13 janvier 2008
NEWS - TV : Troie, mythe ou réalité
? - La véritable histoire de Troie (documentaires)
Depuis quelques années, deux documentaires relatifs
à Troie et à son siège fameux passent
régulièrement sur la chaîne «Planète
- Toute l'Histoire». La dernière fois, ce 13
janvier. Comme les visiteurs de notre site parlent beaucoup
de Troie ces derniers mois, il nous a paru intéressant
d'en rendre compte ici.
Pour mémoire, Wolfgang Petersen - le réalisateur
de Troie - discuta avec son compatriote archéologue
Manfred Korfmann des dernières découvertes sur
le site. Ce qui expliquerait, notamment, le look hittite
des Troyens et, surtout, les dimensions de la ville de Troie
qui dans le film de Petersen déborde largement la capacité
de la butte d'Hisarlik [ou Hissarlik]...
Cette relation étroite des Hittites avec Troie
qui appert ici avait été pressentie dans les
années '60 déjà, par le romancier américain
Noel B. Gerson dans Le Troyen (Fleuve Noir, coll. «Les
Grands Romans», 1965), sur lequel nous reviendrons,
à l'occasion.
Troie, mythe ou réalité
? (2004)
Prod. : Eagle Media Productions (EMP) / Coul. / Son
: Mono / 50'
Script adapt. : Steve GILLHAM; Prod. : Steve GILLHAM &
Alan RAVENSCROFT; Camera : Trevor GREEN & James FRENCH;
Graphics : Matt SUGARS, David ROGERS; Rostrum : Shelly DAVIES;
Editor : Kirk BRITTEN; Musique : Tom SMAIL.
Avec : Tony SPAWFORTH, historien - Ken WARDLE, historien
- Peter CLAYTON, historien - Brian BLESSED, tragédien
- Malcolm TODD, historien - Donald EASTON, archéologue
- Niall Mc KEON, historien.
VF : IMAGINE pour les chaînes Planète. Adapt.
: Michelle MAIGNÉ-TUNNICLIFFE. Voix françaises
: Philippe SOLLIER - Gilles BLUMENFELD - Marc BRUNET - Michel
MONTANA.
La guerre de Troie aurait débuté en 1193
avant Jésus-Christ, après que le Prince troyen
Pâris eût enlevé Hélène à
son mari, le roi de Sparte. Le récit poétique
de cette guerre, rédigé par Homère, est
encore aujourd'hui l'un des plus importants et des plus connus
de l'histoire. Mais au-delà du mythe et de la légende,
quels sont les faits avérés sur lesquels reposent
les écrits d'Homère ? La guerre de Troie a-t-elle
vraiment eu lieu ?
Une enquête, au-delà du mythe, sur les réalités
historiques qui sous-tendent le récit que fit Homère
de la fameuse guerre de Troie, qui opposa Grecs et Troyens.
La guerre de Troie nous est connue par
diverses sources classiques et, en premier lieu l'Iliade
qui, en vérité, traite d'événements
qui seraient survenus... 500 ans avant Homère. L'historien
Tony Spawforth nous rappelle que c'est Heinrich Schliemann
(1822-1890) qui retrouva le site de Troie sous la butte d'Hisarlik
[«la Citadelle»], en Turquie. Et que le nom d'Homère,
auteur de l'Iliade et de l'Odyssée, recouvrirait
deux ou trois différents personnages. Il semble toutefois
que l'Iliade aurait eu un auteur unique, qui rassembla
et compila ses sources dans la seconde moitié du VIIIe
s. av. n.E. L'historien Ken Wardle rappelle ensuite que la
riche métropole qui, au XIIIe s., florissait sur le
détroit des Dardanelles, était contemporaine
des forteresses de Mycènes et de Tirynthe, dont la
civilisation dominait le S.-E. de la Grèce. Ces données
archéologiques concordent avec les dates de 1250-1200,
fourchette dans laquelle les sources littéraires grecques
situaient la Guerre de Troie. Ensuite, l'historien Peter Clayton
vient nuancer l'identification de Troie avec Hisarlik (1)
: depuis 1870, que de polémiques à son sujet
! Notamment l'objection d'historiens militaires : la butte
d'Hisarlik pouvant au maximum contenir trois cents personnes,
quid des 50.000 combattants dont parle Homère
? Après les fouilles de l'assistant de Schliemann,
W. Dörpfeld (1893), puis celles de Carl W. Blegen de
l'Université de Cincinnati (1932), celles de Manfred
Korfmann et de son équipe internationale sont venues
jeter de nouveaux éclairages (1988). Aucun doute possible
sur l'identité du site que les Romains - qui s'y établirent
plus tard - nommaient Novum Ilium. Quand à la
place disponible et plutôt congrue, fouillant en contrebas
de la forteresse, Korfmann découvrit une vaste cité.
