineure, IIe-IIIe s. - Musée du Louvre). Reconstitution par ACTA-Expérimentation lors de sa démonstration à Bliesbrück, en 2005.

On voit qu'entre le grotesque et lourdaud dimachærus/scissor/arbelas et le très sexy champion Spartacus dans son très seyant justaucorps, il y a une marge, et une fameuse. «Pour ce qui est des combattants à deux armes, sica vers le haut ou vers le bas, épées, glaives, massues, ou coupe-ongles cela n'existe jamais dans mon corpus de 1.600 combattants... Mais les «chorégraphes de combats» adorent ça... Ca donne un côté kung fu...», assure Eric Teyssier (16). Et Brice Lopez de renchérir : «Cette interprétation du dimachère [est] une erreur grossière. De plus, il n'y a pas de gladiateur avec cuirasse mis à part le scissor très bien identifié et que l'on peut, pourquoi pas, nommer dimachère. Il suffirait que les réalisateurs soient bien conseillés pour mettre en place des armures vraisemblables, même si, on le sait, la vérité dans ce domaine n'existe pas. Les techniques avec deux épées sont elles aussi bien connues notamment avec une école japonaise de sabre spécialisée sur cette pratique, mais rien dans l'image et l'esprit de l'Antiquité donne à penser que cette technique ait été connue [des Romains]. La gladiature est l'équilibre entre l'art du gladius et l'art du scutum, une symbiose judicieuse entre deux armes dont l'utilisation est parfaite ensemble mais qui séparées perdent énormément de leurs qualités» (17).

Côté positif, on notera néanmoins que la série Spartacus a reconstitué avec un certain bonheur et en deux exemplaires la fameuse sica trouvée en 1977 à Oberaden. Dans l'épisode 12, Spartacus en manie deux dont il tient les pointes orientées en sens contraire, ce qui tendrait à confirmer - si besoin était - que les acteurs de cinéma font du show mais ne cherchent pas sérieusement à efficacement utiliser leurs armes !

sica
 
spartacus sica

Conservée au Römisch-Germanisches Zentralmuseum de Mayence, cette sica d'entraînement taillée dans du bois de frêne, était longue de 46,5 cm, donc un peu plus courte que dans la série TV (source : catalogue de l'exposition Les gladiateurs. Musée archéologique de Lattes (26 mai-4 juillet 1987), p. 178)

 

3.4.9. Le bouclier : arme défensive et offensive
On s'étonnera de fréquemment voir les gladiateurs s'exercer sans bouclier. Mais on notera aussi avoir observé le bord du bouclier utilisé comme arme offensive, lorsque Crixus s'apprête à broyer le larynx de Spartacus à l'issue de leur duel sur le pont de bois (ép. 3).

ludus gladiatorus
 
mirmillon - thrace

Dans le ludus gladiatorus, l'escrime des gladiateurs n'a pas grand chose à voir avec celle des Romains. On se cogne consciencieusement dans les boucliers, on croise le fer : c'est de l'escrime moderne à laquelle on a rajouté des boucliers pour faire contrepoids. Il faut de grands moulinets pour donner du spectacle, n'est-ce pas ?... Dans les reconstitutions d'ACTA-Expérimentation, le bouclier est aussi offensif que défensif et l'expression «corps-à-corps» prend toute sa saveur comme ici. Remarquons au passage l'action du mirmillon, qui avec son pugio aiguisé comme un rasoir tente de balafrer l'épaule du thrace en vue de l'épuiser et d'obtenir sa soumission (Malagne, 2005 - photo M. Eloy)

 

3.4.10. Armes défensives
Parmi les moins bonnes choses, il y a par exemple la présence de légionnaires qui assurent la sécurité du ludus et portent des lorica segmentata et des casques d'époque impériale...

Les casques des gladiateurs sont en revanche assez fidèles aux modèles connus de Pompéi, quoique ceux-ci soient plus tardifs d'au moins un siècle comme expliqué plus haut. Un bémol pour le casque Spartacus, dont la visière, sur le front, se divise en croissant de lune : deux aspérités qui offrent prise à l'adversaire. Dans l'ép. 5, lorsque Spartacus et Crixus affrontent Théokolès, la partie supérieure de la grille faciale de leur casque a été découpée. A décharge, il semble qu'à l'époque tardo-républicaine, comme dit plus haut dans la «Mise au point», la plupart des armaturæ combattaient sans protection faciale (18).

gladiateur provocator

Duel entre provocatores (Musée des Thermes de Dioclétien, Rome, fin du Ier s. av. n.E.). On voit que le provocator, avec son pectoral et son bouclier de longueur moyenne, tire son origine du samnite. Il ne possède qu'une seule ocrea, portée à gauche, et est coiffé d'un casque militaire qui laisse le visage à découvert. Ce casque d'origine celtique appartient au «type Weisenau», qui se caractérise par un couvre-nuque le plus souvent oblique et bien développé et une ouverture pour les oreilles, adopté par les légionnaires après la Guerre des Gaules : ainsi combattaient les gladiateurs sous le règne d'Auguste. Les protections faciales n'apparaîtront qu'au milieu du Ier s. de n.E.