Après les auteurs de l'Antiquité,
Troie fascina l'imagination des modernes. Le tragédien
Brian Blessed (2),
lit le prologue du shakespearien Troïlus et Cressida,
[une comédie] évoquant notamment les six portes
de la grande cité : la Dardanienne (3),
la Thymbrienne, l'Ilias, la Chétas, la Troyenne et
l'Anténoride.
Cependant, le personnage d'Hélène - par exemple
- n'est pas historiquement prouvé. Cette reine semble
inconnue des annales contemporaines hittites, égyptiennes
ou mycéniennes. Plutôt qu'une guerre pour les
beaux yeux d'une princesse, Blessed préfère
croire avec quelque réalisme que la vraie cause de
la guerre fut plutôt la volonté de pillage.
Donc l'armée grecque débarque à Sigeum
et envahit la plaine où se croisent les fleuves Scamandre
et Simoïs. Mais Troie a-t-elle seulement été
assiégée comme l'affirme Homère ?
Selon l'historien Malcolm Todd, dix années de siège
par une armée de l'importance de celle des Achéens
est, d'un point de vue logistique, invraisemblable; pas même
deux années. Encore à l'époque classique,
les Grecs n'avaient pas grandes compétences en matière
de poliorcétique; les sièges de ville n'excédaient
pas plus de quelques mois. Une exception notable : le siège
de Potidée, qui dura trois ans.
L'archéologue Donald Easton relève
pour sa part que le masque d'or découvert par Schliemann
à Mycènes, qu'il attribua au roi Agamemnon,
était très antérieur à la guerre
de Troie. De même, l'épisode du cheval de bois
à l'intérieur duquel se dissimulèrent
vingt guerriers - dont Ulysse, Diomède, Ménélas
et Philoctète - est assez incroyable.
Récapitulons. Troie ne se limitait pas à la
petite acropole d'Hisarlik : une vaste cité s'étalait
en contrebas de la citadelle. Dix années de siège
est une impossibilité. L'idylle d'Hélène
et son amant Pâris, relève de l'imagination.
Des personnages comme Achille et les autres héros sont
invérifiables. Le cheval de bois, par contre, pourrait
trouver son origine dans ces vases à libations en forme
d'animaux qui apparaissent en Anatolie à la fin de
l'Age du Bronze. Au cours de certaines cérémonies
religieuses, les Hittites en utilisaient - fabriqués
en taille réelle et montés sur roues. Et bien
avant eux déjà, les habitants de Çatal
Hüyük nous ont laissé le souvenir d'un taureau
grandeur nature, monté sur roues et muni d'un bec verseur.
Pourquoi pas un cheval ? Ce genre d'objet aurait pu inspirer
une ruse, ou simplement la légende...
Il nous reste une merveilleuse épopée, aux personnages
en lesquels nous pouvons aujourd'hui encore nous identifier.
Achille n'est pas seulement un superhéros, c'est aussi
un être humain attachant que l'on voit assis aux côtés
de son ennemi Priam, chacun pleurant l'être cher qu'il
a perdu. Il y a aussi le clin d'il que nous adresse,
Héra et ses querelles de ménage, qui sans cesse
houspille son époux Zeus et finit par avoir le dernier
mot !
Intéressant documentaire qui
fait connaître au grand public le résultat des
récentes fouilles de Manfred
O. Korfmann (1942-2005). La VF n'a toutefois pu éviter
deux bévues : déclarer qu'Hélène
avait été «adoptée» par Tyndare(4);
et que lors du sac de la ville, Priam fut tué sous
les yeux de son fils, «le prince Enée»
(sic).
Notons les stock shots d'images d'hoplites en manuvre
(reconstitution), du cheval de bois (reconstitution pour le
documentaire). Des acteurs anonymes et muets figurent le couple
Pâris et Hélène, ou différents
dieux - Zeus, Athéna, Apollon, Héra...
La
véritable histoire de Troie (2004)
Prod. : CTC - Cresset Comunications. Coprod. : AVRO &
TELEAC (Holland) - WDR-ARD (Germany) - VRT (Belgium). Netherlands
Coproduction Fund / Son : Mono / 55' env.
Réal. & Prod. : Roel OOSTRA; (5)
Images : Christine GUGGENBERGER, Ge AARTS; Editor : YVAR;
Illustration Iliad : Alan LEE (courtesy Frances Lincoln
Ltd.).
Remerciements : Donal EASTON - Prof. Manfred KORFMANN - Dr.
Peter JABLONKA (animation Troy) - Christoph HAUSSNER (reconstructions
Troy).
Avec : Donald F. EASTON, archéologue - Prof. Wilfried
MENGIN, directeur du Berlin Historisches Museum - Prof. Ghiorgos
STYLIANOS KORRES, historien (Athènes) - Prof. Joachim
LATACZ, historien - Prof. Manfred KORFMANN, archéologue,
université de Tübingen - Prof. Manfred KOLB, archéologue,
université de Tübingen - Prof. Frank STARKE, hittitologue
- Prof. Hans NIEMEYER, responsable des fouilles à Milet.
Version française : TELE EUROPE pour les Chaînes
Planète. Adaptation : Estelle RENARD. Voix françaises
: Eric ETCHEVERY - Jean-Pol BRISSART - Alain CHOQUET - Bruno
MAGNE.
Diffusion
Planète : Toute l'Histoire, 13 janvier 2008
Après des années d'hésitation et
de fausses pistes, les archéologues semblent être
en mesure d'avancer quelques certitudes concernant la guerre
de Troie.
Avant tout, il s'agit de séparer
la vérité de la fiction. Sur fond d'images extraites
d'un téléfilm biographique allemand reconstituant
le chantier de fouilles de Schliemann, Donald F. Easton, archéologue,
rappelle l'expression d'Homère, «Ilion battue
par les vents...», et rappelle que les bateaux qui
s'engageaient dans le détroit de Dardanelles pour le
remonter jusqu'à la mer Noire devaient affronter vents
et courants contraires. Aujourd'hui, Troie se trouve à
6 km de la mer, mais dans l'Antiquité la ville de Priam
était abritée au fond d'une vaste baie, port
naturel à l'entrée du détroit ce qui
en faisait une plate-forme commerciale idéale à
l'intersection des échanges Asie-Europe, mer Noire-mer
Egée.
Troie VI et VII, qui correspondent au XIIIe s. av. n.E., disposaient
de fortifications de pierre hautes de 5 m, surmontées
de murs de brique crue de 6 m (?) : soit des murailles que
l'on peut évaluer à près de douze mètres
de haut.
Tout a commencé aux Noces de Pélée
et de Thétis, où la déesse de la Discorde
suscita un concours de beauté entre trois déesses,
dont le prince Pâris devait être l'arbitre. Aphrodite
lui ayant promis l'amour de la belle Hélène,
il navigua jusqu'à Sparte. Hélène tomba
sous le charme de ce si beau guerrier, qui l'enleva et - en
plus - pilla tout ce qui lui tomba sous la main. «Cette
histoire nous touche car elle révèle la relation
des hommes et des dieux d'alors comme d'aujourd'hui»,
dit D. Easton.
L'Iliade est le mythe fondateur qui cimente l'origine
commune de tous les Grecs, de la Méditerranée
à la mer Noire, et les distingue des Barbares. Un Barbare,
l'empereur des Perses, y sacrifia mille bufs à
Athéna iliaque avant de franchir l'Hellespont pour
envahir la Grèce; de même, Alexandre le Grand
fit des offrandes au tombeau d'Achille avant d'envahir l'Asie
barbare.
Plus tard, les Romains se considérèrent comme
les descendants des Troyens. Constantin voulut y établir
sa nouvelle capitale d'Orient, celle de l'Empire chrétien;
mais finalement, il opta pour Byzance, à l'autre bout
du détroit, peut-être moins connotée par
le paganisme.
Les Croisés, eux, se voulurent les
vengeurs des Grecs en extirpant de Troie les Turcs musulmans.
Prenant le contre-pied, Mehemet II, Constantinople prise,
se rendit sur le site de Troie et déclara les Troyens
vengés ! La Renaissance s'en inspira. A l'exemple des
Romains, la plupart des grandes dynasties se prévalut
d'une ascendance biblique... ou troyenne : Burgondes, Normands
et même Islandais. Les Francs se vantaient de descendre
de Franco(6);
les Turcs d'un certain Turkus, Troyen lui-aussi... Et si les
Bretons [les Britanniques] pouvaient prétendre tirer
leur origine du Troyen Brutus (7),
leurs ennemis Irlandais - eux - ne pouvaient descendre que
des Achéens (8).
Et dans le delta du Rhin, l'ancienne Colonia Ulpia Traiana
fondée par l'Empereur Trajan sera, à cause de
la consonance de son nom, considérée comme une
fondation troyenne et rebaptisée Xanten (9),
du nom divin d'un des deux fleuves de Troie (le Scamandre
ou Xanthe).