Une judicieuse notation : avant d'y arrimer leurs jambières (ocreæ), les gladiateurs saucissonnent une épaisse matelassure sur leur jambe, afin d'absorber les chocs. On sait, en effet, qu'aucune armature interne n'existait dans les armes défensives de l'Antiquité (casques, plastrons, jambières etc.), au contraire des équipements sportifs ou militaires modernes. Souvent même, sur les jambières, il n'existait aucun œillet par où glisser un lacet; celui-ci passait alors par-dessus, et comprimait l'ocrea contre le tibia.

ocreae
 
manica

Non seulement les ocreæ, mais également la manica sont rendues plus efficaces par une matelassure

 

3.4.11. L'escrime
Ancien champion d'escrime avant de devenir réalisateur de seconde équipe, Noël Howard débuta à Hollywood comme cascadeur-escrimeur dans des films de cape et d'épée. Dans ses mémoires intitulées Hollywood sur Nil, il fait un savoureux commentaire des spectaculaires duels auxquels il contribua comme antagoniste. Aussi ne s'étonnera-t-on pas si des spécialistes pointus comme Eric Teyssier ou Brice Lopez trouveraient à redire des «reconstitutions» filmiques : entre le cinéma et l'archéologie expérimentale, il y a une marge. Un connaisseur comme l'étaient tous, peu ou prou, les Romains, ne verra pas un duel de cinéma avec le même œil qu'un spectateur-lambda d'aujourd'hui, grignotant son pop-corn devant son téléviseur.

spartacus

Dans Spartacus, têtes, bras, cuisses sont sectionnés d'un simple revers - et dans l'éblouissement d'un orgasme hémoglobineux l'on assiste aux blessures les plus improbables comme ce gladiateur coupé en deux à hauteur de la ceinture, par Théokolès surnommé «l'Ombre de la Mort» (ép. 3)

A vrai dire, il y a comme un malaise dans l'idée hésitante que se font de la gladiature les scénaristes de Starz. Tantôt elle est montrée comme une tuerie ultra-violente où tout est permis : les têtes, jambes et bras sectionnés, filmés au ralenti dans des grandes éclaboussures de sang virtuel ! Et tantôt les combattants, tenant leur adversaire à merci, attendent l'ordre de l'éditeur pour égorger leur adversaire. Dans ce dernier cas de figure, on notera l'absence de doctores arbitrant les duels pourtant bien attestés par l'iconographie.

Dans les années soixante-dix avant notre Ere - au temps de Spartacus - nous sommes donc encore à l'époque de la «gladiature ethnique», c'est-à-dire au temps où les principales armaturæ sont issues de nations vaincues : Samnites, Gaulois et Thraces. Rétiaire et Mirmillon commencent à émerger, mais il faudra attendre le règne d'Auguste pour voir apparaître provocatores, secutores et hoplomaques et voir se définir les règles de la «gladiature technique».

Il y a dans le premier épisode un rétiaire casqué (avec un curieux «trident» à cinq dents, qui nous vient de Gladiator. Normalement, les rétiaires combattent tête nue, car la légèreté et la mobilité sont leur caractéristique. Mais un gobelet trouvé à Lyon nous offre l'image d'un proto-rétiaire complètement cuirassé et casqué (19).
En revanche, on peut également voir intervenir un autre gladiateur armé d'une hache, arme qui à notre connaissance n'est attestée nulle part ailleurs qu'au... cinéma.

spartacus - gladiateurs

Seul contre quatre adversaires équipés de toutes pièces, Spartacus armé d'un simple glaive va chèrement défendre sa peau. Pas de doctor ni de ministri pour arbitrer ce combat qui est, en fait, supposé être une exécution publique et rien d'autre (ép. 1)

Sur la photo ci-dessus, on peut voir Spartacus nu, au centre. A l'arrière-plan, un proto-rétiaire. Au premier-plan, de gauche à droite, un parmatus (thrace), un scutatus (mirmillon, samnite ?) et un hoplomaque (parma et lance).
Absolument tous les quatre protagonistes portent une paire d'hautes ocreæ, qui est normale chez les parmati (petits boucliers), mais incongrue chez les grands boucliers (scutati) lesquels n'en portent qu'une courte sur la jambe gauche, ou pas du tout, suivant le type d'armatura.