Le Prof. Wilfried Mengin, directeur du
Berlin Historisches Museum, fait une mise au point à
propos d'H. Schliemann (10),
un aventurier milliardaire qui, traversant une mauvaise passe
existentielle (il venait de divorcer), entreprit de faire
des fouilles archéologiques dans le besoin de se faire
valoir socialement. Ceci en «volant» son projet
à un autre érudit moins fortuné que lui,
le vice-consul américain Frank Calvert (11)
qui - le premier - avait repéré le site d'Hisarlik
et acheté une partie du terrain. Ambitieux et impitoyable,
vaniteux et aimant faire étalage de sa fortune, Schliemann,
qui avait déjà exploré Ithaque (1869),
plus tard Mycènes (1876), Orchomène (1880) et
Tirynthe (1884) en Grèce, fit davantage uvre
de chasseur de trésors que d'archéologue. Sans
grande délicatesse, il attaqua la colline en avril
1870 et la déblaya jusqu'à ce qu'il trouve une
cache dans Troie II (mai 1873), qu'il déclara ipso
facto être le «Trésor de Priam».
En réalité, ces pièces d'orfèvrerie
étaient beaucoup plus anciennes... d'un millénaire
(la Troie «homérique» correspondant plutôt
aux niveaux VI-VII, soit 1250 av. n.E.), mais il faut reconnaître
à sa décharge qu'à l'époque les
méthodes archéologiques n'étaient pas
encore très au point (12).
Ensuite, le Prof. Ghiorgos Stylianos Korres
évoque comment Schliemann sortit frauduleusement de
Turquie ses trouvailles, pourchassé par la justice.
Il proposa le «Trésor de Priam» d'abord
à la Grèce, puis au Musée de l'Ermitage
(Saint-Petersbourg), au Louvre, et au British Museum qui refusèrent
de l'acheter. Il finit par l'offrir au Berlin Museum [Musée
d'Art populaire], la capitale en pleine expansion du jeune
Empire prussien.
Et le D. Easton d'ajouter, péremptoire : «Il
n'y a jamais eu de roi nommé Priam. Homère nous
a laissé un merveilleux poème, pas un récit
historique.» [Il est amusant de noter, que si Easton
élude sans complexe les personnages de l'Iliade
ainsi que l'invraisemblable durée du siège,
dix ans, il prend néanmoins pour argent comptant les
chiffres relatifs aux forces en présence - Troyens
et Achéens - car les fouilles de Manfred Korfmann dont
il fut un collaborateur, ont révélé l'existence
d'une vaste cité autour de la colline d'Hisarlik qui
en était seulement la citadelle, pouvant au maximum
loger 300 habitants (13).]
A ce point de l'argumentation, le documentaire
ouvre une parenthèse croquignole : d'abord, sommes-nous
certains de l'identification de Troie ? Pour l'archéologue
«allemand» [zürichois, N.d.M.E.] Eberhard
Zanger, la ville que nous considérons comme Troie serait
en réalité... l'Atlantide. On y a retrouvé
des canaux que l'on peut rapporter au complexe de ports concentriques
décrit par Platon (14).
Le Hollandais Iman
Wilkens pour sa part, situe Troie en mer du Nord. Homère
serait natif de Hollande, Achille de Bruges, Ulysse de Cadix.
Et Troie se serait dressée sur la colline de Gog Magog
près de Cambridge, en Angleterre. Quant à la
guerre fameuse, elle aurait vu s'affronter des Celtes de l'Age
du Fer aux anciens habitants de la Bretagne (15).
Dörpfeld et Blegen étaient
davantage des historiens que des archéologues. En 1988,
fort des derniers acquis de l'archéologie, Manfred
Korfmann, de l'université de Tübingen, décida
de procéder à de nouvelles excavations.
Celui-ci - raconte le Prof. Joachim Latacz, historien - découvrit
au pied de l'acropole d'Hisarlik un centre urbain de dimensions
considérables, dix fois plus grand que ce que l'on
imaginait. De 7 à 10.000 personnes pouvaient s'y réfugier
(16).
Dans un premier temps, les thèses de Manfred Korfmann
furent considérées comme de pures élucubrations.
On le considérait dédaigneusement comme «le
Von Däniken» de l'archéologie».
Mais ses détracteurs durent s'incliner devant les évidences,
comme le reconnaît son ancien opposant et collègue
archéologue de l'université de Tübingen,
le Prof. Manfred Kolb. Découverte sensationnelle, Donald
Easton y trouva en 1995 le sceau d'un scribe contenant une
inscription en hiéroglyphes hittites. Avec ses fortifications
de type anatoliennes, Troie était habitée par
un peuple indo-européen (les Luvites) et était
en relation avec l'Empire hittite !
Les Hittites vivaient dans l'Est de l'Asie
mineure (Anatolie), mais les Etats de l'Ouest étaient
leurs vassaux. Les archives d'Hattusa [Boghaz-Koï], leur
capitale, parlent d'Ahijawa [Ahhiyawa ou Ahhiya], c'est-à-dire
l'Achaïe au-delà de la mer, qui tentait de s'implanter
en Anatolie occidentale. Et elles parlent également
de Wilusa l'Escarpée [Ilios, Ilion] ou
Truwisa [Troie, la Troade], que l'on est à présent
en mesure de situer dans le N.-O. de l'Asie mineure, ce qui
concorde avec l'emplacement de la ville exhumée sous
Hisarlik. Il est également question d'un traité
signé avec le roi de Wilusa, Alaksandus, en
qui il est tentant de reconnaître Alexandre, le second
nom du Troyen Pâris ! Ce traité d'alliance avec
les Hittites prend à témoin la divinité
d'un cours d'eau souterrain passant sous la ville - ce cours
d'eau a été retrouvé par Korfmann : en
fait il y avait tout un complexe d'égouts sous Troie.
Et, recoupement, l'on peut constater qu'au XIIIe s., les fortifications
de Troie furent renforcées, probablement dans la crainte
d'une attaque contre Wilusa maintenant alliée des Hittites.
Que s'était-il passé ?
Le Prof. Frank Starke, hittitologue, pense
avoir trouvé la réponse au courrier échangé
entre le roi des Hittites et Alaksandus : une lettre du roi
d'Ahijawa au souverain hittite, qu'il appelle «son frère»,
contestant la souveraineté hittite sur une île
au large du N.-O. de l'Anatolie. Responsable des fouilles
à Milet, le Prof. Hans Niemeyer jette un éclairage
sur ce litige. Une précédente contestation avait
opposé aux Hittites le roi d'Ahijawa, à propos
de Millawanda (Milet), ville grecque depuis plusieurs
siècles, qu'avaient pris les Hittites. Il faut savoir
que, sise sur le fleuve Méandre, Milet ou Millawanda
commandait la vallée, la route qui conduisait au cur
de l'Anatolie et de l'Empire hittite.
On peut dès lors concevoir que les Achéens cherchèrent
à compenser la perte de Millawanda en se retournant
contre Wilusa dont la position contrôlait une autre
route vers l'Orient, celle de la mer Noire.
Dans ce courrier, le roi des Achéens
se nomme «fils de Kadmu». Nom que l'on peut rapporter
à Cadmos de Thèbes, ce qui laisserait entendre
que le Grand Roi des Achéens ne serait pas un «Agamemnon
de Mycènes» (17),
mais un roi de Thèbes, en Béotie. Il
est curieux en effet de noter que selon la tradition grecque,
le Grand Roi de Mycènes ne rassembla pas sa flotte
en Argolide mais sur la côte de Béotie, à
Aulis (18).
Le sac de Troie, la sécheresse,
la famine sonnent le glas de l'Age du Bronze : Mycènes,
l'Empire hittite déclinent. De nouveaux peuples apparaissent,
ou sortent de chez eux pour attaquer leurs voisins [les Peuples
de la Mer - N.d.M.E.].
Il faut relativiser Homère : on ne peut affirmer que
la guerre de Troie a bien eu lieu. Elle n'a pu durer dix ans.
Il n'y eut pas d'Agamemnon. Mais le cheval de Troie aurait
pu être un de ces vases d'offrande géants montés
sur roue, comme le taureau d'un bas-relief représentant
une procession retrouvé à Alaca Höyük
(19).
Toutefois nous avons des éléments qui nous permettent
de comprendre comment Homère a construit son poème,
un reflet du VIIIe s.
«Cessez de vous combattre entre vous (Achille
et Agamemnon)... tel serait le message caché de
l'Iliade» (sic).