Scepticisme aussi de voir Spartacus armé d'un simple glaive affronter quatre gladiateurs équipés de toutes pièces (le but semble en fait son exécution, mais quel intérêt de montrer au public un combattant aussi désavantagé ?). Dans l'escrime antique, en effet, le bouclier est «au centre du débat». Combattre sans bouclier enlève son sens à la technique sportive (un peu comme si au football on autorisait la main).

 

4. Conclusions

Comme souvent les films ou séries historiques, Spartacus : Blood and Sand est un plus ou moins habile mélange d'exactitude historique et de lieux communs, d'idées reçues sur la Rome antique. Nous ne devons jamais perdre de vue que le but des producteurs est de nous raconter une histoire. Une histoire qui nous touche au-dessus ou en dessous de la ceinture, peu importe, pourvu qu'elle captive son public. «Où finit la réalité et où commence la fiction ? Plus cette ligne de démarcation est floue, mieux cela vaut. Moins elle est définie, plus la légende de Spartacus devient réelle. (...) Le spectateur doit être persuadé qu'il s'agit bien de la Rome ancienne et non pas d'un studio de production à Auckland, Nouvelle-Zélande, quelque deux mille ans plus tard» (20). On pourra toujours discuter de la relation maîtres/esclaves ou du harnachement des gladiateurs, de leur manière de pointer le glaive etc. Les historiens eux-mêmes ne sont pas d'accord entre eux, alors... alors s'engouffrant dans ces zones d'ombre, le scénariste, le costumier etc. font un peu ce qu'ils veulent, c'est-à-dire ce qu'ils croient que le public attend d'eux. Un public qui n'y connaît pas grand chose, ou si peu. Alors oui, on donnera de Rome une vision qui est dans l'air du temps, pas forcément celle qui gît dans les cartons des spécialistes.

A des realia plus ou moins connues du public, on va aussi raccrocher des interprétations hasardeuses. Ainsi les masques mortuaires des ancêtres, moulés sur leur visage, que des comparses revêtent lors des funérailles - jouant le rôle des aïeux qui, en cortège, accompagnent le défunt dans l'Autre-Monde. Dans Spartacus, ils font l'objet d'une curieuse interprétation/déviation. D'abord on peut douter qu'un Batiatus, manifestement plébéien autant par sa manière d'être, ses ambitions et sa méprisable profession de laniste, en ait jamais possédé. Mais passons. Son épouse Lucretia arrangeant en toute discrétion des rendez-vous galants entre patriciennes et gladiateurs, a l'idée de leur faire revêtir ces masques «qui sont dans la famille depuis plusieurs générations». Le port de ces masques fleure bon le libertinage sous la Renaissance; il s'agit d'ailleurs de masques représentant des divinités, non les aïeux de Batiatus. Celui que choisit Licinia représente Diane, avec son croissant lunaire dans la chevelure. Il s'agit donc de tout autre chose que des imagines conservées dans le Laraire; mais d'accessoires de carnaval permettant de nouer des relations équivoques. Anticipant ses débauches, des esclaves nues - comme il se doit dans Spartacus - portent ces masques pour permettre à Licinia de choisir le sien.

esclaves nues
 
lucretia

Biens de famille depuis des générations, les masques de Lucretia sont maintenant destinés à un usage bien particulier qui évoque plutôt les Bacchanales de l'Italie du Quattrocento que la Rome tardo-républicaine

Nous avons essayé de faire de tour de la série Spartacus : Blood and Sand (le titre parle de lui-même). Il y est question de la civilisation romaine et, surtout, des gladiateurs. «Je veux ta bite en moi», dit Lucretia à Crixus. C'est peut-être choquant dans la bouche d'une Romaine (les mots, pas la bite bien sûr !), mais la littérature et l'épigraphie latines nous apprennent que les Romains savaient être très crus. Ils étaient aussi très prudes, mais aux thermes - à certaines époques en tout cas - les deux sexes pouvaient se côtoyer dans la tenue de leur naissance. Ca peut paraître paradoxal, mais c'était comme ça.
Par ailleurs, les Romains n'avaient pas de mot pour désigner l'homosexualité, mais en revanche ils savaient très bien faire la différence entre un enculeur et un enculé, entre celui qui était actif et celui qui était passif. Ce dernier était méprisé, c'est pourquoi le rôle était généralement dévolu aux esclaves, ou à tout le moins à des non-citoyens. Bien sûr, il y avait forcément des exceptions, des citoyens invertis (cinædus, impudicus). Mais les peintures érotiques de Pompéi ne doivent pas nous égarer : elles ornaient des lupanars, et n'illustraient pas la vraie vie des Romains. Seulement leur vie rêvée. Leurs fantasmes. Ce n'est pas parce qu'il y a des bordels dans cette ville que tous ses habitants y courent ! Et ce n'est pas parce que vous regardons des DVD hardcore particulièrement croustillants ou crades, ou des feuilletons policiers sur des serial-killers - très tendances de nos jours - que nous en reproduisons les péripéties dans la vie ordinaire.