Liens |
FILMS |
- Colère d'Achille (La) (Mario Girolami,
1962) (DVD) :
- Guerre de Troie (La) (Giorgio Ferroni, 1961)
(DVD Fabbri - 11) : notule
- Helena de Troya (Robert Wise [& Raoul Walsh],
1956) (DVD Impulso Records - 1a) : notule
- Hélène de Troie (John Kent Harrison,
2003) [TV] : dossier
- Hélène, reine de Troie (The Lion
of Thebes) (Giorgio Ferroni, 1965) : Pack
Warriors DVD
- Hercule et la Princesse de Troie (Hercules and
the Princess of Troy) (Albert Band [= Alfredo Antonini],
1965) : Pack
Warriors DVD
- Hercule, Samson et Ulysse (Pietro Francisci,
1963) : dossier
- Odyssée (L') (Andrei Konchalovski, 1997)
:
- Odyssée (L') ou Aventures d'Ulysse (Les)
(Franco Rossi, 1969) : courrier
- Star Trek : «Elaan of Troyius» :
courrier
- Troie (Troy) (Wolfgang Petersen, 2004) :
- Ulysse (Mario Camerini, 1953) (DVD Fabbri - 2)
: notule
- Ulysse 31 (Bernard Deyries, Kyosuke Mikuryia,
Kazuo Terada & Tadao Nagahana, 1981) [dessin animé]
: notule
- Ulysse contre Hercule (Mario Caiano, 1962) (DVD
FIP) :
- filmographie - Troie (guerre de), Atrides, Electre
: page
- filmographie - Troie : Hercule assiège
Troie : dossier
- filmographie
de l'Odyssée
- téléfilms : courrier
|
|
THÈMES
ET PERSONNAGES |
- Ajax : courrier
& courrier
- armements et combats : courrier
- format écran DVD Ulysse : courrier
- Diomède : courrier
- fortifications : dossier
- Giraudoux (Jean), La guerre de Troie n'aura pas
lieu - idéologie : courrier
- guerre (la) : courrier
- Hélène de Troie : courrier
- Ilos (fondateur d'Ilion) : courrier
- Le Gendre (Camille), La colère d'Achille,
2006 (BD) : courrier
- Mangin (Valérie) & Démarez (Thierry),
Le dernier Troyen - Chroniques de l'Antiquité
galactique/1 : Le cheval de Troie, 2004 (BD) :
courrier
- personnages de la guerre (les) : courrier
- Shanower (Eric), L'âge du bronze, 2001
(BD) : courrier
- Simmons (Dan), Ilium (roman SF) : courrier
- site archéologique (le) : dossier
|
Mourir pour Troie
Enfin, signalons le livre d'Annie Collognat, Mourir pour
Troie - compilant et mettant en perspective les tragiques
grecs.
Annie COLLOGNAT, Mourir pour Troie - Euripide, Eschyle,
Sophocle, Paris, Omnibus, 2007, XXIV-997 p.
ISBN-10: 2258075270 - ISBN-13: 978-2258075276
Ce volume réunit 14 tragédies grecques mettant
en scène les héros et les héroïnes
de la guerre de Troie. Il propose également des informations
sur les personnages, les noms de lieux ou des repères
historiques sur les Atrides ou sur la ville de Troie : Iphigénie
à Aulis (Euripide) - Ajax (Sophocle) - Philoctète
(Sophocle) - Les Troyennes (Euripide) - Hécube
(Euripide) - Andromaque (Euripide) - L'Orestie :
Agamemnon, Les Choéphores, Les Euménides
(Eschyle) - Électre (Sophocle) - Électre
(Euripide) - Oreste (Euripide) - Iphigénie
en Tauride (Euripide) - Hélène (Euripide).
Edition établie par Annie Collognat avec les traductions
d'Euripide, Eschyle et Sophocle par Leconte de Lisle entièrement
revues.
Présentation de l'éditeur
L'Iliade d'Homère est l'épopée
de la Guerre par excellence. Elle raconte les batailles qui
opposèrent Grecs et Troyens, devant Troie assiégée,
de la colère d'Achille, bafoué dans son honneur
de «meilleur des guerriers» par Agamemnon, à
la mort d'Hector, fils de Priam et champion des Troyens. Mais
le poème d'Homère comporte bien des lacunes
et c'est dans les pièces d'Eschyle, Sophocle et Euripide
qu'il faut retrouver toute l'histoire de la guerre de Troie.
Au fil des épisodes dramatiques, ce n'est pas seulement
la guerre que l'on découvre, mais aussi ses origines
et ses préparatifs et, plus encore, sans doute, ses
conséquences à travers le retour des vainqueurs
dans leurs patries. Des préquelles, selon l'expression
qu'emploie souvent le cinéma aujourd'hui, aux séquelles,
se dessine le long cheminement d'un fléau engendré
par une querelle divine : de la pomme de Discorde au matricide
d'Oreste, le dernier des Atrides, le destin est à l'uvre
et l'incendie de Troie n'en finit pas de resplendir d'un sombre
éclat.
Annie Collognat a également préfacé
le catalogue de la Bibliothèque Nationale française
: Le Héros, d'Achille à Zidane (9 octobre
2007 - 13 avril 2008).
Achille, Héraclès, Roland, Lancelot, Jeanne
d'Arc, Condé, Napoléon, Jean Moulin, De Gaulle,
Lucie Aubrac, Che Guevara, Jimi Hendrix, Superman, Zidane,
le grand livre de l'histoire et de l'actualité est
peuplé d'êtres exceptionnels qui tous, à
des degrés divers, incarnent des rêves collectifs,
où le besoin de gloire, de puissance, voire d'immortalité,
trouve à s'exprimer.
Qu'il s'agisse de la cité grecque, de l'Occident chrétien,
de la construction de l'Etat-nation ou d'un univers mondialisé,
les héros permettent de concentrer sur un personnage
un corpus de valeurs abstraites et diversifiées.
Qu'est-ce donc qu'un héros ? D'abord - et c'est ainsi
que l'aborde l'exposition - le produit d'un discours. A chaque
époque ses héros et un support privilégié
de médiatisation. Pour le héros épique,
le poète; pour le héros national, l'historien,
et pour le héros moderne, composite et mondialisé,
le système médiatique. L'exposition s'attache
ainsi à montrer que le chant épique comme les
jeux vidéo, les manuels scolaires comme les articles
de journaux et l'imagerie populaire, produisent des personnages
héroïsés, profondément révélateurs
de nos civilisations. Certains héros inscrivent leur
gloire dans le temps, d'autres seulement dans l'espace mondialisé
de la communication...
NOTES :
(1)
Hissarlik était en concurrence avec le site de Bunarbashi,
sept kilomètres plus au sud. Outre d'être un
nichoir à cigognes, Bunarbashi passait avoir pour
elle la présence de deux sources, une chaude et une
froide, conformément à l'Iliade (Il.,
XXII, 147-152) : en réalité, elle en comptait
34, ainsi que Schliemann les dénombra; et aucune
chaude ! D'autres caractéristiques topographiques
mettaient le site de Bunarbashi en contradiction avec le
récit homérique : à trois heures de
marche, Bunarbashi était trop éloigné
de la mer pour concorder avec les mouvements de l'armée
achéenne qui était censée faire l'aller
et retour plusieurs fois dans la même journée.
En outre, il était trop escarpé pour qu'Achille
en fisse trois fois le tour en char en tirant le cadavre
d'Hector (N.d.M.E.). - Retour texte
(2)
Qui incarna Auguste dans la série BBC I
Claudius, 1976 .- Retour texte
(3)
La fameuse porte Dardanienne ou «Porte Scée»
(de skaios «à gauche» ou «sinistre»),
près de laquelle se dressait le tombeau de Laomédon,
aurait ainsi été surnommée parce que
c'est par elle que fut introduit le Cheval de Bois. Elle
s'ouvrait sur la plaine du Scamandre et le champ de bataille;
c'est à son emplacement que s'assemblaient le roi
Priam et les Anciens pour observer les combats, et c'est
de là-haut qu'Hélène leur nomma les
principaux héros achéens.
Enfin, c'est devant cette porte Scée que le brave
Hector fit ses adieux à Andromaque (Il., VI,
369-502) et c'est devant elle toujours, «devant
l'observatoire et le figuier battu par les vents»
que le même Hector se fit tuer par Achille (Il.,
XXII) (N.d.M.E.) - Retour texte
(4)
Des enfants de Léda, Hélène et Pollux
avaient Zeus pour père, Castor et Clytemnestre Tyndare.
Dans ce contexte-là, le roi Tyndare aurait effectivement
adopté la progéniture divine. Mais de tout
ceci le docu ne souffle mot (N.d.M.E.). - Retour
texte
(5)
Réalisateur, aux Pays-Bas, de Het Geheim van de
Piramides (1996).- Retour texte
(6)
Par Pharamond, père de Mérovée. Ce
Franco, ou plutôt Francio, aurait été
un fils d'Hector. Cf. par exemple Jean LEMAIRE DE
BELGES, Les illustrations de Gaules et singularitez de
Troye (1511-1512), édition Stechert, 1882.
De même Paris aurait été fondée
par des descendants de Pâris et Reims par Rémus,
frère de Romulus (N.d.M.E.). - Retour
texte
(7)
Brutus, fils d'Enée. Cf. Le Brut des Rois de Bretagne
(N.d.M.E.). - Retour texte
(8)
Par Partholon, venu de Grèce avec 24 couples de colons
selon le Lebor Gabala (Livre des Invasions). Partholon
aurait été chassé d'Hellade par le
Déluge et sa race fut la première à
occuper l'Irlande, qu'elle domina pendant 5.000 ans, luttant
contre les Fomorés (ou Fomoires); elle fut finalement
décimée par une épidémie, ne
laissant qu'un unique survivant, Tuan mac Cairill (N.d.M.E.).
- Retour texte
(9)
La patrie de Siegfried,
le héros des Nibelungen. A noter que son antagoniste
Hagen de Tronège
passait lui-aussi pour être originaire d'une autre
«petite Troie» (N.d.M.E.). - Retour
texte
(10)
On complétera avec le dossier : «Le Trésor
de Priam retrouvé», Dossiers d'Archéologie,
n° 206, Faton éd., août-septembre 1995. - Retour
texte
(11)
F. Calvert étant lui-même d'origine britannique
(N.d.M.E.). - Retour texte
(12)
Schliemann fit trois campagnes de fouilles à Troie
: 1870-1873, 1879 et 1882 (N.d.M.E.). - Retour
texte
(13)
A en croire l'Iliade, le palais de Priam, avec ses
cinquante fils et nombreux gendres, aurait compté
62 pièces (N.d.M.E.). - Retour
texte
(14)
Cf. L'Atlantide. A la recherche de la cité perdue,
documentaire de Martin PAPIROWSKI et Luisa WAGNER-ROOS (ZDF,
41', AL - 2003). Diffusé sur Arte le 30 janvier 2004.