cunnilungus - cunnilinctus

Cette fresque érotique où l'on voit le mâle - habillé - dominé par femme sur laquelle il pratique le cunnilinctus est unique en son genre (d'ordinaire dans les documents figurés romains le cunnilinctus va de pair avec la fellation dans la célèbre position en tête-bêche dite «69»). Elle a été trouvée dans les Thermes à Pompéi en 1986, où elle semble avoir été mise dans l'intention d'un clin d'œil malicieux, la morale officielle interdisant ce genre de pratique contraire à la dignitas et les bains publics ne s'y prêtant pas vraiment, surtout lorsque les sexes sont séparés (d'après J.R. Clarke, Op. cit., p. 124)

Quant à la reconstitution de la vie des gladiateurs, toute ruisselante de testostérone, elle vise assurément à nous émoustiller. Elle est en tout cas très hésitante entre les idées reçues d'hier, et ce que nous laisse aujourd'hui entrevoir l'archéologie expérimentale. Aussi bien est-il vrai que, se situant à la charnière entre la «gladiature ethnique» et la «gladiature technique», il est donc tout-à-fait concevable que des scénaristes de l'épopée de Spartacus en aient mélangé les caractéristiques essentielles pour rendre leur fiction plus... entertainement.


 

5. Internet

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NOTES :

(1) Des prisonniers mal armés affrontant des Guerriers-Aigles ou Jaguars, qui les massacraient. - Retour texte

(2) Y ajouterions-nous l'essédaire, qui combat en char comme les Bretons ? - Retour texte

(3) C'est Statilius Taurus qui, le premier, en bâtit un en pierre en 20 av. n.E. Jusque-là, les combats avaient lieu dans des structures provisoires, en bois, sur le Forum romain. - Retour texte

(4) Dans son roman La colère de Spartacus (Les Maîtres de Rome), Colleen McCullough propose une hypothèse intéressante : Spartacus n'était pas Thrace de nation, mais thrace par son appartenance à cette armatura. Il aurait été un centurion romain d'origine campanienne partisan de Marius, pris par les syllaniens et vendu comme gladiateur. Ce qui expliquerait sa tentative de quitter l'Italie par les Alpes, afin de rejoindre en Espagne le dernier marianiste insoumis : Q. Sertorius. Hypothèse de romancière qui en vaut d'autres, car nous ne saurons jamais pour qui roulait le véritable Spartacus. - Retour texte

(5) Il y a eu d'autres révoltes incluant des gladiateurs, mais où ils n'étaient sans doute impliqués que comme hommes de mains ou milices privées (voir Chronologie). - Retour texte

(6) Il doit s'agir du primus palus, le grade le plus haut dans la gladiature; on connait également les secundi pali, triti pali et tout en bas dans la hiérarchie les tirones (débutants). - Retour texte

(7) Enfin pas exactement. Egalement employé comme homme de main par son dominus, Barca aurait laissé en vie un témoin gênant... - Retour texte

(8) Muscle & Fitness, op. cit., p. 121. - Retour texte

(9) Daniel Feuerriegel, qui incarne le gladiateur germain Agron. - Retour texte

(10) Joe WUEBBEN (photos : Ian SPANIER), «L'école des gladiateurs», Muscle & Fitness (éd. fr.), nç 271, mai 2010, p. 116 sq. - Retour texte

(11) Sur le conditions d'engagement des auctorati, la prime d'engagement (pretium auctoramentum gladiatorum) et leurs gains, cf. Anne BERNET, Les gladiateurs, Perrin, 2002, pp. 97-102. - Retour texte

(12) Mais comme il est toujours à court d'argent, on peut douter qu'il ait économisé de quoi se racheter. - Retour texte

(13) L'essédaire est un gladiateur combattant en char, à la manière des Bretons vaincus (?) par Jules César. - Retour texte

(14) E. TEYSSIER, La mort en face, Actes Sud, 2009, pp. 157-166. - Retour texte

(15) En Occident, il est à ce moment déjà tombé en désuétude. - Retour texte

(16) Courrier électronique à l'auteur, 19 mai 2010. - Retour texte

(17) Courrier électronique à l'auteur, 20 mai 2010. - Retour texte

(18) Victor Mature porte un casque semblablement découpé dans Les gladiateurs de Delmer Daves (1954). Selon nous, ce modèle fantaisiste semble redevable aux grilles de protection faciale des casques de football américain. - Retour texte

(19) Gobelet de Chrysippus, dernier quart du Ier s. av. n.E. Cf. Eric TEYSSIER, La mort en face, Actes Sud, 2009, p. 61. - Retour texte

(20) Muscle & Fitness, op. cit., p. 113. - Retour texte