- Retour texte
(15)
D'autres encore assimilent l'Hellespont à la mer
Baltique et vont chercher Troie en Finlande. Le poème
de Troie aurait ensuite été transposé
en mer Egée par les Doriens (proto-Germains). Voilà
ce que je serais tenté d'appeller «chercher
midi au soleil de minuit» ! Cette thèse «finnoise»
est défendue par l'Italien Felice Vinci, organisateur
du Colloque de Toja (10 août 2007), village de Finlande
supposé être l'antique Troie (N.d.M.E.). -
Retour texte
(16)
«L'un des problèmes majeurs posés
par le site d'Hisarlik (la Troie historique) était
sa petite taille (137 m sur 187 m) comparée a la
Troie décrite par Homère. Trois cents habitants
tout au plus auraient pu vivre dans la Troie VIIa, alors
qu'Homère en décrit cinquante mille. Magnification
et exagération du poète ?
On aurait pu le croire jusqu'à la découverte
lors de nouvelles fouilles en 2001-2002 de la ville basse
: ces fouilles, entreprises par le Dr Korfmann de l'Université
de Tübingen en Allemagne, ont révélé
un mur d'enceinte de type cyclopéen enserrant la
ville basse appartenant à la Troie VIIa.
Cette nouvelle découverte assure à la ville
une superficie de 350.000 m2, soit treize fois plus grande
que celle de la seule acropole que nous connaissions déja.
Avec une taille aussi considérable, Troie dépasse
en superficie sa rivale et maîtresse (?), Ugarit (200.000
m2) et en fait l'une des plus grandes villes de l'Âge
du bronze. Sa population serait alors de 5.000 à
10.000 habitants, ce qui en temps de siège peut tout
à fait être suffisant pour abriter les 50.000
habitants de toute la région» (Wikipedia
: Korfmann). - Retour texte
(17)
Comme le suggèrent d'autres relations épistolaires
du souverain hittite avec l'Achéen Attarassiyas
de Zippasla - à rapprocher d'Atreus
(Atrée), le père d'Agamemnon et fils de Pélops,
donc petit-fils de Tantale que le mythe grec nous dit établi
sur le mont Sipylos en Lydie (avant que Pélops
ne s'établisse dans le Péloponnèse,
en Elide) (N.d.M.E.). - Retour texte
(18)
Et il est tout aussi surprenant de constater que les Thébains
sont absents du catalogue des vaisseaux. Leur ville, en
effet, vient d'être rasée par les Epigones
d'Argos, dont quelques uns comme Diomède fils de
Tydée participent au siège de Troie !
En revanche, ledit catalogue commence son énuméréation
par les vaisseaux béotiens, les plus grands, montés
chacun par 120 jeunes hommes, fait le tour d'horloge à
reculons pour passer en revue les différentes cités
achéennes selon leur situation géographique,
pour revenir à son point de départ et conclure
par Philoctète dont les Etats jouxtent la Béotie
(N.d.M.E.). - Retour texte
(19)
Alaca Höyük est au N.-E. d'Hattusa, la capitale
hittite. Difficile de ne pas songer au conte égyptien
qui raconte comment, prétextant avoir encouru la
disgrâce de pharaon, Thoutîyi pénétra
dans la ville rebelle de Joppé : en cachant ses soldats
dans les jarres censées contenir de l'huile, portées
par les ânes (et qui plus tard inspirera peut-être
l'histoire d'«Ali-Baba et les Quarante Voleurs»).
Plus prosaïquement, l'hypothèse selon laquelle
le Cheval de Troie aurait pu être, tout simplement,
un engin de siège genre bélier ou tour d'assaut,
ou encore mantelet de sapeurs, a retenu notre faveur : en
effet comment expliquer les chicanes des portes de Troie
sinon comme une réponse à l'existence de tels
engins poliorcétiques ? Sur des bas-reliefs assyriens
des IXe-VIIIe s., notamment ceux d'Assurnasirpal II (883-859)
à Kalhu, ou de Sennacherib (704-681) à Ninive
- donc contemporaines d'Homère -, ne voit-on pas
de telles machines, précisément ? Vues sous
cet angle, les machines de guerre (tours roulantes, béliers
et catapultes) d'Hélène de Troie de
Robert Wise, si elles trahissaient Homère carrément,
n'étaient peut-être pas aussi stupides qu'il
n'y paraît (N.d.M.E.). - Retour
texte
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